Alors que le Sénat s’apprête à examiner la Loi d’Orientation Agricole (LOA) à partir du 4 février 2025, 38 associations de protection des animaux et de la nature dénoncent une régression environnementale inédite depuis 35 ans. En cause, l’article 13 du projet de loi, qui réduit drastiquement les sanctions en cas de destruction d’espèces protégées.
Les associations tirent la sonnette d’alarme : cette modification législative pourrait entraîner une quasi-impunité pour les destructions accidentelles d’animaux et de plantes protégés, remettant en question des décennies de protection environnementale.
Un « séisme juridique » qui affaiblit la protection des espèces protégées
L’article 13 de la LOA prévoit que seules les atteintes intentionnelles ou résultant d’une « négligence grave » seront passibles de poursuites pénales.
Or, dans la grande majorité des cas, la destruction d’espèces protégées n’est ni intentionnelle ni volontaire, mais résulte d’imprudences ou de négligences simples, qui sont actuellement sanctionnées par la loi. Avec cette nouvelle disposition, ces infractions ne seraient plus poursuivies pénalement, mais seulement punies d’une amende administrative de 450 euros maximum, infligée par les préfets, dont l’autorité est directement liée aux décisions gouvernementales.
Les associations alertent sur les conséquences de cette réforme :
- Un frein aux poursuites judiciaires : L’intentionnalité est très difficile à prouver en droit. Un procureur, sachant que les chances de condamnation sont faibles, pourrait renoncer à engager des poursuites.
- Une impunité généralisée pour les destructions accidentelles : Une commune, un agriculteur, un promoteur immobilier ou un particulier ayant causé des dégâts environnementaux pourraient échapper aux sanctions pénales en invoquant l’absence d’intention de nuire.
- Un affaiblissement de la protection environnementale : L’article 13 remet en cause le Code rural de 1989, qui avait posé les bases de la protection des espèces menacées en France.
Destruction d’espèces protégées : qui sera concerné ?
Avec cette réforme, de nombreuses situations aujourd’hui sanctionnées ne le seraient plus, car la destruction accidentelle ne serait plus considérée comme un délit.
🔹 Dans l’agriculture : Un agriculteur détruisant des haies abritant des oiseaux protégés, utilisant des pesticides mortels pour la faune, procédant à un épandage de lisier ou à un écobuage non contrôlé ne pourra être poursuivi qu’en cas de négligence grave, ce qui est extrêmement difficile à prouver.
🔹 Dans la gestion forestière : Un exploitant pourra abattre des arbres à cavités contenant des espèces protégées, tant que cela respecte son plan de gestion forestier, sans risquer de sanction pénale.
🔹 Dans la chasse et l’aménagement du territoire :
- Un chasseur tuant un animal protégé par erreur pourra invoquer l’absence d’intention.
- Un promoteur immobilier rase une zone naturelle abritant des espèces protégées, mais sans en être conscient, et ne pourra être poursuivi.
- Une commune coupant des arbres en période de nidification ou dont une station d’épuration fuit ne sera pas sanctionnée, si elle plaide la bonne foi.
🔹 Chez les particuliers :
- L’épandage de produits phytosanitaires détruisant toute la petite faune autour d’une habitation ne serait plus poursuivi en justice.
- Un particulier détruisant un nid d’hirondelles ou une ruche d’abeilles sauvages ne pourra être inquiété, à moins de prouver une intention volontaire.
En clair, les petites infractions environnementales, qui cumulées ont un impact massif sur la biodiversité, ne seront plus répréhensibles.
Un recul de 35 ans dans la protection des espèces protégées
La suppression des sanctions pénales en cas de destruction d’espèces protégées marque un retour en arrière historique. Depuis 1989, le Code rural permettait de condamner ces atteintes à la biodiversité, même lorsqu’elles résultaient d’une négligence ou d’une imprudence.
Avec cette loi, les infractions environnementales seront désormais traitées comme de simples contraventions administratives. Or, ces décisions seront prises par les préfets, qui peuvent être influencés par des intérêts politiques ou économiques locaux.
Les associations dénoncent un texte qui favorise les industriels, les promoteurs et les grands exploitants agricoles, au détriment de la nature et de la faune sauvage.
Une mobilisation forte pour faire reculer le gouvernement
Face à cette régression environnementale, 38 associations se mobilisent et ont lancé une pétition en ligne pour alerter l’opinion publique. Cette pétition, intitulée « Destruction d’espèces protégées : une impunité offerte par la loi », compte déjà près de 40 000 signatures.
🔗 Voir la pétition :
Destruction d’espèces protégées : une impunité offerte par la loi
Les signataires de cette pétition incluent de grandes associations de protection de la nature, telles que Sea Shepherd France, One Voice, ASPAS, Bretagne Vivante, France Nature Environnement, et Animal Cross.
Elles demandent au Sénat de rejeter cet article 13 et de maintenir les protections juridiques actuelles.
Un combat crucial pour l’avenir de la biodiversité
Alors que la France perd chaque année des milliers d’espèces animales et végétales, cette réforme affaiblit encore davantage les efforts de préservation de la biodiversité. Sans sanction efficace, la destruction des espèces protégées deviendra un simple « accident », banalisé et impuni.
Les associations appellent les citoyens à se mobiliser massivement, afin d’empêcher cette régression écologique sans précédent. Le débat est désormais entre les mains des sénateurs. La question est simple : vont-ils sacrifier 35 ans de protection environnementale pour répondre à des intérêts économiques ?
Réponse à partir du 4 février 2025.