Les organisations syndicales et associations de retraité·es appellent à une journée nationale d’action le jeudi 6 novembre à 10h30, devant les préfectures. Elles dénoncent un projet de budget 2026 jugé profondément injuste, antisocial et dangereux pour l’avenir de la Sécurité sociale et des droits collectifs.
Un budget de rigueur présenté comme une fatalité
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2026, porté par le gouvernement de Gérald Darmanin et du ministre des Finances Sébastien Lecornu, s’inscrit dans la continuité de la politique dite de « redressement des comptes publics ». Mais pour les syndicats, cette expression cache en réalité une nouvelle cure d’austérité, dont les retraité·es seraient les premières victimes.
Les organisations signataires – CGT, CFTC, CFE-CGC, FSU, Solidaires, FGR-FP, LSR et Ensemble et Solidaires – dénoncent un texte « profondément injuste » qui poursuit la logique engagée depuis plusieurs années : faire payer la dette et les déficits « à ceux qui ont déjà le moins ».
Des mesures lourdes de conséquences pour les retraité·es
Parmi les dispositions les plus contestées :
- Gel des pensions en 2026, puis sous-indexation jusqu’en 2030, ce qui reviendrait à une perte de pouvoir d’achat estimée à 1,4 % dès l’an prochain.
- Suppression de l’abattement fiscal de 10 %, remplacé par un forfait de 2 000 €, ce qui entraînerait une hausse d’impôt pour des centaines de milliers de retraité·es.
- Gel du barème de l’impôt sur le revenu et de la CSG, augmentant la charge fiscale sur les revenus modestes.
- Doublement des franchises médicales, qui feront exploser le reste à charge pour les soins, médicaments et transports sanitaires.
- Gel de l’ASPA, le minimum vieillesse, touchant les retraité·es les plus précaires.
- Suppression de 3 000 postes de fonctionnaires et réduction des subventions aux associations, aggravant la baisse des services publics essentiels.
Les syndicats chiffrent à 350 euros par an la perte moyenne pour un ménage de retraité·es : 320 € de baisse de pension, 20 € d’augmentation d’impôts, 10 € de perte de prestations sociales. « C’est une attaque frontale contre les plus âgés, alors que ce sont eux qui ont le plus besoin de soins et de services publics », martèle un responsable de la FGR-FP.
La santé et la Sécurité sociale au cœur des inquiétudes
Le projet de budget remet également en cause certaines affections de longue durée (ALD), augmentant encore la précarité sanitaire des retraité·es. Selon les chiffres des organisations, 43 % des personnes en ALD sont âgées de plus de 60 ans. Le transfert de certaines prestations de la Sécurité sociale vers les complémentaires santé, qui devront verser une contribution de 1 milliard d’euros, risque de faire exploser les cotisations. Or, près de 700 000 retraité·es sont déjà sans mutuelle. Pour les syndicats, ces mesures ne sont rien d’autre qu’un désengagement progressif de l’État au profit du secteur privé, contraire à l’esprit de solidarité qui fonde la Sécurité sociale depuis 1945.
Les grandes entreprises épargnées
Ce qui révolte particulièrement les organisations, c’est le double discours du gouvernement. Tandis qu’il demande des sacrifices aux retraité·es et aux salarié·es, il maintient les exonérations de cotisations sociales (88 milliards d’euros) et les aides publiques sans contrepartie (211 milliards d’euros) accordées chaque année aux grandes entreprises.
« Ces sommes suffiraient à financer un système de santé public performant, à garantir des retraites décentes et à permettre un départ à 60 ans », rappelle la CGT Retraités.
Les plus hauts revenus, eux, continuent de bénéficier de niches fiscales et de dividendes record. Pour les syndicats, il s’agit là « d’un choix de classe » assumé : réduire les dépenses publiques plutôt que de chercher des recettes nouvelles pour la collectivité.
« Une question de dignité »
Les représentants syndicaux insistent : la mobilisation du 6 novembre n’est pas une simple protestation ponctuelle. Elle s’inscrit dans un mouvement plus large de défense du pouvoir d’achat, de la dignité et du droit à vieillir dans de bonnes conditions.
« Les retraité·es ne sont pas un coût, mais une richesse pour la société. Ils et elles ont travaillé, cotisé, contribué à construire ce pays. Ils méritent respect et considération », déclare Daniel Noirot au nom des organisations réunies.
Les syndicats espèrent que les débats budgétaires actuellement en cours à l’Assemblée nationale permettront de faire entendre la voix du monde du travail, et appellent à une mobilisation massive pour peser dans les décisions à venir.
Un appel national à se mobiliser
Le jeudi 6 novembre à 10h30, les retraité·es sont invités à se rassembler devant les préfectures et dans les grandes villes du pays. Des manifestations départementales sont prévues partout en France, avec pour mot d’ordre : « Pour une Sécurité sociale juste, solidaire et financée par ceux qui en ont les moyens. »
Les organisations exigent :
- L’indexation immédiate des pensions sur l’inflation,
- La revalorisation en lien avec le salaire moyen,
- Le maintien de l’abattement fiscal de 10 %,
- L’abandon du doublement des franchises médicales,
- La revalorisation des prestations sociales,
- Et le renforcement des services publics.
Une mobilisation déterminée
Le mouvement des retraité·es s’inscrit dans une longue tradition de défense du modèle social français, né des conquêtes du Conseil national de la Résistance. Face à la montée de la précarité, à la fragilisation des hôpitaux et à la baisse du pouvoir d’achat, leurs organisations veulent rappeler que la Sécurité sociale « n’est pas une dépense, mais un investissement dans la dignité humaine ». « Ce n’est pas une bataille du passé, conclut Daniel Noirot, c’est une bataille pour l’avenir. Celle d’une société solidaire, juste, où la retraite ne rime pas avec pauvreté. »
