L’ancien bâtiment qui abritait le siège de la Carsat (Caisse d’assurance de retraite et de santé de Bourgogne Franche-Comté), situé dans la zone d’activité Cap Nord à Saint-Apollinaire, est aujourd’hui au cœur d’une polémique marquée par des risques sanitaires et juridiques. Ce vaste bâtiment de 22 000 mètres carrés contient de l’amiante, un matériau très utilisé comme protection anti-incendie dans les années 1980. Bien que confiné, ce matériau nécessite une prise en charge très particulière lors de toute opération de déconstruction.
Pour rappel, nos confrères de France 3 Bourgogne avaient, en février 2015, réalisé un reportage sur le sujet, intégré sous le titre : « Amiante : La Carsat de Dijon va déménager dans de nouveaux locaux ».
Effectivement, depuis environ trois semaines, des gens du voyage se sont installés sur l’ancien site de la Carsat situé en zone Cap Nord, à côté des bâtiments aujourd’hui laissés à l’abandon. Plus d’une cinquantaine de caravanes occupent le terrain et, selon les occupants, ils auraient reçu l’accord du propriétaire pour démonter le matériel encore présent dans le bâtiment – fenêtres, câbles électriques et autres matériaux de valeur. « Le propriétaire nous a donné son accord pour qu’on prenne un maximum de matériaux« , affirme un des voyageurs interrogés. Lorsqu’on leur demande s’ils sont conscients de la présence d’amiante, ils confirment : « Oui, on nous l’a dit, mais personne ne nous empêche de démonter ». Un constat qui inquiète. Car, sur place aujourd’hui, tout se déroule sans aucune précaution ni suivi réglementaire.
Entre alertes et inaction des autorités
Contactée, la mairie de Saint-Apollinaire affirme avoir envoyé un courrier à Thierry Coursin, le propriétaire du site, il y a une quinzaine de jours. « Effectivement, des chefs d’entreprise nous ont alertés. Nous avons saisi le propriétaire et envoyé un premier puis un deuxième courrier. Mais nous ne pouvons pas intervenir », indique une interlocutrice de la mairie. Selon elle, la municipalité a demandé que le propriétaire fasse cesser le démontage par les gens du voyage au regard des risques liés à l’amiante. La préfecture, la métropole de Dijon ainsi que la gendarmerie ont également été informées.
Du côté de l’Association Cap Nord, Rémi Jean, président de l’association, se dit lui aussi impuissant : « Jai levé des alertes depuis bien longtemps. J’ai contacté le maire, j’ai fait tout ce qu’il était possible de faire pour que les autorités compétentes agissent face aux risques sanitaires« . Il ajoute, visiblement démuni : « Il faut faire quelque chose, j’alerte et personnes ne réagit ».
Aujourd’hui, l’inquiétude grandit au sein de la zone d’activité Cap Nord, qui abrite près de 500 entreprises et quelque 10 000 salariés. La question du risque de contamination est sur toutes les lèvres. Parmi les élus, seul Emmanuel Bichot, du groupe Agir pour Dijon, s’est inquiété publiquement de la situation sur les réseaux sociaux : « Le démontage illégal de l’ancien siège de la Carsat en zone Cap Nord à Dijon Métropole est un scandale. C’est une bombe à retardement bourrée d’amiante. Nous demandons aux pouvoirs publics de réagir face au danger sanitaire et sécuritaire », déclare le président du Groupe Agir pour Dijon.
Contacté par nos soins, il nous indique avoir été alerté par des chefs d’entreprise qui se disent scandalisés par la situation et très inquiets. Emmanuel Bichot précise avoir saisi le préfet de la Côte-d’Or pour obtenir une réaction des pouvoirs publics.
Un bâtiment laissé à l’abandon
Depuis le départ de la Carsat en 2016 vers ses nouveaux locaux, le bâtiment n’a jamais été reloué. Plusieurs tags se trouvent à l’intérieur du bâtiment, ce qui signifie qu’il a déjà été squatté. Ce bâtiment est-il surveillé par une société de sécurité privée ? La question reste posée. Une chose est certaine : plusieurs personnes sont entrées dans ce bâtiment, et ce bien avant l’installation des gens du voyage. Que prévoit de faire le propriétaire de ce bâtiment ? Là aussi, la question reste sans réponse. Ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui des mesures doivent absolument être prises pour éviter toute intrusion dans le bâtiment et ses annexes. Que se passerait-il en cas d’incendie ? Nous avons tenté, à plusieurs reprises, de joindre le propriétaire du bâtiment en contactant la société L.C.D.P ainsi que la société Est Métropole dite (SEM), sans succès : à chaque fois, nous sommes tombés sur un répondeur.
Des questions sans réponses
Plusieurs questions demeurent sans réponse. Le propriétaire, Thierry Coursin, a-t-il vraiment donné son accord aux gens du voyage pour démonter des éléments du bâtiment ? A-t-il déposé plainte ? Pourquoi les autorités publiques restent-elles inactives face à une situation manifestement dangereuse ? Et surtout, quelles mesures vont être prises pour prévenir un potentiel risque sanitaire majeur ?
Ce qui est clair, c’est que le danger est réel et que la gestion de l’amiante requiert des précautions particulières. Comment se fait-il qu’une entreprise du bâtiment soit soumise à une réglementation stricte, alors que sur ce site, aucune mesure de sécurité ne semble appliquée ? Ce sentiment d’impunité, dans une métropole comme Dijon, a de quoi choquer. Aujourd’hui, un bâtiment amianté est en cours de démontage dans l’illégalité la plus totale – et les autorités demeurent passives. Un scandale qui, malheureusement, semble voué à empirer.
Photos prises le 27 novembre 2024