La Bourgogne-Franche-Comté enregistre en 2024 son plus faible nombre de naissances depuis un demi-siècle. Avec 22 500 bébés nés cette année, la région connaît une baisse de natalité particulièrement marquée, plus accentuée que dans la plupart des régions françaises. Cette tendance s’inscrit dans un mouvement de fond démographique amorcé au début des années 2000, mais qui s’intensifie ces dernières années, en lien avec le vieillissement de la population, la baisse du nombre de femmes en âge de procréer, et une fécondité en net recul.
Un déclin plus marqué qu’ailleurs
La chute du nombre de naissances en Bourgogne-Franche-Comté est préoccupante par son ampleur. En 25 ans, la région a vu son nombre de naissances reculer de 31,8 %, contre 18,8 % en moyenne en France métropolitaine. En comparaison avec le début des années 2000, ce sont près de 10 000 naissances par an en moins.
Tous les départements sont concernés, mais le Jura, la Haute-Saône, la Nièvre et le Territoire de Belfort se distinguent par une baisse dépassant parfois les 40 %. Ces territoires, marqués par un vieillissement accéléré de la population et une attractivité limitée pour les jeunes générations, figurent désormais parmi les dix départements métropolitains les plus touchés par la baisse de la natalité.
Moins de mères, moins de naissances
L’une des raisons majeures de cette chute de la natalité réside dans la diminution du nombre de femmes en âge d’avoir des enfants (15 à 49 ans). En 2000, la région comptait 642 000 femmes dans cette tranche d’âge ; elles ne sont plus que 542 000 en 2024, soit une baisse de 16 %. À titre de comparaison, ce recul n’est que de 3 % en France métropolitaine.
Ce phénomène est le résultat d’une dynamique enclenchée dans les années 1990 : après la crise économique de 1993, la fécondité avait déjà commencé à baisser, générant des générations creuses. Trente ans plus tard, cela se traduit mécaniquement par une moindre population féminine en âge de procréer.
La région paie également son déficit d’attractivité pour les jeunes : les départs sont plus nombreux que les arrivées, surtout dans les zones rurales ou anciennement industrielles.
La fécondité recule à tous les âges
En plus du recul du nombre de femmes susceptibles d’avoir des enfants, leur propension à avoir des enfants diminue également. En 2024, l’indicateur conjoncturel de fécondité en Bourgogne-Franche-Comté est tombé à 1,53 enfant par femme, contre 1,59 au niveau national, et 2,00 dans la région en 2009.
Ce déclin concerne désormais toutes les classes d’âge, y compris les femmes de 25 à 34 ans, traditionnellement les plus fécondes. Pour cette tranche, le taux est passé de 1,31 enfant par femme en 2009 à 1,00 en 2024. La tendance est donc nette : les femmes ont moins d’enfants, plus tard, voire pas du tout.
Autre évolution marquante : la baisse concerne surtout les premières naissances, qui ont diminué de 38 % en 25 ans. En Haute-Saône, ce chiffre atteint 50 %. Les deuxièmes naissances résistent un peu mieux (−19 %), sauf dans le Jura et la Côte-d’Or où elles se stabilisent. Fait nouveau, dans des départements comme la Côte-d’Or et le Doubs, les deuxièmes naissances sont devenues plus fréquentes que les premières.
Pourquoi les femmes font-elles moins d’enfants ?
Les raisons de cette baisse de la fécondité sont multiples et souvent imbriquées :
- Des parcours de vie plus complexes : les couples se forment plus tard, les ruptures sont plus fréquentes, rendant les projets familiaux plus incertains.
- Un allongement des études, qui retarde l’entrée dans la vie active, et donc le moment de fonder une famille.
- Des difficultés économiques, du logement à l’emploi, qui peuvent freiner ou dissuader les projets parentaux.
- Des incertitudes sur l’avenir (climat, instabilité sociale, etc.) qui poussent de plus en plus de jeunes à remettre en question le projet d’avoir des enfants.
Des contrastes territoriaux marqués
Si la baisse de la natalité est générale, la fécondité varie fortement selon les territoires. Elle est plus élevée dans les zones périurbaines dynamiques, dans la bande frontalière avec la Suisse, ou dans des secteurs en développement comme le Sénonais et le Mâconnais.
Dans ces zones, la présence d’emplois attractifs, la qualité de vie, et la relative accessibilité au logement favorisent l’installation de jeunes couples et donc les naissances.
À l’inverse, au cœur des grandes villes comme Dijon ou Besançon, la fécondité est plus faible, surtout chez les jeunes femmes. En cause : une plus forte présence d’étudiantes et de jeunes actives qui retardent, voire évitent, la maternité. Cependant, dans ces zones urbaines, la fécondité des femmes plus âgées (35-49 ans) reste relativement élevée, ce qui atténue partiellement la baisse globale.
Un enjeu démographique et territorial majeur
La situation démographique de la Bourgogne-Franche-Comté soulève des défis importants pour les années à venir : maintien des services publics, attractivité économique, renouvellement des générations, dynamisation des territoires ruraux… Autant de chantiers qui nécessitent une vision à long terme, intégrant à la fois des politiques sociales, éducatives, économiques et territoriales pour redonner confiance aux jeunes adultes dans leur avenir familial.