À quelques jours de la rentrée scolaire, le constat dressé par l’UNICEF France et la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), en partenariat avec le Collectif des Associations pour le Logement (CAL), est accablant : au moins 2 159 enfants, dont 503 âgés de moins de 3 ans, sont restés sans solution d’hébergement après un appel au 115.
Ce chiffre, issu du 7ᵉ baromètre sur les enfants à la rue, marque une hausse de 6 % par rapport à 2024 et de 30 % depuis 2022, année où le gouvernement s’était engagé à atteindre le « zéro enfant à la rue ».
Des promesses sans lendemain
Malgré les engagements répétés de l’État, la situation continue de se détériorer. Les familles appellent de plus en plus le 115 après avoir déjà dormi dehors : 79 % d’entre elles déclarent avoir passé la nuit à la rue la veille de leur appel.
Et ces chiffres ne reflètent qu’une partie de la réalité : ils n’incluent ni les mineurs non accompagnés, ni les familles vivant en squats ou en bidonvilles, ni celles qui ne parviennent pas à joindre le numéro d’urgence.
Une crise nationale et ultramarine
La saturation chronique des dispositifs d’hébergement touche l’ensemble du territoire, avec des régions particulièrement concernées comme l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes, l’Occitanie ou encore les Hauts-de-France. En Bourgogne-Franche-Comté, l’UNICEF relève également 40 personnes en famille en demande non pourvue au 115, témoignant que le phénomène n’épargne pas les territoires moins densément peuplés.
La situation est tout aussi dramatique outre-mer. À La Réunion, plus de 1 000 enfants étaient sans solution en 2024, dont 330 âgés de moins de 3 ans. À Mayotte, un tiers de la population vit en habitat précaire, une vulnérabilité accentuée par le passage de cyclones récents.
Quand l’urgence devient une question de survie
En 2024, 855 personnes sont mortes à la rue en France, dont 31 enfants. L’UNICEF et ses partenaires dénoncent une aggravation silencieuse et un véritable « blocage structurel » du droit à l’hébergement et au logement.
Deux recours pour Non-assistance à personnes mal-logées ont été déposés cette année par le Collectif des Associations pour le Logement afin d’engager la responsabilité de l’État.
« Nous ne pouvons pas nous résoudre à voir des enfants dormir dehors. Malgré nos alertes, rien ne change. Pire, les annonces budgétaires pour 2026 nous font craindre une nouvelle régression », alerte Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation pour le Logement.
Une responsabilité politique à la veille du budget 2026
Les organisations pointent du doigt l’examen du Projet de loi de finances 2026, qu’elles jugent décisif. Elles demandent un plan ambitieux combinant :
- une augmentation significative des places d’hébergement adaptées,
- une programmation pluriannuelle « de la rue au logement »,
- un investissement renforcé dans le logement social et très social.
« Ce qui manque, ce ne sont pas les solutions ni les ressources, mais la volonté politique de mettre fin à l’inacceptable », déclare Adeline Hazan, présidente de l’UNICEF France. « Ce baromètre est celui des renoncements. Nous ne pouvons pas accepter que des enfants retrouvent la rue le soir après l’école », insiste Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité.