Mercredi 27 août, sur le plateau du 20h de TF1, le Premier ministre François Bayrou a dressé un constat alarmant de la situation financière du pays. Tout en dénonçant « le confort des boomers« , il a reconnu que ses chances d’obtenir la confiance de l’Assemblée nationale, le 8 septembre prochain, sont extrêmement faibles.
À douze jours du vote de confiance qui pourrait marquer la fin de son passage à Matignon, François Bayrou a choisi l’offensive. Sur TF1, il a dénoncé « le confort des boomers qui considèrent que tout va très bien« , alors que la France fait face selon lui à une situation budgétaire « suffisamment grave« .
« Si on crée le chaos, les premières victimes, ce seront les plus jeunes des Français, à qui l’on a réussi à faire croire qu’il fallait encore augmenter la dette, alors qu’ils devront la payer toute leur vie », a-t-il martelé. Le chef du gouvernement accuse certains partis d’attiser la crise pour « leur propre confort politique », au détriment des générations futures.
L’ombre du 8 septembre
Lucide, le Premier ministre reconnaît que « a priori, on ne peut pas obtenir cette confiance ». « On sait bien qu’il n’y a pas de majorité depuis longtemps« , admet-il, tout en promettant de « se battre comme un chien » pour tenter de renverser la tendance.
Lors de sa conférence de presse de rentrée, François Bayrou a proposé de recourir à l’article 49.1 de la Constitution. À la différence du très controversé 49.3, ce mécanisme permet un débat parlementaire tout en engageant la responsabilité du gouvernement. Le vote de confiance est prévu le 8 septembre.
Un appel à la négociation… mais des portes fermées
« Ma conviction est qu’il faut qu’il y ait un accord, nous ne pouvons pas passer en force« , a plaidé le Premier ministre, se disant prêt à « ouvrir toutes les négociations nécessaires » et à discuter « mesure par mesure« .
Dès lundi prochain, il recevra à Matignon les chefs de partis et présidents de groupes parlementaires. Mais le contexte lui est extrêmement défavorable : le Parti socialiste, le Parti communiste, La France insoumise et le Rassemblement national ont déjà annoncé qu’ils refuseraient de lui accorder leur confiance.
François Bayrou dénonce un « assemblage » paradoxal entre des partis « antagonistes sur tous les sujets » mais unis dans le but de renverser le gouvernement. « Est-ce bien pour la France ?« , s’interroge-t-il, appelant les parlementaires à réfléchir à « l’addition des voix » entre « l’extrême gauche et l’extrême droite ».
Les attaques de l’opposition
La prestation télévisée de François Bayrou a immédiatement provoqué une salve de réactions.
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À gauche, Jean-Luc Mélenchon (LFI) accuse le Premier ministre de « mentir » et de manier un « discours populiste anti-partis ». « Le fusible de Macron est grillé. Le 8, on chasse Bayrou, le 10 on bloque Macron« , a-t-il lancé sur X. Son collègue Éric Coquerel, président (LFI) de la commission des finances, estime que Bayrou « va sauter » et dénonce un « feuilleton de catastrophisme« . « La dette n’est pas l’alpha et l’oméga de la santé économique« , ajoute-t-il, reprochant au gouvernement de privilégier les « cadeaux fiscaux aux plus riches ».
Olivier Faure (PS) raille un Premier ministre qui « traite avec désinvolture un sujet qui mériterait de se hisser à la hauteur de l’enjeu« . Selon lui, Bayrou et Macron portent eux-mêmes la responsabilité d’avoir fait passer le déficit « de 2 000 à 3 000 milliards d’euros ». Les socialistes promettent de proposer « un autre chemin« .
Marine Tondelier (Écologistes) juge « choquants » les propos du Premier ministre et l’accuse d’oublier que « le capitaine et l’équipage sont macronistes depuis huit ans« . -
À l’extrême droite, Marine Le Pen a fustigé « le mensonge » de Bayrou, qui avait affirmé que les oppositions étaient « en vacances » en août. Elle rappelle avoir envoyé une « lettre détaillée » sur les propositions budgétaires du gouvernement, restée sans réponse. Jordan Bardella, président du RN, annonce que son parti participera aux consultations de Matignon « sans aucune illusion« . Pour lui, « le retour aux urnes, par la dissolution ou la démission, demeure l’unique solution« .
Une équation politique insoluble
Face à une opposition unie dans le rejet et des soutiens fragiles au sein de la majorité, le Premier ministre apparaît de plus en plus isolé. Son insistance sur la gravité de la dette, loin de convaincre, semble radicaliser ses adversaires. « Plus François Bayrou parle, plus il renforce la détermination des groupes d’opposition à voter contre lui », constate Éric Coquerel.
Pour François Bayrou, la fenêtre de tir est étroite : il lui reste douze jours pour convaincre, « douze jours, et douze jours, c’est très long pour parler de tout« , veut-il croire. Mais à mesure que l’échéance du 8 septembre approche, le spectre d’une chute du gouvernement se précise, rendant son plaidoyer presque crépusculaire.