Installé au cœur de Dijon, le restaurant La Closerie, rattaché à la Maison Philippe Le Bon, nous avait conviés à découvrir sa nouvelle carte à travers une invitation presse. Nous avons décliné. Par respect de notre indépendance critique, nous avons préféré nous rendre sur place anonymement, comme de simples clients. Voici le compte rendu d’une expérience culinaire payée – et pleinement assumée.
Une invitation, un principe, un refus
Le 4 mars 2025, La Closerie nous adresse une invitation : un repas offert, la découverte d’une nouvelle carte, un cadre rénové, et en retour, l’espoir non formulé mais bien compris d’un article élogieux. C’est un classique du milieu gastronomique. Et c’est aussi ce que nous avons choisi de ne pas accepter.
Nous avions publié un premier papier : « La Closerie : un repas offert pour un bel article ? Non merci. » Puis, comme annoncé, nous sommes allés dîner à La Closerie, à deux, sans prévenir. C’était le soir du 7 mai 2025. Addition finale : 194 €. Payée intégralement par nos soins. Aucun traitement de faveur. Voici notre compte-rendu, plat par plat, service compris.

Un écrin historique pour une cuisine actuelle
Située rue Sainte-Anne, La Closerie s’intègre au sein de la Maison Philippe Le Bon, hôtel de charme qui mêle architecture bourguignonne et modernité discrète. Le restaurant en reprend les codes : pierres apparentes, mobilier sobre, tonalités boisées, lumière douce. L’ensemble respire l’élégance maîtrisée, sans excès.
Le service est professionnel, attentif, mais jamais intrusif. De l’accueil au départ, tout est fluide. Le personnel sait présenter les plats, orienter les choix sans forcer. Aucun surjeu, aucune fausse note. Nous sommes venus incognito, nous avons été traités comme des clients ordinaires – ce qui, dans ce cas, est un compliment.
Une carte courte, bien pensée, entre Bourgogne et inspirations du monde
La Closerie revendique une cuisine ancrée dans le terroir, mettant en valeur des produits locaux, tout en s’ouvrant à des influences plus larges. Les classiques bourguignons (bœuf, volaille Gaston Gérard) côtoient des entrées plus audacieuses (tiradito, nougat de foie gras), des desserts modernes, ainsi qu’une entrée et un plat végétariens – encore trop rares dans les établissements. Le restaurant propose également un menu enfant (jusqu’à 12 ans), signe d’une volonté d’ouverture à tous les publics. Deux formules sont proposées : la première à 15 € (entrée + plat ou plat + dessert), la seconde à 18 € (entrée + plat + dessert).
Avec 4 entrées, 5 plats et 3 desserts à la carte, certains pourraient trouver l’offre légère – mais ce n’est absolument pas notre avis. De plus, un menu bourguignon est proposé, avec des classiques tels que les œufs en meurette, les escargots de Bourgogne, le bœuf bourguignon accompagné de sa purée et de ses carottes glacées, ou encore le suprême de volaille Prince de Bourgogne, nappé d’une sauce Gaston Gérard. Notre conclusion : il y a largement de quoi satisfaire toutes les papilles !
À la carte : parcours d’un gourmet omnivore
Oui, quand le rédacteur en chef de Dijon Actualités dit : « On teste », il teste. Il prendra trois entrées, un plat et deux desserts. Ne nous demandez pas où il a mis tout ça, nous ne serons pas en mesure de vous répondre ! Il est à noter — vous ne le saviez peut-être pas — que celui-ci a passé plus de dix ans derrière les fourneaux. Alors la cuisine, il connaît quand même un peu !
Entrée 1 : Nougat de foie gras de canard
Servi avec ses pignons de pin et ses amandes, glacé d’une gelée au porto rouge, accompagné d’une brioche feuilletée, ce foie gras fut à la hauteur de ses attentes : « Un grand classique revisité sans effets inutiles. Une texture maîtrisée, une température juste, les arômes se révèlent en bouche. Un foie gras traité avec respect, ni travesti, ni figé. J’adore. »

Le choix d’un bon pain est déterminant pour la réussite de la dégustation. Ici, la brioche feuilletée n’a pas convaincu : son goût nous a laissés de marbre, il faut le dire. À 18 euros l’entrée, certains trouveront cela cher, mais une fois le foie gras de canard en bouche, on comprend que le prix est totalement justifié !
Entrée 2 : Carpaccio de bœuf
« Pesto, copeaux de parmesan & câpres, roquette » : voilà comment le restaurant présente son carpaccio de bœuf sur la carte. Pour les amateurs de viande, ce qui compte dans un carpaccio de bœuf, c’est avant tout le goût de la viande !
« La viande est de qualité, finement tranchée, l’assaisonnement est discret mais efficace : un filet d’huile, quelques copeaux… Un classique parfaitement exécuté, qui laisse parler le produit. »

Le seul petit regret de notre amateur de carpaccio de bœuf : « Les petits poivrons apportent une touche agréable à l’assiette, mais il y en a un peu trop à mon goût. » Le carpaccio de bœuf a un avantage : il permet de retrouver le goût originel des aliments — il ne faut pas l’oublier !
Entrée 3 : Tiradito de truite, patate douce
La surprise de la soirée. Truite crue du Jura, tranchée en finesse, marinée dans un jus citronné. L’association est originale, audacieuse, et fonctionnelle. Une parenthèse japono-latine dans un repas très français, et un vrai moment de grâce.
« Les amateurs de truite crue comprendront, en regardant la photo de l’assiette, ce que j’ai ressenti dès le premier coup de fourchette : un vrai délice. Issue des eaux pures et fraîches du Jura, cette truite se distingue par sa finesse, sa texture fondante et sa saveur délicatement iodée. C’est léger, bon, savoureux… un véritable coup de cœur ! ».

Plat : Filet de bœuf Charolais 100 % Côte-d’Or
En Côte-d’Or, nous avons des produits vraiment magnifiques, et ce filet de bœuf Charolais 100 % Côte-d’Or en est la preuve ! « Viande saignante (comme demandée), tendre, juteuse, accompagnée d’une sauce au poivre vert du Kerala, dense, presque suave. Servie avec des frites maison, bien dorées et croustillantes. À 32 €, ce plat représente à merveille la Bourgogne carnée. Un hommage à la race charolaise et à une cuisson parfaitement maîtrisée. »
Desserts partagés
Comment ne pas finir un repas avec un (ou deux) desserts ? Notre amateur de cuisine a choisi d’en prendre deux.
Un soufflé au chocolat, cœur coulant : « Belle maîtrise technique, ganache dense, vanille brûlée, sablé croquant. Un dessert de grand restaurant. » Et une tartelette kiwi-pamplemousse : « Fraîcheur, amertume, acidité maîtrisée. Une très jolie conclusion fruitée. »
À 10 euros chacun, il aurait été dommage de s’en priver !
Menu La Closerie – 75 € (entrée, plat, fromages, dessert + 2 verres de vin)
Testé par notre collaboratrice végétarienne, encore trop souvent oubliée des restaurateurs, qui plus est lorsqu’ils affichent des ambitions gastronomiques. Ici point de frustration. Les options végétariennes sont aussi travaillées et réfléchies que leurs homologues carnées.
Entrée : Déclinaison d’asperges
Panacotta légère, asperges vertes poêlées, blanches croquantes, huile d’aneth et crémeux végétal : une assiette fraîche, équilibrée, à la fois technique et lisible. Panacotta aérienne, asperges sous diverses formes, qui se marient parfaitement à l’huile d’aneth, raffinement des saveurs… La saison est respectée, la finesse est là. Une belle entrée en matière.

Plat : Falafels, houmous de betteraves, pickles, betteraves Chioggia
L’assiette est colorée, le houmous soyeux, les falafels délicatement parfumés, les légumes sous la forme de pickles viennent contrebalancer, par leur côté acidulé, la douceur de la betterave… C’est une proposition végétarienne aboutie, nourrissante, pleine de goût, mais jamais lourde.
Fromages affinés
Trois pièces de la région servies à température idéale. Dans l’assiette, savoureux morceaux de comté, brillat-savarin et époisse : un assortiment qui parle pour lui-même, relevé d’une surprenante mais non moins délicieuse confiture de café.
Dessert : Cheesecake fraise-rhubarbe
Visuellement net, gustativement réussi. Dôme de cream cheese, insert de rhubarbe confite, fraises fraîches et sablé au beurre : un équilibre précis entre douceur, acidité et croquant. Un dessert moderne qui ne tombe pas dans le cliché sucré.
En conclusion, le menu à 75€ est une option plus qu’intéressante pour qui souhaiterait découvrir des mets de choix sans y passer un salaire. Les vins proposés par le sommelier, qui a parfaitement su s’adapter au menu et aux goûts de notre collaboratrice, ont fait mouche. Un Givry Les Bois Ronds 2022 Felix Hellix – option issue de l’agriculture biologique, ce que l’on a su apprécier – puis un Rully Meix de Pelleray 2023, domaine Duvernay ont terminé de faire de ce repas une expérience culinaire de grande qualité pour un budget qui reste raisonnable au regard du travail fourni en cuisine.
Pas besoin de presse gratuite, la cuisine suffit
En ressortant de La Closerie, la sensation est limpide : tout est à sa place. L’accueil, la qualité des produits, le rythme du service, la précision dans l’assiette. Le choix de ne pas accepter le repas offert fut le bon. Cela nous a permis de vivre l’expérience pleinement, sans filtre, sans attente biaisée.
La Closerie invite à vivre une expérience culinaire unique – et force est de constater que la promesse est tenue. Nul besoin d’inviter la presse ou de leur offrir un repas en espérant une bonne publicité. Avec un tel amour de la cuisine, qui se lit dans chaque assiette, le bouche-à-oreille sera la meilleure des publicités pour ce restaurant.
Le prix payé (194 € à deux, avec vins et extra) est largement justifié par le niveau de cuisine, l’engagement produit, et le confort de l’expérience. La Closerie n’a pas besoin d’acheter des plumes. Ses assiettes parlent pour elle.









