C’est devant une salle comble que François Rebsamen, président de Dijon Métropole, a lancé, ce vendredi 6 juin 2025, à la salle Alain-Millot, la première réunion publique de concertation autour du projet de la future ligne de tramway T3. Environ 200 personnes ont participé à cette première rencontre. Un moment fort qui marque le début d’un long processus de dialogue avec les habitants, les élus et les parties prenantes du territoire. Retour sur une intervention riche en annonces, en chiffres, en perspectives… et en quelques piques bien senties.
Une nouvelle étape dans l’histoire des mobilités dijonnaises
Dès l’ouverture de la réunion, le président de la Métropole a salué la présence des élus et des nombreux citoyens venus témoigner de leur intérêt pour le projet. Aux côtés de François Rebsamen, plusieurs élus métropolitains, dont Thierry Falconnet (en charge des mobilités), la maire de Dijon, Nathalie Koenders, et Dominique Martin-Jean (aménagement de voirie), ont également été cités parmi les acteurs clés de cette nouvelle ambition. « Nous sommes fiers de ce que nous avons construit à Dijon. Notre réseau de transport public est reconnu parmi les meilleurs de France, et pourtant, il est aujourd’hui proche de la saturation », a-t-il martelé.
Une saturation à l’horizon 2030
François Rebsamen a insisté sur l’urgence d’agir. Depuis la crise sanitaire, le réseau Divia connaît une croissance continue de la fréquentation : +5 % par an en moyenne, avec une pointe à +9 % entre 2023 et 2024. « À certaines heures et sur certains tronçons, les rames sont pleines. On ne peut pas rester immobiles », a-t-il prévenu. Cette situation a conduit les élus métropolitains à voter, à une très large majorité (76 pour, 2 contre), l’ouverture d’une concertation préalable sur la création de la ligne T3. Une décision motivée par les résultats d’études techniques menées en 2024 sur une dizaine de scénarios.
Un tracé pensé pour le potentiel et la densité
Le projet de ligne T3 vise à desservir des zones à fort potentiel démographique et économique, avec un départ au sud de la métropole, sur le territoire de la commune de Chenôve. « Ce n’est pas un caprice territorial, mais une nécessité de desserte », a précisé le président de la Métropole. Il a évoqué notamment les 9 500 emplois privés présents dans le secteur du Club d’entreprises Grand Sud et le futur quartier des Grands Vergers, qui devrait accueillir à terme près de 10 000 habitants. Un parking-relais est aussi prévu à ce terminus, pour éviter les erreurs passées sur la ligne T2, faute de foncier disponible à l’époque. Des études complémentaires pourraient même envisager un prolongement vers Marsannay-la-Côte et Perrigny-lès-Dijon.

Un projet économiquement et écologiquement raisonné
Avec un coût estimé aujourd’hui à 30 millions d’euros par kilomètre de tramway, chaque tronçon doit répondre à une logique de rentabilité en matière de fréquentation. « Chaque station doit générer un trafic significatif. Une ligne de tram ne peut pas se permettre d’être moyenne », a martelé François Rebsamen. Il a également évoqué la réutilisation partielle de tracés existants, notamment sur le tronçon commun à la ligne T1, pour limiter les coûts tout en renforçant les dessertes vers l’Université, le CHU et le centre Georges-François Leclerc. Le tramway reste aussi un choix écologique fort. Zéro émission, réduction du bruit, amélioration de la qualité de l’air : « L’air de Dijon est le troisième plus pur de France », a-t-il rappelé avec fierté.
Des arbitrages assumés
Certaines communes, comme Chevigny-Saint-Sauveur ou Fontaine-d’Ouche, ne seront pas desservies par la T3. Le président a expliqué que le coût élevé pour une rentabilité faible ou des contraintes d’infrastructure rendaient ces extensions non viables. Des alternatives par bus, en site propre et à haute fréquence, sont à l’étude. Il n’a pas manqué de tacler les critiques : « Ceux qui votent contre sont toujours les mêmes, on les reconnaît facilement », a-t-il lancé avec ironie, tout en affirmant que « chacun cherche midi à sa porte, mais notre devoir est de penser à l’intérêt général ».
Un outil de transformation urbaine
Au-delà du transport, le tramway est vu comme un levier de transformation urbaine. Le président a rappelé les métamorphoses spectaculaires observées à Dijon depuis la réintroduction du tram en 2012 : la place Darcy, la rue de la Liberté ou l’avenue de Langres en sont les meilleurs exemples. La T3 doit prolonger cette dynamique, notamment avec des espaces végétalisés, une place accrue pour les vélos et la marche, et une réduction significative du trafic automobile.
Un échange riche avec les habitants
Après ce long discours introductif, la parole a été donnée au public. Une série de questions a permis de creuser les enjeux du projet, mais aussi de souligner certaines attentes spécifiques. Voici les échanges les plus significatifs.
Pourquoi certaines communes comme Chevigny-Saint-Sauveur ou Fontaine-d’Ouche ne sont-elles pas desservies ?
Une habitante de Chevigny-Saint-Sauveur a pris la parole : « Chevigny est une commune importante de la métropole, en pleine croissance démographique. Pourquoi ne pas prolonger la ligne depuis Quetigny ? On a l’impression d’être oubliés une fois de plus dans les projets structurants. »
François Rebsamen lui a répondu avec transparence : « Vous avez raison de poser cette question. Nous y avons réfléchi très sérieusement. Une extension de tram vers Chevigny a fait l’objet d’études techniques de faisabilité et d’opportunité. Les résultats ont été clairs : le coût serait d’environ 90 millions d’euros pour un potentiel de trafic très faible par rapport aux autres scénarios. Le temps de trajet serait trop long pour convaincre les usagers d’abandonner la voiture. Ce serait un tramway peu compétitif. »
Il a toutefois annoncé une alternative : « En accord avec le maire de Chevigny, nous allons lancer une étude pour créer un service de bus rapide, en site propre, avec une fréquence élevée et un tracé direct vers Dijon. Ce sera un réseau aussi attractif qu’un tram, mais plus souple et adapté. »
Une autre voix a relayé une inquiétude similaire : « Fontaine est souvent citée dans vos discours, mais elle n’a toujours pas de tram. Pourquoi ne pas y aller enfin ? »
La réponse du président a été sans appel : « Fontaine-d’Ouche, que j’aime beaucoup, a des besoins réels. Mais le tram ne peut pas serpenter à travers un quartier comme le fait un bus. Il ne peut pas faire des arrêts tous les 300 mètres. Il faut un axe direct et dense. À Fontaine, un bus performant dessert mieux les habitants, car il va au plus près des logements. C’est une question de logique de mobilité. »

La ligne T3 ne risque-t-elle pas de saturer encore plus le tronçon commun avec la T1 ?
Un habitant témoigne de son expérience quotidienne : « Entre 7h30 et 9h, les rames de la ligne T1 sont bondées. Il faut souvent attendre deux ou trois trams avant de pouvoir monter. Si l’on ajoute la ligne T3 sur le même tronçon, ne risque-t-on pas d’aggraver la situation ? »
François Rebsamen a tenu à rassurer : « C’est justement pour répondre à cette saturation que la T3 passera aussi par ce tronçon. Elle viendra renforcer la capacité sur ce segment stratégique. Le CHU, l’université, le centre Georges-François Leclerc… ce sont des lieux denses en flux, et nous devons renforcer leur desserte. En utilisant les voies existantes, on ajoute des trams sans reconstruire de rails. Cela optimise l’investissement et améliore le service. »
Il a conclu : « On ne surcharge pas, on partage. Et surtout, on double les chances d’avoir un tram disponible aux heures de pointe. »
Pourquoi un terminus au sud de Chenôve ? Est-ce pertinent ?
Une habitante s’est étonnée du choix du terminus : « Le centre-ville de Chenôve est déjà bien desservi par la ligne T2. Pourquoi créer une nouvelle ligne qui repasse par la commune ? »
Le président a répondu en posant le contexte : « Il ne s’agit pas d’un doublon. La T3 ne vise pas à refaire la T2. Elle se termine au sud de Chenôve, à la limite de Marsannay, sur la route de Beaune. Pourquoi là ? Parce que c’est un secteur stratégique. On y trouve la zone économique du Grand Sud, avec près de 9 500 emplois, et un projet d’urbanisation d’ampleur : les Grands Vergers du Sud. À terme, ce seront 9 000 à 10 000 habitants supplémentaires. »
Il a également souligné l’intérêt en termes de mobilité : « Ce site devient une vraie porte d’entrée dans la métropole. On y prévoit un parking-relais, ce qui avait manqué pour la T2. C’est un point d’intermodalité et de requalification urbaine. »
Quel est le coût du projet ? Est-il raisonnable dans le contexte actuel ?
Un habitant, se présentant comme contribuable inquiet, a demandé : « On parle de 30 millions d’euros du kilomètre. Est-ce qu’on peut vraiment se le permettre ? La situation économique n’est pas facile. »
François Rebsamen a assumé : « C’est vrai, c’est un investissement conséquent. Mais justement : c’est un investissement. Ne rien faire coûtera plus cher demain. Le réseau est proche de la saturation. Si on attend, les problèmes vont s’aggraver. Les embouteillages, la pollution, la perte de qualité de vie, le recul de l’attractivité… »
Il a rappelé l’approche économique du projet : « On optimise au maximum. Le tronçon commun nous permet d’économiser sur les infrastructures. On cible les zones à fort potentiel. On ne construit pas pour construire, mais pour répondre à une vraie demande. »
Quelles garanties sur l’environnement, le bruit et l’intégration urbaine ?
Une riveraine, visiblement soucieuse, a interrogé : « Est-ce qu’on va végétaliser les voies comme pour les premières lignes ? Et pendant les travaux, qu’est-ce qui est prévu pour limiter les nuisances sonores ? »
Christelle Tranchand, cheffe de projet tramway à Dijon Métropole, a répondu avec précision : « Oui, le projet T3 intégrera des bandes végétalisées sur les voies, comme pour T1 et T2, chaque fois que le contexte urbain le permet. C’est une priorité. C’est aussi un élément de fraîcheur urbaine, important face au changement climatique. »
Une concertation qui ne fait que commencer
Cette séquence de questions-réponses a montré la diversité des attentes et la nécessité d’une communication régulière, claire et pédagogique. François Rebsamen a insisté sur l’importance de ce dialogue dans les mois à venir : « Rien n’est figé. Vos remarques vont nourrir les ajustements. Nous irons dans les quartiers, les communes, partout où vous voudrez nous parler. La concertation ne se limite pas à une réunion. »
Site internet : https://concertationt3.dijon-metropole.fr/




