Ce 25 novembre, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, une manifestation se tiendra ce soir à 18h, place de la Libération à Dijon. Cette journée de mobilisation prend cette année une résonance particulière, alors que le procès de Mazan, comme d’autres récents, révèle l’ampleur des violences sexistes et sexuelles au sein de notre société. Des centaines de citoyens, d’organisations et de collectifs appellent à manifester pour rappeler l’urgence de la situation et exiger des actions concrètes de la part des pouvoirs publics.
Renforcer les services publics pour lutter contre les violences
Les organisations syndicales dénoncent l’insuffisance des mesures actuelles, soulignant la nécessité d’un plan interministériel global pour prévenir et traiter rigoureusement les violences sexistes et sexuelles. Ils réclament un renforcement des services publics – en particulier ceux de la santé, de la justice, de la police et de l’éducation – avec un budget à la hauteur des enjeux que représente l’éradication de ces violences. Au travail, comme ailleurs, les violences sont massives et graves. Elles touchent les femmes de toutes professions, qu’elles soient issues du secteur privé ou public. Harcèlement moral, agissements sexistes, agressions sexuelles et viols ne sont pas que des mots : les chiffres sont accablants et révèlent la réalité à laquelle sont confrontées trop de salariées.
Les services de santé, par exemple, sont en première ligne dans la prise en charge des victimes. Cependant, les professionnels manquent souvent de formation spécifique pour identifier et traiter les situations de violences. Il est indispensable de renforcer cette formation pour permettre aux personnels soignants d’agir efficacement, en offrant un accompagnement médical et psychologique adapté. De même, les services de police doivent être mieux équipés pour recevoir les plaintes de manière appropriée, sans minimiser les témoignages des victimes, et en assurant un suivi rigoureux des affaires.
Les organisations syndicales insistent également sur la nécessité de former le personnel éducatif pour sensibiliser les jeunes dès le plus jeune âge aux questions de respect et d’égalité. L’éducation est un levier essentiel pour faire évoluer les mentalités et prévenir les violences sexistes et sexuelles à la racine. En outre, les associations sur le terrain, qui jouent un rôle fondamental dans l’accompagnement des victimes et la sensibilisation, doivent recevoir des subventions pérennes afin de mener à bien leurs missions.
Des demandes précises pour protéger les victimes
Parmi les revendications portées ce soir, les collectifs demandent la mise en place de sanctions pour toutes les entreprises et administrations ne respectant pas leurs obligations en matière de prévention et de lutte contre les violences. Ils souhaitent aussi la création d’un baromètre annuel à l’échelle nationale pour mesurer le ressenti des salariés et agents face aux violences sexistes et sexuelles au travail. Des droits spécifiques sont réclamés pour protéger les victimes, comme l’abrogation des jours de carence en cas d’arrêt maladie, l’interdiction de licenciement, ou encore un accès garanti aux soins psychologiques avec un remboursement intégral des consultations en psychotraumatologie.
Les organisations syndicales rappellent que 9 % des viols ou tentatives de viols ont lieu sur le lieu de travail, et que 30 % des salariées ont déjà été victimes de harcèlement ou d’agression sexuelle sur leur lieu de travail. Malgré ces chiffres alarmants, 70 % des victimes n’en parlent jamais à leur employeur, par crainte de représailles ou d’indifférence. Pour celles qui osent parler, la réalité est souvent celle de la double peine : près de 40 % estiment que la situation s’est réglée à leur désavantage, avec des mobilités forcées ou des licenciements injustifiés.
La manifestation de ce soir est l’occasion d’exiger du gouvernement une évolution de la législation française, afin qu’elle soit conforme aux engagements pris à l’international, notamment avec la ratification de la 190ème Convention de l’OIT contre la violence et le harcèlement au travail. Pour les organisations syndicales, il est temps que la France s’aligne sur les meilleures législations européennes, et que des dispositifs concrets soient adoptés pour soutenir les victimes et renforcer la prévention.
Les collectifs appellent également à des concertations rapides pour intégrer de nouveaux dispositifs dans la loi, tels que :
- Faire un bilan rigoureux des mesures de 2018 et identifier les nouvelles dispositions à adopter.
- Construire un baromètre annuel pour évaluer le ressenti des salarié∙e∙s et des agent∙e∙s sur les violences sexistes et sexuelles au travail – sous l’égide du Haut Conseil à l’Égalité.
- La mise en place de sanctions pour toutes les entreprises et établissements qui n’ont pas de plan de prévention des violences sexistes et sexuelles et de dispositif de signalement négocié.
- Des droits pour protéger les victimes de violences conjugales : abrogation des jours de carence en cas d’arrêt maladie, interdiction de licenciement, droit à absences rémunérées pour faire ses démarches, droit à la mobilité géographique et fonctionnelle.
- L’obligation de formation des personnels des ressources humaines, personnels encadrants, élu·es dans les instances représentatives du personnel (comités sociaux…).
- Des moyens pour que les référent∙es harcèlement/violence et les élues VDHA (violence, discrimination, harcèlement, agissement sexiste) puissent jouer leur rôle syndical : prérogatives clairement définies, temps de délégation, formations.
- L’obligation annuelle d’une campagne de sensibilisation sur les violences sexistes et sexuelles auprès de l’ensemble des salarié∙es sur leur temps et lieu de travail.
- L’obligation de mise en place de dispositifs de prévention spécifiques pour les travailleuses et travailleurs les plus vulnérables et notamment les jeunes, les précaires, les personnes LGBTI+, les travailleuses de nuit ou en milieu non mixte.
- Des droits pour que les victimes de violences sexistes et sexuelles travaillant dans des entreprises sans représentant∙e du personnel puissent être défendues et accompagnées par un syndicat face à leur employeur.
- Un accès aux soins garanti avec le remboursement à 100 % des consultations en psychotraumatologie pour les victimes.
Un appel à la mobilisation citoyenne
Les violences sexistes et sexuelles au travail ne sont pas une fatalité. Pour les manifestants, transformer le travail, c’est transformer la société tout entière. La manifestation de ce soir à Dijon est un appel fort à la mobilisation citoyenne. Ensemble, il est possible de faire pression pour que des mesures ambitieuses soient prises, pour protéger les victimes, prévenir les violences et garantir la sécurité de tous et toutes dans l’espace professionnel, mais aussi dans la sphère privée.
Les organisations syndicales rappellent que la lutte contre les violences sexistes et sexuelles nécessite une prise de conscience collective et un engagement de chaque citoyen. Les personnes présentes ce soir à Dijon représentent une partie d’une mobilisation nationale et internationale qui refuse de se résigner. Les pancartes, les slogans et les prises de parole prévues place de la Libération porteront un message clair : il est temps de changer de paradigme, de passer des paroles aux actes, et de garantir à toutes les femmes une vie sans violence.