La tension était palpable à Chenôve depuis plusieurs mois face au nouveau plan de circulation mis en place par la municipalité. Ce mécontentement s’est concrétisé dans les urnes ce samedi 15 mars, lors d’un référendum local qui a permis aux habitants de s’exprimer sur le maintien ou la suppression de ce dispositif expérimental.
Le verdict est sans appel : 81,74 % des votants ont choisi de dire « OUI » à la suppression du plan de circulation, contre seulement 18,26 % en faveur de son maintien. Le taux de participation, bien qu’en deçà des scrutins électoraux classiques, atteint tout de même 24,02 % des inscrits, avec un total de 1 763 suffrages exprimés.
Une décision municipale respectée
À l’issue du scrutin, la municipalité a immédiatement pris acte du résultat et s’est engagée à respecter le choix des citoyens. Dans un communiqué officiel, la mairie a déclaré : « Fidèle à son engagement de consultation et d’écoute des citoyens, la municipalité respectera ce choix et engagera les démarches nécessaires avec la Métropole pour mettre en œuvre cette décision citoyenne. Ce référendum d’initiative locale était une expérimentation, une démarche inédite, très rarement mise en place par une commune, afin de donner la parole directement aux citoyens sur un sujet structurant. »
Thierry Falconnet, maire de Chenôve, a insisté sur la nécessité de tirer les enseignements de cette consultation populaire : « Nous allons concerter de nouveau les habitants et les commerçants de chaque quartier de notre ville pour échanger et décider avec eux des aménagements à mettre en place. Nos priorités en matière de santé publique, de sécurité des usagers et de lutte contre le réchauffement climatique ne doivent en aucun cas être remises en cause. Agir en ce sens reste l’objectif numéro un de la municipalité. »
La mairie a également tenu à saluer la mobilisation des citoyens et l’implication des services municipaux, des élus et des agents ayant permis le bon déroulement de cette consultation.
Un rejet porté par la population et l’opposition
Si la majorité municipale affirme vouloir continuer à travailler sur les enjeux de mobilité, l’opposition municipale, menée par Philippe Neyraud et Christophe Guillet du groupe « Bon Sens à Chenôve », voit dans ce résultat une victoire de la volonté populaire contre une politique imposée sans concertation suffisante.
Philippe Neyraud a réagi en ces termes : « Le résultat de ce référendum est clair et sans appel. Ce sont près de 82 % des voix qui se sont prononcées pour la suppression du nouveau plan de circulation et plus spécifiquement pour la réouverture du tronçon de la rue Maxime Guillot, partie intégrante de la route des Grands Crus.
C’est avant tout une victoire citoyenne, même si nous étions opposés dès l’origine à ce que nous appelons un mauvais plan précipité et mal pensé. En écho avec nos concitoyens, nous avons fait campagne en faveur de la suppression du plan de circulation, puisque la question posée était dans ce sens, sans nuance. Nous sommes satisfaits d’avoir anticipé et accompagné cette aspiration générale qui s’est traduite dans les urnes par le résultat que l’on connaît. Nous regrettons qu’il n’y ait pas eu de consultation en amont de ce bouleversement important impactant non seulement les Cheneveliers mais aussi tout le sud dijonnais.
Cela aurait permis d’éviter le gaspillage des deniers publics (travaux et référendum) ainsi que des tensions entre habitants : certains se sentant lésés par rapport à d’autres perçus comme privilégiés. Hélas, la majorité municipale est coutumière de ce genre de passage en force de projets décidés par une petite poignée autocratique.
Nous regrettons également la surpolitisation permanente qui n’a pas lieu d’être dans une ville comme la nôtre. La majeure partie de l’action municipale se résume essentiellement à la gestion de notre quotidien et aux grands investissements pluriannuels. Pour nous, seul compte l’intérêt général, l’intérêt des Cheneveliers. Une petite pensée pour nos commerçants de l’axe Maxime Guillot qui peuvent de nouveau envisager plus sereinement leur avenir ».
D’autres interrogations demeurent, notamment sur le cas du Vieux Bourg, où le plan de circulation semble avoir été mieux accepté par une partie des habitants : « vous avez raison, mais il n’en demeure pas moins que 74 % des électeurs du Vieux-Bourg se sont prononcés pour le retrait du plan de circulation. Ce sont les limites du référendum où il faut répondre sans nuances par OUI ou NON.
Comme nous l’avions mentionné lors du vote de la délibération sur le référendum, le nouveau plan de circulation n’était pas annexé. Des modifications et des améliorations ont donc pu avoir lieu en catimini afin de juguler les protestations. Un sens de circulation a été modifié et des aménagements ont permis de faciliter le passage du camion poubelle.
Ainsi, le plan de circulation sur le Vieux-Bourg, avant le référendum, est devenu globalement satisfaisant. D’où un rejet plus faible. Notons toutefois deux problèmes potentiels à venir :
- Une partie du parking Changenet va disparaître (construction), l’offre de stationnement va donc diminuer fortement ;
- La sortie de garage du nouveau bâtiment boulevard Branly, au niveau du feu, sera source de sérieux problèmes.
Ces situations ne semblent pas avoir été anticipées. Quant à la com de Monsieur Falconnet vantant son référendum, il ne faut pas oublier qu’une pétition de près de 3000 signatures existait bien avant qu’il ne décide de consulter la population. C’est donc une consultation contrainte et stratégique pour tenter une sortie par le haut du « bourbier » dans lequel il s’est mis. Le résultat du référendum est là, il vient confirmer la pétition tant méprisée et minimisée » diront Philippe Neyraud et Christophe Guillet à propos du Vieux Bourg.
Une défaite politique pour la municipalité ?
Ce résultat constitue-t-il une défaite politique pour Thierry Falconnet et sa majorité ? Si le maire tente de relativiser ce revers en mettant en avant l’expérimentation démocratique inédite que représente ce référendum, il n’en reste pas moins un désaveu cinglant de sa politique de circulation.
L’objectif du plan de circulation était d’améliorer la qualité de vie en réduisant la place de la voiture en ville afin de limiter les émissions de gaz à effet de serre, la pollution sonore et les embouteillages. Cependant, l’absence d’adhésion populaire et la contestation grandissante ont eu raison du dispositif.
Un habitant a, selon nous, fait une bonne analyse de la situation : « Le vrai défi pour les élus n’est plus seulement de convaincre du bien-fondé de la réduction de la place de la voiture, mais bien de créer des conditions acceptables pour que cette transition se fasse avec l’adhésion de la population. Ici, la mairie n’a pas réussi à créer ces conditions. »
Selon cette lecture, le vote de samedi marque non seulement une défaite pour la municipalité, mais aussi un revers pour les ambitions environnementales portées par le plan de circulation. Une transition écologique réussie nécessite un travail approfondi de pédagogie et de concertation, qui semble avoir fait défaut dans cette expérimentation.
Une expérience démocratique à souligner
Malgré ce résultat défavorable, une leçon majeure ressort de ce référendum : à Chenôve, la démocratie locale reste une réalité concrète. Rien n’obligeait le maire à organiser cette consultation citoyenne, et pourtant, il a fait le choix de donner la parole aux habitants et d’accepter le verdict des urnes.
Dans un paysage politique où les élus sont souvent accusés de passer outre l’avis de la population, cette démarche mérite d’être saluée. Peu de maires auraient accepté d’engager un tel processus et d’assumer une défaite aussi nette.
La suite dépendra des discussions à venir entre la municipalité, la Métropole et les habitants. L’enjeu désormais pour la mairie est de trouver une nouvelle solution de circulation qui puisse à la fois répondre aux attentes des citoyens et aux impératifs de transition écologique et de sécurité urbaine.
Le débat sur la mobilité urbaine à Chenôve est donc loin d’être clos, du moins jusqu’aux prochaines élections municipales.
