La concertation publique sur la future ligne T3 du tramway dijonnais, qui s’est déroulée du 2 juin au 1er août 2025, a pris fin il y a trois jours. Parmi les contributions les plus détaillées figure celle du groupe d’opposition Agir pour Dijon, emmené par Emmanuel Bichot, conseiller municipal et candidat déclaré aux élections municipales de mars 2026. Le ton est sans appel : le projet est jugé injustifié, coûteux et mal conçu, et sera stoppé immédiatement en cas de victoire électorale.
Un projet détourné de son objectif initial
Dans sa contribution transmise le 1er août, Agir pour Dijon revient d’abord sur l’origine du projet. Le groupe rappelle que l’étude votée en 2023 par le conseil métropolitain portait sur l’amélioration de la desserte de Chevigny-Saint-Sauveur et de l’avenue Roland Carraz. Or, selon eux, le projet actuel de T3 ne concerne même plus Chevigny-Saint-Sauveur, soulevant la question de la conformité de l’étude avec la délibération de départ.
En parallèle, le programme CAPATRAM, lancé en 2021 pour un coût de 15 millions d’euros afin d’augmenter la capacité des lignes existantes, est toujours en cours, avec d’importants travaux sur la ligne 1 durant tout l’été. Selon Agir pour Dijon, cela démontre une incohérence : pourquoi lancer une nouvelle ligne si l’extension de la capacité est censée suffire à éviter la saturation ?
Des critiques sur la méthode et la légalité
Le groupe dénonce aussi une concertation biaisée, affirmant que de nombreux participants n’ont pas pu s’exprimer lors des réunions publiques.
Plus fondamentalement, le projet ne figure pas dans le PLUi-HD 2020–2030, alors qu’il est censé entrer en service à l’horizon 2030. Agir pour Dijon rappelle que le volet « déplacements » du plan a été partiellement annulé par le tribunal administratif, en particulier à cause de l’absence de mesures concrètes pour encourager l’usage du vélo. Aucune correction n’a été apportée depuis, ce qui mettrait selon eux en cause la légalité du projet.
Un tracé jugé incohérent et destructeur
Le tracé proposé, qui relierait Chenôve aux Grésilles, est jugé redondant avec les lignes actuelles. Le groupe critique un itinéraire central sinueux, traversant des secteurs patrimoniaux sensibles comme la place Wilson, et s’inquiète de l’abattage de nombreux arbres boulevard Carnot.
Concernant les établissements scolaires, Agir pour Dijon estime que le projet diminuerait l’accessibilité de certains lycées pour les élèves non desservis par le tram. Un sondage interne au groupe scolaire Saint Joseph – La Salle montrerait d’ailleurs une opposition majoritaire au projet.
Autre point passé sous silence selon eux : le développement d’un nouveau quartier de 10 000 habitants à Chenôve, qui ne figure ni dans le projet T3, ni dans le PLUi-HD. Ils pointent un manque total d’anticipation sur les effets urbains induits.
Un coût astronomique et des priorités bafouées
Avec un investissement estimé à 300 millions d’euros, selon les chiffres communiqués en mars 2025, le projet T3 est perçu comme disproportionné. Il s’ajouterait au plan de renouvellement de la flotte de bus à hydrogène (185 M€), alors même que les emprunts pour les lignes T1 et T2 sont encore en cours de remboursement.
Agir pour Dijon alerte : les marges budgétaires de la métropole seraient entièrement absorbées, au détriment des besoins quotidiens des habitants : entretien des voiries, modernisation du réseau de bus, développement des pistes cyclables, accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, etc.
Des impacts négatifs en chaîne
Le projet T3 est aussi accusé d’aggraver les embouteillages, en particulier dans les secteurs Carnot, Voltaire et Wilson. La rue d’Auxonne deviendrait un cul-de-sac, ce qui perturberait lourdement la circulation.
Plus inquiétant encore pour le groupe : le tracé relierait en ligne directe les secteurs de Chenôve et des Grésilles aux principaux lycées de la métropole, ce qu’ils jugent peu opportun compte tenu de la forte activité liée au trafic de drogue dans ces quartiers.
Enfin, la construction de la ligne T3 est vue comme un levier pour la densification urbaine et la spéculation immobilière, à l’image de ce qui s’est produit sur l’avenue du Drapeau ou Jean-Jaurès, où de véritables « canyons urbains » ont émergé.
Des propositions alternatives réalistes
Agir pour Dijon plaide pour une autre vision des mobilités, moins coûteuse et plus proche des réalités locales. Le groupe propose :
- De résoudre les points noirs de circulation et de stationnement ;
- De refondre la politique tarifaire du stationnement ;
- De sécuriser les trottoirs, souvent envahis par les vélos et trottinettes ;
- D’améliorer les itinéraires cyclables et la sécurité des cyclistes ;
- De renforcer le réseau de bus, en adaptant les dessertes existantes ;
- De mieux connecter le centre-ville aux publics fragiles ou moins mobiles.
Surtout, le groupe demande l’élaboration d’un nouveau plan de déplacements métropolitain, cohérent et juridiquement fondé, couplé à une refonte du PLUi-HD, préalable à tout projet de grande ampleur.
Une ligne rouge électorale : le projet sera abandonné
En guise de conclusion, Emmanuel Bichot est formel : si les Dijonnais lui confient les rênes de la ville en mars 2026, la ligne T3 sera abandonnée sans délai. « Ce projet est précipité, dispendieux, mal ancré dans la réalité des besoins des Dijonnais. Il doit être stoppé. Nous le ferons. » – Emmanuel Bichot, président du groupe Agir pour Dijon. Le tramway T3, loin de faire consensus, s’annonce déjà comme un enjeu central de la campagne municipale à venir.
Contribution du mouvement AGIR POUR DIJON à la concertation sur le projet de 3ème ligne de tramway
Vendredi 1er Août 2025
LES OBSERVATIONS
– Nous sommes surpris que l’étude votée en 2023 par le conseil de métropole pour améliorer la desserte de Chevigny Saint-Sauveur et de l’avenue Roland Carraz débouche sur un projet beaucoup plus large de troisième ligne de tramway, qui au demeurant ne concerne pas Chevigny-Saint-Sauveur. Cela pose la question de la conformité du cahier des charges de l’étude par rapport à la délibération de l’assemblée en 2023.
– Le projet dit « CAPATRAM » d’un montant de 15 millions d’euros, initié en mars 2021 a été lancé par la métropole pour augmenter la capacité de transport du tramway. Il est encore en cours de réalisation durant l’été 2025, des travaux importants étant prévus tout l’été sur la ligne 1 jusqu’au 29 août 2025. Il nous a été affirmé que ces travaux devaient répondre à moyen terme aux risques de saturation. Il y a donc une contradiction complète dans les propos tenus.
– Les réunions de concertation n’ont pas été conduites de manière démocratique, de nombreuses personnes présentes n’ayant pas pu s’exprimer.
– Ce projet n’est pas prévu dans le Plan local d’urbanisme intercommunal – Habitat et Déplacement (Plui-HD) pour la période 2020-2030, alors qu’il doit entrer en service en 2030. Le volet déplacement lui-même a d’ailleurs été partiellement annulé par le juge administratif, en raison notamment de l’absence de plan d’action détaillé pour augmenter la part du vélo, sans qu’aucune conséquence n’en soit tirée.
– De l’avis général, en rejoignant Chenôve aux Grésilles, le projet fait doublon avec ce qui existe déjà. Le tracé dans sa partie centrale emprunte un itinéraire sinueux, dans des voies et sites patrimoniaux souvent inappropriés, telles que la place Wilson. À cet égard, l’abattage de nombreux arbres boulevard Carnot est vraiment contraire aux préoccupations actuelles.
– S’agissant des lycées, le tracé de cette troisième ligne rendrait leur desserte plus difficile pour tous ceux qui ne sont pas sur le réseau du tram. Ce n’est sans doute pas un hasard si un sondage réalisé en interne par le groupe scolaire Saint Joseph – La Salle fait apparaître un soutien minoritaire au projet.
– La création d’un nouveau quartier de 10 000 habitants sur la commune de Chenôve n’est pas mentionnée. Ces volumes ne sont absolument pas prévus dans le PLUi-HD 2020-2030. La délibération du 30 juin 2011 sur le réaménagement de l’entrée Sud de l’agglomération, sur laquelle les élus d’Agir pour Dijon se sont abstenus, ne comportait aucune précision quantifiée.
– Ce projet représente un investissement considérable de 300 M€, selon le chiffre communiqué en commission déplacement et mobilité de Dijon métropole en mars 2025. Cette dépense s’ajouterait – avec un faible effet de substitution – au projet dispendieux de renouvellement de la totalité de la flotte des bus avec un part à l’hydrogène, pour 185 M€. Le problème, c’est que toutes nos capacités budgétaires seraient absorbées par ce choix, alors même que le remboursement des deux premières lignes n’est pas terminé. Tous les autres besoins pour améliorer les déplacements à Dijon et dans la métropole, à commencer par l’état des voiries et des trottoirs, le réseau de bus, les pistes cyclables, ne pourront être satisfaits convenablement.
– Ce projet va congestionner la circulation automobile dans Dijon, notamment dans le secteur Carnot – Voltaire – Wilson, déjà compliquée par le réaménagement de la place du 30 octobre. La circulation de la rue d’Auxonne va se terminer en cul-de-sac. En réalité, ce projet de 3ème ligne de tram répond moins à une demande spécifique de la part des Dijonnais qu’à une volonté politique d’éradiquer les automobilistes dans Dijon, selon un objectif déjà proclamé plusieurs fois.
LES QUESTIONNEMENTS
– Au vu de nos observations préliminaires, pourquoi la métropole fait montre d’une telle précipitation sur un dossier aux conséquences aussi lourdes ?
– Rien ne sera décidé avant les prochaines élections municipales en mars 2026, il appartiendra donc aux électeurs de décider de ce projet. Pourquoi alors la communication déployée présente le projet comme déjà acté ?
– Pourquoi présenter un projet incompatible avec le PLUi-HD 2020-2030 en vigueur ?
– Au vu de l’intensité du trafic de drogue dans les secteurs de Chenôve et des Grésilles, est-il opportun de les relier en ligne directe aux principaux lycées de la métropole ?
– Le projet fait peser une menace sur la pérennité de la caserne de pompiers du Transvaal, dont le maintien à proximité du centre-ville est indispensable pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Pourquoi n’évoquez-vous jamais ce sujet vital ?
– Le projet va relancer la spéculation immobilière et la densification urbaine. Après l’avenue du Drapeau et l’avenue Jean-Jaurès, quel sera le prochain canyon urbain ? Quel sera l’impact sur l’ensemble du trajet, si les règles de l’actuel Plui-HD (densification dans un rayon de 500 mètres autour des stations de tramway et canyons urbains le long du trajet) sont appliquées ?
LES PROPOSITIONS
Sur le fond, nous considérons que l’urgence est d’avoir une vision globale des déplacements, plutôt que de traiter les sujets séparément.
Ce dont nous avons besoin, c’est un nouveau plan de déplacements, puisque celui adopté par la majorité en 2020 a été annulé par le juge administratif en raison de son incohérence. Ce nouveau plan est indissociable d’une nécessaire refonte du plan local d’urbanisme.
Une stratégie d’amélioration de l’existant serait préférable, selon les orientations suivantes :
– Résoudre les points noirs de la circulation et du stationnement ;
– Refondre la tarification du stationnement ;
– Rendre tous les trottoirs praticables, sans vélos ni trottinettes ;
– Améliorer les itinéraires cyclables et la sécurité des cyclistes ;
– Adapter le réseau de bus actuel pour compléter les dessertes ;
– Faciliter l’accès des personnes moins mobiles au centre-ville de Dijon.
En conclusion, le mouvement Agir pour Dijon est défavorable au projet présenté et s’engage à le stopper immédiatement si les Dijonnais lui font confiance en mars 2026.