Ils étaient environ 200, rassemblés cet après-midi place de la République, pour faire entendre une même voix : celle d’un secteur associatif à bout de souffle. Venus de toute la région, les représentants du tissu associatif bourguignon-franc-comtois ont dénoncé le désengagement croissant de l’État et la fragilisation d’un modèle qui pèse lourd dans la vie économique et sociale du pays.
Un pilier de l’économie locale menacé
Le secteur associatif représente en moyenne 10 % de l’emploi privé en France – et 8,6 % en Côte-d’Or. En Bourgogne-Franche-Comté, ce sont près de 76 000 salariés dont le poste pourrait être menacé à court ou moyen terme.
« On parle souvent du coût social des salariés, mais on oublie ce que ces associations apportent : un véritable ciment pour notre société », souligne Sandrine Carbonel, directrice de la Fédération régionale des MJC.
Elle rappelle que ces structures reposent aussi sur l’engagement de milliers de bénévoles : « Cette baisse de moyens, c’est aussi un plan social du bénévolat. Et derrière, ce sont des activités essentielles qui disparaissent : culture, sport, accompagnement social, éducation… Ce que le secteur marchand refuse de prendre en charge, faute de rentabilité. »

Un secteur essentiel en péril
Le constat est alarmant. Avec 20 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés, les associations françaises contribuent à 3 % du PIB national et représentent 11 % des emplois du secteur privé. Elles constituent souvent le premier lien entre les citoyens et les services publics, notamment dans les zones rurales ou les quartiers populaires.
Pourtant, leur modèle économique s’effrite : en vingt ans, les subventions publiques ont chuté de 41 %, remplacées par une logique d’appels à projets et de mise en concurrence. « On nous demande de faire toujours plus avec toujours moins. Les associations ne peuvent pas survivre sans un soutien fort et stable de l’État et des collectivités », a déclaré Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif national, lors d’une conférence de presse tenue à Paris.
Une précarité grandissante
Les chiffres issus de l’enquête nationale menée en mars 2025 par Le Mouvement associatif, Hexopée et le RNMA parlent d’eux-mêmes :
- 31 % des associations employeuses disposent de moins de trois mois de trésorerie ;
- 28 % ont déjà dû réduire leurs activités ;
- 18 % ne remplacent plus les départs de salariés ;
- 8 % envisagent un plan de sauvegarde.
Selon l’UDES, 186 000 emplois dans l’économie sociale et solidaire sont menacés par les coupes budgétaires du budget 2025. Le BODACC recense déjà 1 052 procédures collectives cette année, dont 462 liquidations, soit deux fois plus qu’en 2022.
« Nous assistons à une véritable hémorragie », alerte Fula Mesika, chargée de communication du Mouvement associatif. « Ce sont des associations de proximité, des clubs, des centres culturels, des structures d’accueil qui ferment. Et avec elles, disparaissent des services essentiels à la population. »
Des revendications claires et urgentes
Le Mouvement associatif appelle à un plan d’urgence national et formule plusieurs revendications :
- Pas un euro de moins pour les associations ;
- Stabiliser les financements publics et sécuriser la trésorerie ;
- Simplifier les procédures administratives et les appels à projets ;
- Reconnaître politiquement la vie associative comme pilier de la République.
Ces demandes prolongent des années d’alertes restées sans réponse : du cri du cœur des Restos du Cœur en 2023 à la tribune signée par plus de 1 000 associations en 2024, les signaux d’alarme se multiplient. Mais les réponses gouvernementales se font toujours attendre.
Une mobilisation nationale d’ampleur
Le rassemblement dijonnais s’inscrivait dans le cadre d’une mobilisation nationale qui culminera samedi 11 octobre dans toute la France : de Lille à Bordeaux, de Morlaix à Pau, en passant par Paris où un grand événement est prévu place Stalingrad. Concerts, brunchs associatifs, happenings et marches citoyennes rythmeront cette journée d’unité.
Une question de société
Les organisateurs lancent un message fort : « À l’heure où la pauvreté progresse, où les inégalités s’aggravent, où le dérèglement climatique s’accélère, peut-on se permettre d’affaiblir les structures qui tissent le lien social et agissent pour la solidarité ? » Pour eux, les associations ne sont pas de simples prestataires de services, mais des acteurs du bien commun, porteurs d’une vision citoyenne et humaniste.
Dijon ouvre la marche
En choisissant de se rassembler dès ce vendredi 10 octobre, Dijon donne le ton d’une mobilisation appelée à s’amplifier. Sous les banderoles colorées, les participants ont rappelé l’importance de la solidarité, du bénévolat et de la démocratie locale. « Les associations ne réclament pas des privilèges, mais les moyens de continuer à agir pour les autres », a insisté Claire Thoury en conférence de presse nationale. « Sans elles, ce sont nos territoires, notre cohésion sociale et notre humanité qui vacillent. »