Situé sur la commune de Morey-Saint-Denis, au sein de “Mountain Farm” à la Ferme de la Buère, ce lieu est à la fois une exploitation agricole et un centre équestre. Le village dédié aux vendangeurs ne cesse de faire parler de lui. Pour rappel, cette année, entre 25 000 et 28 000 vendangeurs travailleront dans les vignes du département. Les domaines ne peuvent pas les loger directement sous des tentes, conformément à la loi.
Face à cette problématique, la préfecture de Côte-d’Or a pris l’initiative de signer une convention le mardi 5 août 2023, avec la CAVB (Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne), officialisant ainsi le lancement du projet. Ce village peut désormais accueillir jusqu’à 75 saisonniers, et le tarif est de 8 euros la nuit par vendangeur. Un journaliste de “Dijon Actualités” s’est rendu sur place (mercredi soir) en se faisant passer pour un vendangeur, cherchant un endroit où dormir. C’était la seule manière de visiter les lieux discrètement.
“Le but était de créer un espace accueillant pour les vendangeurs”, a indiqué Samuel Lenoir de Mountain Farm à nos confrères de France Bleu Bourgogne. Toutefois, l’ambiance sur place est loin de celle d’un camping, comme l’ont souligné plusieurs vendangeurs rencontrés hier soir : « La douche ? Pas avant 17h. Ils ne mettent pas l’eau avant que tout le monde soit arrivé. Les toilettes sont verrouillées la nuit. Ce n’est pas ce que j’appelle un camping, croyez-moi ! », nous confiait un vendangeur mécontent qui a souhaité rester anonyme.
Une vendangeuse nous a confié : « Nous déboursons 8 euros par nuit et par personne. En échange de quoi ? Nous sommes dans un champ où les chevaux paissent habituellement. La boue est omniprésente. Est-ce cela, le camping ? Certaines clôtures sont toujours électrifiées ; nos chiens s’électrocutent, c’est inacceptable ! ». Elle poursuit : « Cela fait plusieurs années que nous participons aux vendanges. Auparavant, nous nous installions près du domaine et n’avions pas besoin d’utiliser notre voiture. Désormais, nous devons nous organiser, avec 15 minutes de trajet pour rejoindre le domaine. » L’atmosphère au sein du village est, pour le dire simplement, peu réjouissante.
Sur les lieux, nous avons remarqué la présence d’un camion-citerne à proximité des sanitaires et des douches. Intrigués, nous avons interrogé un vendangeur : « À quoi sert ce camion-citerne ? »
Il nous a répondu en souriant : « Il alimente les douches et les sanitaires. Mais attention, l’eau n’est pas potable. Sous la grande tente blanche, tu trouveras des bouteilles d’eau Cristaline si tu as soif. » Puis il a ajouté : « Bienvenue au camping, avec tout ce que cela implique ! ».
Nous avons également rencontré Samuel Lenoir, le gérant de ce camping improvisé. Il nous a confirmé que les viticulteurs ne peuvent pas loger les vendangeurs sous tente, et ils n’ont même pas le droit de mettre un terrain à leur disposition. Ensuite, il nous a déclaré : « Ici, nous offrons le strict nécessaire : sanitaires, douches, restauration et une équipe dédiée à votre service ». Lorsque nous lui avons mentionné que nous serions une dizaine à nous joindre, il a répondu : « Ah, une dizaine ? Il faudra voir si nous avons la capacité d’accueillir tout le monde. Ce n’est pas tant un problème d’espace – nous avons de la place ! – mais plutôt une question de capacité liée aux sanitaires. Nous avons une douche pour 15 personnes au maximum. Le hic, c’est qu’à partir de 70 ou 80 personnes, nous atteignons presque notre capacité maximale ».
Nous lui avons demandé combien de personnes étaient présentes sur le site, et il nous a répondu : “Il y a 78 ou 79 personnes actuellement.” Concernant le prix d’une nuit, il nous a informé : « Le camping coûte 8 € la nuit par personne, mais tous les domaines adhérents vous remboursent le prix du camping sous forme de prime, que ce soit une prime d’assiduité ou une prime exceptionnelle. Ainsi, cela ne vous coûte rien en réalité. » Puis il a ajouté : « Tous les viticulteurs jouent le jeu. Ils ne peuvent pas héberger les vendangeurs sous tente, donc ils sont embêtés. Pour eux comme pour les vendangeurs, c’est un bon compromis. »
Cependant, il semble que certains viticulteurs ne respectent pas cet accord, selon ce que nous ont rapporté plusieurs vendangeurs. Bien que Samuel Lenoir ait de bonnes intentions, le défi qu’il s’est lancé ne semble pas, à la vue de nos observations sur place, répondre aux attentes des vendangeurs. Ce camping éphémère est imposé aussi bien aux vendangeurs qu’à certains vignerons. C’est, il faut l’admettre, un problème considérable. De plus, nombreux sont les vendangeurs mécontents qui estiment que pour 8 € la nuit par personne, ils devraient bénéficier d’un meilleur confort.
« C’est avant tout un projet privé qui a acquis une utilité publique. La préfecture et la CAVB [Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne, ndlr] y songeaient depuis longtemps. L’État s’est donc porté garant et prend en charge 80% de l’organisation, les collectivités financent les 20% restants », confie Samuel Lenoir à nos confrères de France 3 Bourgogne. Il ajoute : « Les vendangeurs paient 8 euros la nuitée pour rendre l’hébergement accessible à tous. L’objectif est de parvenir, d’ici 2 ou 3 ans, à un équilibre financier afin de ne pas mobiliser de fonds publics. Quoi qu’il en soit, le projet sera renouvelé chez nous l’année prochaine. Nous répondons aux besoins de certains domaines, mais cela ne suffit pas, car la demande est bien plus importante. »
Espérons que l’an prochain, les toilettes restent ouvertes la nuit, que les clôtures destinées aux chevaux ne soient plus électrifiées, et que les vendangeurs puissent avoir accès à de l’eau potable sans avoir à utiliser des bouteilles en plastique. Allons encore plus loin : souhaitons que les viticulteurs puissent héberger les vendangeurs sous tentes directement sur leurs terrains. Cela éviterait de nombreux tracas à tous, et permettrait à l’État de réaliser des économies. Cela serait certainement au grand bonheur des contribuables, nous n’en doutons pas.









