Dans un climat politique tendu, marqué par l’absence de majorité claire à l’Assemblée nationale et une défiance croissante envers l’exécutif, la députée écologiste Catherine Hervieu (EELV) a publié un communiqué appelant à « redonner tout son sens au débat parlementaire » et à « renouer avec la confiance démocratique ». Son texte, dense et offensif, s’inscrit dans la séquence ouverte après le vote manqué de la motion de censure contre le gouvernement Lecornu II, que l’élue a choisi de ne pas soutenir.
Un appel à la centralité du Parlement
« L’inquiétude et le dégoût ressentis face à la situation politique, économique et sociale que nous vivons sont profonds », écrit la députée. Pour Catherine Hervieu, le constat est clair : l’impasse institutionnelle dans laquelle se trouve le pays, conséquence du scrutin majoritaire, place désormais le Parlement au cœur du jeu démocratique.
La députée salue ce retour à la délibération législative : « Dès lors que le gouvernement n’a plus de majorité absolue, la discussion parlementaire devient essentielle. Nous avons besoin de débattre, de confronter les idées et d’améliorer le budget de l’État et de la sécurité sociale. »
Ce refus de céder à la tentation de la censure traduit, selon elle, une volonté de « mener la bataille parlementaire » plutôt que de « paralyser le pays ». Catherine Hervieu insiste : « Le Premier ministre s’étant engagé à ne pas recourir à l’article 49.3, c’est dans l’hémicycle que nous devons imposer une trajectoire de justice sociale, fiscale et climatique. »
Une stratégie de combat parlementaire plutôt qu’une rupture institutionnelle
La députée de Côte-d’Or assume pleinement son choix de ne pas voter la censure du gouvernement Lecornu II, une décision qui a suscité des débats à gauche. Selon elle, « il s’agit d’éviter une année blanche » et de permettre l’adoption de mesures concrètes « pour les collectivités locales, pour la transition écologique, et pour la justice sociale ».
Elle précise qu’en cas de trahison des engagements du gouvernement, « la remise en question de ce dernier interviendra ». En d’autres termes, la députée place la confiance sous condition : pas de blanc-seing, mais une vigilance constante.
Des engagements sociaux et écologiques réaffirmés
Catherine Hervieu revient également sur la réforme des retraites, rappelant le combat mené pour la reconnaissance de la pénibilité et l’abaissement de l’âge de départ pour les métiers les plus durs. Elle rend hommage au rôle déterminant des syndicats et à la mobilisation populaire, tout en appelant la gauche et les écologistes à « prendre le relais de cette bataille à l’Assemblée nationale ».
Sur le plan programmatique, elle réaffirme plusieurs priorités :
- Lutte contre les déserts médicaux et amélioration de l’accès aux soins,
- Interdiction des polluants éternels (PFAS), enjeu sanitaire majeur,
- Définition légale du consentement pour renforcer la protection des victimes de violences sexuelles,
- Remboursement intégral des fauteuils roulants, mesure emblématique de justice sociale,
- Introduction du scrutin proportionnel pour les législatives, afin de mieux représenter la diversité politique,
- Taxe Zucman sur le patrimoine des ultra-riches, symbole d’une fiscalité plus équitable.
Un réquisitoire contre l’hyperprésidentialisme
Dans son communiqué, Catherine Hervieu ne se limite pas à l’analyse budgétaire. Elle dénonce aussi le « verrouillage du pouvoir » et la dérive monarchique du régime : « Emmanuel Macron se pose en chef suprême, en monarque. »
Pour l’élue écologiste, ni la dissolution, ni la démission présidentielle ne régleraient le problème structurel d’un système trop centré sur l’exécutif : « Nous devons faire évoluer le statut du chef de l’État pour mettre fin à l’hyperprésidentialisme. »
Cette critique s’inscrit dans un discours plus large, celui d’une gauche écologiste qui plaide pour une VIe République parlementaire et citoyenne, où le pouvoir serait mieux partagé et les institutions rendues plus transparentes.
Une mise en garde face aux menaces et à la montée des extrêmes
La députée souligne également les « défis urgents » liés à la sécurité nationale : « menaces hybrides, ingérences étrangères, cyberattaques, guerre cognitive », énumère-t-elle. Mais elle met surtout en garde contre « la déstabilisation interne » du pays provoquée par des politiques fiscales et sociales « désastreuses », qui nourrissent selon elle « la montée de l’extrême droite ».
« Une majorité de nos concitoyens ne sait plus comment manger, se soigner, vivre dignement », déplore-t-elle, appelant à « renouer avec la confiance politique » et à redonner un cap clair à la nation.
« La bataille des budgets sera rude »
Alors que s’ouvre l’examen du budget 2026, Catherine Hervieu se dit prête à livrer une bataille « dure mais nécessaire ». « Avec mes collègues écologistes et de gauche, je la mènerai en toute détermination », promet-elle, évoquant des lignes rouges sur la fiscalité, les dépenses sociales et les investissements climatiques.
Ce ton combatif contraste avec le scepticisme ambiant et traduit la volonté d’une partie de la gauche écologiste de peser réellement dans la nouvelle configuration parlementaire.
Analyse : une stratégie de résistance constructive
Le communiqué d’Hervieu illustre une posture politique singulière : celle d’une députée qui refuse la posture du blocage systématique, sans pour autant céder au gouvernement. Son mot d’ordre – débat, transparence et justice – s’inscrit dans une volonté de refonder la pratique démocratique au moment où la France traverse une crise de confiance majeure.
En ne votant pas la censure, Catherine Hervieu s’expose aux critiques de son propre camp, mais elle assume un choix stratégique : rester dans l’arène parlementaire pour y livrer bataille, plutôt que de jouer le coup d’éclat sans lendemain.
Dans un paysage politique fracturé, le communiqué de la députée écologiste sonne comme un appel à la maturité démocratique. Catherine Hervieu refuse la résignation et invite à redonner sens à la délibération collective : « Nous devons être à la hauteur », conclut-elle. Une phrase simple, mais lourde de sens, à l’heure où la République cherche encore son souffle.