Le dernier baromètre Altares révèle un été 2025 sous haute tension pour les entreprises françaises. En Bourgogne–Franche-Comté, la situation reste contrastée : certains territoires résistent, d’autres plongent.
Le groupe Altares, référence de la donnée d’entreprise, a dévoilé mardi son étude trimestrielle sur les défaillances et sauvegardes d’entreprises. Les chiffres sont sans appel : 14 371 procédures collectives ont été ouvertes au troisième trimestre 2025, soit une hausse de 5,2 % par rapport à la même période de 2024. Un niveau record pour une période estivale, tiré par un mois de septembre particulièrement sévère.
« Le mois de septembre, loin de confirmer les frémissements de début d’été, a refroidi les espoirs d’un retournement. L’économie française est plongée dans un épais brouillard. L’incertitude est encore montée d’un cran gelant les décisions d’investissement et d’embauche, même chez les dirigeants les plus aguerris. » – Thierry Millon, directeur des études Altares
Une France fragilisée malgré des signaux positifs
Avec plus de 50 700 entreprises défaillantes depuis le début de l’année, la France reste dans une phase de fragilisation économique. Sur douze mois glissants, 68 000 redressements ou liquidations judiciaires ont été recensés, auxquels s’ajoutent 1 500 sauvegardes. « Néanmoins, rien n’est figé. Si la consommation des ménages reste atone, elle ne s’effondre pas. Les Français privilégient l’épargne, mais la période des fêtes pourrait offrir un répit salutaire aux petites entreprises, les plus exposées aux risques de défaillance. Ce dernier trimestre pourrait alors, à défaut d’inverser la tendance, enrayer l’hémorragie et ouvrir la voie vers l’amélioration attendue pour 2026. » – Thierry Millon, Altares
Les TPE et PME constituent l’essentiel des défauts :
- Les microentreprises de moins de trois salariés concentrent les trois quarts des défaillances (+6 %)
- Les TPE de plus de 5 salariés voient leurs défaillances grimper de +9 %, et les PME de 10 à 19 salariés dérapent de +13 %.
- 46 entreprises de plus de 100 salariés ont fait défaut, menaçant à elles seules 10 000 emplois.
Au total, 52 000 emplois sont menacés, un chiffre « toujours au plus haut », selon Altares, même si la part des redressements et sauvegardes — désormais 33 % des procédures — permet d’espérer davantage de maintien de postes.
Secteurs : la manufacture décroche, le commerce et la construction résistent
Dans le détail, l’industrie manufacturière (+17 %) et les services aux entreprises (+9 %) sont les plus touchés. À l’inverse, la construction (+2 %) et le commerce de détail (+2 %) résistent mieux. Le bâtiment, notamment le gros œuvre (-4 %), tire la tendance régionale vers le haut. Dans le commerce, les petites surfaces alimentaires et les magasins multi-rayons affichent même une amélioration.
Climat économique : l’incertitude domine mais la résilience reste visible
« Alors que les perspectives business restent contrastées et les indicateurs de défauts très élevés, plusieurs signaux laissent entrevoir un horizon plus dégagé. (…) La capacité de résilience des entreprises n’est plus à démontrer. Malgré une activité économique ralentie, les comptes 2024 affichent encore une belle tenue. » – Thierry Millon, Altares.
Altares observe également un léger mieux sur les retards de paiement et les taux d’impayés : « La situation se détend depuis le début de l’été. Autre indicateur encourageant, le taux d’impayés mensuels des PME calculé par les Urssaf est contenu sous 1 %. » Des améliorations modestes, mais qui laissent entrevoir un possible apaisement à partir de 2026, selon le cabinet.
Bourgogne–Franche-Comté : une région à deux vitesses
En Bourgogne–Franche-Comté, 510 entreprises ont été placées en procédure collective au troisième trimestre 2025, soit une hausse de 8 % sur un an. La moitié des départements sont en amélioration, mais les contrastes restent forts. « En Bourgogne-Franche-Comté (510 ; +8 %), la moitié des départements est bien orientée et tout particulièrement le Jura qui, avec un recul de 26 %, efface la hausse de 30 % subie un an plus tôt. Parmi les départements dans le rouge figure le plus important de la région, la Côte-d’Or, qui compte plus de 120 procédures ouvertes sur trois mois, soit une explosion de +46 %. » – Extrait du communiqué Altares
Le Jura en net rebond
Le Jura se distingue comme l’un des territoires les plus performants de France ce trimestre, avec une baisse des défauts de 26 %. Cette amélioration fait suite à une période 2024 très difficile (+30 % de défaillances). Le secteur du bâtiment et les PME industrielles locales bénéficient d’un environnement plus favorable, appuyé par les dispositifs régionaux de soutien à la trésorerie.
La Côte-d’Or, épicentre de la dégradation
À l’inverse, la Côte-d’Or est l’un des départements français les plus touchés. Plus de 120 procédures ont été ouvertes entre juillet et septembre, une hausse spectaculaire de 46 %. Les secteurs de la restauration, du commerce de détail et de la métallurgie figurent parmi les plus exposés, selon les chambres consulaires.
Une stabilité prudente ailleurs
La Saône-et-Loire, le Doubs et la Haute-Saône parviennent à stabiliser leur sinistralité, confirmant la résilience du tissu de TPE locales et la diversification des activités industrielles (microtechnique, agroalimentaire, transport).
Une région en quête d’équilibre
Malgré une hausse globale des défaillances, la Bourgogne–Franche-Comté se distingue par sa résilience structurelle : ancrage territorial fort, densité de réseaux économiques et dynamique de transformation industrielle. Les dispositifs régionaux de soutien à la transition énergétique et à la relocalisation, ainsi que les coopérations entre CCI, clusters et acteurs publics, permettent d’amortir les chocs.
En conclusion, Altares souligne que « derrière l’épais brouillard de cette rentrée, des opportunités ciblées se profilent déjà » et qu’« une stratégie prudente et sélective doit permettre aux entreprises de renouer avec une dynamique de conquête ».
Une région symbole de la France des contrastes
Entre le rebond du Jura et les difficultés de la Côte-d’Or, la Bourgogne–Franche-Comté illustre la France des deux visages : une économie locale attachée à son territoire, mais toujours vulnérable aux vents contraires nationaux.Si le dernier trimestre 2025 confirmera ou non la stabilisation espérée, la région demeure un laboratoire de résilience et d’adaptation, fidèle à son esprit d’entreprise.