Au lendemain de l’adoption par le Conseil municipal, lundi 22 septembre, du rapport annuel des budgets participatifs, l’association citoyenne Dijon Avenir conteste le rejet de son projet et met en cause des critères “opaques”. La Ville invoque l’impossibilité pour une “association à caractère politique” de candidater et rappelle l’existence d’autres instances de participation. En toile de fond : une bataille de définition de ce que doit être la démocratie locale.
Un projet écarté, une demande d’explications restée sans réponse
Dijon Avenir, association locale qui revendique l’implication directe des habitant·e·s, avait déposé une proposition baptisée “forum de quartier” pour chacun des 9 quartiers de la ville : un espace de libre expression installé dans l’espace public, composé de gradins, d’un grand panneau et d’un pupitre, destiné à favoriser débats, idées et convivialité.
Lors de la phase d’analyse par les services municipaux, la proposition n’a pas été jugée recevable. Motif communiqué à l’association : “Les associations à caractère politique ne peuvent solliciter une demande de budget participatif.” La Ville souligne en outre avoir “souhaité donner une place prépondérante aux habitants […] tels que les Ateliers de quartier, l’Observatoire de l’âge, les Agoras jeunes ou encore le tout nouveau Conseil participatif des Jeunes”, autant de dispositifs où les habitants “peuvent échanger et s’exprimer librement”.
Dijon Avenir conteste ce motif. Si l’association reconnaît qu’elle présentera “une liste citoyenne et participative” aux municipales de 2026, elle affirme qu’aucun article du règlement des budgets participatifs n’interdit explicitement la participation d’une association “à caractère politique”. Un courrier adressé à la maire le 7 juillet pour clarifier les critères serait resté sans réponse, ce que l’association dénonce comme “un signe d’opacité et d’impossibilité d’interaction.”
Derrière le conflit, deux visions de la participation
Pour Dijon Avenir, l’argument municipal révèle une divergence plus profonde : qu’entend-on par “participation” ? L’association juge la fréquence des Ateliers de quartier et des autres instances trop faible, et leur fonctionnement “excluant.” Elle revendique une montée en puissance de l’implication citoyenne face à “la crise démocratique” : selon elle, la participation doit tendre vers les niveaux supérieurs de l’“échelle de la participation” théorisée par la sociologue Sherry Arnstein, au-delà de la simple consultation.
“Dans le meilleur des cas, la Ville de Dijon arrive au niveau 4, la consultation,” affirme l’association, qui plaidait pour un dispositif de proximité “horizontal, convivial et spontané” dans l’espace public.
Des chiffres qui interrogent les moyens alloués
Le rapport municipal met en avant 197 projets déposés par des habitant·e·s ou associations, dont 81 jugés “recevables”. À l’issue des arbitrages, 34 projets ont été retenus par les Ateliers de quartier, avec une consigne donnée à leurs membres : “se limiter à trois ou quatre afin de privilégier la qualité à la quantité.”
Dijon Avenir reconnaît le volume de travail que représente une telle sélection, mais estime que “une municipalité qui se targue d’une implication concrète des citoyens” devrait doter le dispositif de moyens humains supplémentaires. À défaut, prévient-elle, le processus produit “de la frustration” chez celles et ceux qui se sont investis et reçoivent “une réponse via une plateforme déshumanisée.”
Ce que propose Dijon Avenir
Au-delà de la contestation, l’association avance une feuille de route qu’elle rattache à une “Ville participative” :
- Conventions citoyennes en début de mandat, associant habitant·e·s et acteurs locaux, pour fixer les grandes orientations (ville nourricière, productrice, végétale, etc.).
- Assemblée citoyenne et populaire : une instance mixte (élu·e·s, agents, citoyen·ne·s tiré·e·s au sort) dotée d’un pouvoir de co-décision ; au terme des travaux, le ou la maire prendrait mandat pour mettre en œuvre les actions adoptées.
- Conférence territoriale avec les communes de la métropole et de l’espace rural pour rééquilibrer les relations interterritoriales.
- Refonte des Assemblées de quartier et des budgets participatifs avec les habitant·e·s, pour élargir la participation et renforcer la prise en compte des propositions.
- Autonomie de gestion pour des associations d’habitant·e·s, sous contrôle citoyen, via des conventions d’occupation de lieux ou d’équipements.
La Ville assume d’autres canaux de parole
Côté municipal, le message transmis à l’association met l’accent sur des espaces déjà ouverts (Ateliers de quartier, Observatoire de l’âge, Agoras jeunes, Conseil participatif des Jeunes). Selon cette lecture, multiplier des dispositifs portés par des structures à visée électorale brouillerait la frontière entre politique municipale et portage associatif.
Reste une question juridique et pratique : le règlement des budgets participatifs interdit-il explicitement la participation d’associations dites “à caractère politique” ? Dijon Avenir soutient que non ; la majorité municipale n’a pas, à ce stade, apporté de réponse écrite aux demandes de précisions de l’association.
Les points clés
- 197 projets déposés, 81 recevables, 34 retenus par les Ateliers de quartier.
- Le projet “forums de quartier” (9 sites, espace d’expression public) a été écarté au motif du caractère politique de l’association porteuse.
- Dijon Avenir dénonce des critères opaques et un manque de moyens ; la Ville met en avant d’autres instances de participation déjà ouvertes.
- Enjeu de fond : quelle ambition et intensité pour la participation citoyenne à Dijon ?
Contact association : contact@dijonavenir.fr