Le monde agricole se trouve dans la tourmente et prévoit de manifester sa colère mi-novembre. Il a reçu le soutien de François Sauvadet, le président du Conseil départemental de Côte-d’Or, qui a annoncé que, malgré les contraintes financières croissantes, les engagements pris envers les agriculteurs et les crédits alloués à la Côte-d’Or seraient maintenus. Les agriculteurs rencontrent aussi de grandes difficultés pour obtenir ce qui leur est dû auprès de la Région Bourgogne-Franche-Comté, qui met beaucoup trop de temps à verser les aides du FEDER. Jacques De Loisy, président de la FDSEA de Côte-d’Or, a accepté de répondre à nos questions !
François Sauvadet a annoncé que malgré les restrictions budgétaires croissantes, les engagements pris envers les agriculteurs et les crédits alloués à la Côte-d’Or seraient maintenus. Est-ce une bonne nouvelle ?
Jacques De Loisy : « C’est une excellente nouvelle. Nous étions confiants, connaissant l’engagement de François Sauvadet, tant humain que financier, au sein du Conseil Départemental en faveur de l’agriculture. Certes, les collectivités et l’État subissent aujourd’hui une pression budgétaire intense, mais nous savons pouvoir compter sur le soutien indéfectible du président du Conseil départemental. Nous le remercions sincèrement pour son appui constant à la diversité des productions agricoles et des modes de production en Côte-d’Or. »
Face à la crise, les agriculteurs envisagent de manifester. Que va-t-il se passer ?
Jacques De Loisy : « C’est en train de s’organiser effectivement. Initialement, tout n’a pas été mis en place suite à la manifestation du mois de janvier. Ce qui avait été prévu par le premier ministre de l’époque n’a pas été mis en œuvre puisqu’il a démissionné suite à la dissolution de l’Assemblée nationale. Et puis, dans les prochains jours, les prochaines semaines, on sent venir au grand galop les accords du Mercosur, notamment avec l’Amérique du Sud, et je dois vous dire, à titre personnel, que je ne comprends pas trop que l’Europe peut passer des accords commerciaux avec ce qu’on appelle les BRICS : Brésil, Chine, Russie, Inde… Il y a des pays avec qui l’on peut peut-être réfléchir à travailler, mais quand on voit tous ces pays ensemble, ce n’est pas forcément des pays avec qui l’on peut vraiment bien travailler aujourd’hui pour des multiples raisons que vous imaginez bien. Et donc, tout ça, le monde agricole en est très inquiet. Et je pense que l’ensemble des consommateurs et des pouvoirs publics devrait bien avoir cela à l’esprit également.«
Donc, mi-novembre, c’est le conflit ?
Jacques De Loisy : « Non, ce n’est pas un conflit, il ne faut pas prendre cela comme un conflit, il faut prendre cela comme une nouvelle alerte, puisque les engagements n’avancent pas. Une partie a été faite, on a eu un accompagnement sur les énergies, on a eu la suppression des jachères, on a eu un certain nombre de mesures d’accompagnement fiscales pour le monde de l’élevage, et c’est le moins que l’on peut avoir pour ce secteur d’activité! Mais il y a encore beaucoup trop de choses sur les moyens et modes de production qui manquent à l’appel. En plus de cela, on nous remet le Mercosur sur le devant de la scène, trop, c’est trop ! Et on sera là pour le dire et se faire entendre dans les jours et semaines à venir jusqu’à ce que nous soyons entendus et que l’on nous donne raison ! »
La Région est un sujet sensible, donnant l’impression que les choses n’avancent que lorsque les agriculteurs manifestent. Êtes-vous en contact avec la Région ?
Jacques De Loisy : « Je tiens déjà à saluer l’action qui a été notamment à l’initiative des jeunes agriculteurs de Bourgogne-Franche-Comté et de la FDSEA. La FDSEA et les Jeunes Agriculteurs ont bien évidemment été soutenus dans l’esprit et par leur présence. Et je pense que cette action montre une détermination de force et de courage. Force de conviction, et courage d’action avec raison ! Puisqu’il n’y a pas eu de débordement, évidemment, c’était bien organisé. Après, il y a eu un peu de flottement au moment où les jeunes sont rentrés dans le conseil régional. Mais il était légitime qu’ils puissent s’exprimer devant l’ensemble de l’assemblée plénière pour que l’ensemble des élus soit bien au courant des dysfonctionnements récurrents depuis plusieurs semaines, plusieurs mois, voire plus d’un an, puisque la FDSEA de Côte-d’Or et les Jeunes agriculteurs ont alerté dès 2023.
On a un soutien partiel de l’État qui reprend une partie des dossiers de la région, mais il serait très grand temps que les services de la Région soient en bonne ordre de fonctionnement pour distribuer l’ensemble des fonds prévus par l’Europe et qui risque de repartir, donc de manquer aux jeunes agriculteurs, de manquer à la modernisation et à la transition énergétique et climatique des exploitations. Et quelque part, de manquer à l’économie locale, puisque l’argent européen qui va dans les exploitations agricoles est réinvesti via des travaux par des entreprises locales. Je pense que le tissu économique local a grand besoin, au sens large, au niveau agricole mais également des TPE/PME de Bourgogne-Franche-Comté, de ces aides européennes face aux grandes difficultés économiques que vivent nos concitoyens aujourd’hui, les agriculteurs et les entreprises. « .
Quand des agriculteurs expriment leur détresse face aux élus régionaux, et qu’un élu est vu jouant sur son portable, cela ne montre-t-il pas un certain décalage ?
Jacques De Loisy : « Je peux comprendre qu’un élu consulte occasionnellement son téléphone pour un message professionnel, mais dans ce cas précis, il jouait de manière récurrente à des jeux vidéo. Ce comportement est inadéquat et indigne de la fonction. Quand on n’est pas à la hauteur de sa fonction, on doit démissionner. »