Dans un communiqué de presse conjoint, l’Association AntiBruit de Voisinage (AAbV) et la CLCV ont exprimé leur vive préoccupation à l’égard d’une récente proposition de loi adoptée par le Sénat, la qualifiant de menace pour les droits des victimes de nuisances sonores de voisinage. Cette proposition de loi, intitulée « adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels », a suscité une réaction ferme de la part de ces associations qui estiment qu’elle ne fera qu’aggraver les problèmes existants.
Le texte de la proposition de loi, adopté dans la discrétion, vise à restreindre considérablement la capacité des magistrats à traiter les troubles de voisinage liés aux activités professionnelles émettant des bruits dérangeants. En prétendant simplifier les recours pour nuisances anormales de voisinage, la proposition de loi introduit en réalité des dispositions qui risquent d’entraver la protection des victimes.
Lors d’une audition au Sénat, l’AAbV et la CLCV ont émis des critiques sévères à l’égard de cette proposition de loi, mettant en avant plusieurs points de contestation :
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Redondance avec la législation existante : Les associations soulignent que les clauses exonératoires de responsabilité sont déjà couvertes par diverses réglementations, telles que le code de la Construction et de l’Habitation de 2011 et le Code de la Santé publique, ainsi que par la loi du 29 janvier 2021 visant à protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises.
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Rigidification de la notion d’antériorité : La proposition de loi cherche à systématiser et à rigidifier la question de l’antériorité des activités, alors que la jurisprudence actuelle tient déjà compte des situations particulières.
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Introduction d’inégalités entre les personnes : Les modalités d’installation des individus et les dates associées à ces installations peuvent créer des inégalités injustes.
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Contradiction avec les préoccupations de santé et d’environnement : La proposition de loi va à l’encontre des préoccupations de prévention sanitaire et environnementale, ainsi que des enjeux économiques associés à ces problématiques.
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Complexification des procédures : Plutôt que de simplifier les recours, la proposition de loi risque de complexifier davantage les procédures judiciaires, avec des questions émergentes sur la datation, la mesure et l’évaluation des nuisances.
L’AAbV et la CLCV rappellent également l’avis du Conseil d’État sur une proposition similaire datant de janvier 2020, soulignant que le droit actuel offre déjà une protection équilibrée des intérêts en présence, et qu’il n’est donc pas nécessaire de modifier profondément les équilibres existants.
Les associations insistent sur le fait qu’une telle réforme risque de conduire à des situations conflictuelles plus intenses, à un engorgement des tribunaux et à une régression des droits des justiciables.
De plus, cette proposition de loi va à l’encontre des orientations du 4ème Plan National de Santé-Environnement (2021-2025), qui met l’accent sur la réduction des expositions environnementales nuisibles à la santé humaine et aux écosystèmes.
L’AAbV et la CLCV appellent à l’abandon de la proposition de loi et au maintien de la réglementation actuelle pour garantir une protection effective des victimes de troubles de voisinage.