Un vent de contestation souffle sur la métropole dijonnaise. Plusieurs organisations de jeunesse, parmi lesquelles Les Jeunes Écologistes Bourgogne, les Jeunes Insoumi·es Dijon, Jeunesse Dijon Radicale, La Garde Rouge et l’Union nationale des étudiant·es de France (UNEF), ont exprimé leur ferme opposition au projet de construction d’un centre de rétention administrative (CRA) sur les communes de Longvic et Ouges. Leur prise de parole fait suite à une interpellation restée sans réponse, adressée aux élus locaux le 14 avril dernier.
Dans un communiqué conjoint, les collectifs dénoncent un projet qu’ils jugent injustifié sur le plan sécuritaire, inhumain dans sa gestion des migrations, et inadapté aux urgences sociales du territoire.
Des chiffres qui interrogent sur l’utilité réelle des CRA
Les signataires s’appuient sur des données officielles pour remettre en cause la légitimité même de ces centres. Selon eux, seulement 2 % des personnes sous obligation de quitter le territoire français (OQTF) ont fait l’objet d’une condamnation pénale. Dans 98 % des cas, il ne s’agit donc pas de personnes représentant une menace sécuritaire, mais plutôt de personnes en situation irrégulière, souvent précaires, que l’administration cherche à expulser par voie de contrainte.
Encore plus marquant : même lorsqu’une personne est placée en rétention, le renvoi effectif hors du territoire n’est réalisé que dans environ 20 % des cas, selon les chiffres les plus « optimistes » avancés par le ministère de l’Intérieur lui-même. Pour les collectifs, cela montre que ces centres sont avant tout des dispositifs de dissuasion et de pression psychologique, plus que des outils réellement fonctionnels du système migratoire.
Une dérive répressive dénoncée
Le communiqué illustre les abus potentiels de ce dispositif avec un exemple parlant : un·e ouvrier·ère du bâtiment sans papiers peut être interpellé·e et placé·e en rétention simplement pour avoir un cutter en poche, outil pourtant indispensable à sa profession. Dans ce cas de figure, la présence dans l’espace public avec un objet de travail peut être interprétée comme une menace à l’ordre public.
« Ces cas sont loin d’être anecdotiques. Ils illustrent une volonté politique de criminaliser les personnes exilées, sous prétexte de sécurité, mais avec des arguments souvent absurdes et arbitraires », dénoncent les organisations.
Un choix politique jugé indécent dans le contexte social actuel
Les signataires ne se limitent pas à critiquer le principe même des CRA : ils dénoncent également le choix budgétaire qu’implique ce projet. Dans un contexte où la demande en hébergement d’urgence explose dans le département, notamment pour les sans-abri, les familles précaires, ou encore les étudiant·es en difficulté, investir dans un centre de rétention est perçu comme une provocation.
Ils rappellent que la France a déjà été condamnée à onze reprises par la Cour européenne des droits de l’Homme pour les conditions indignes dans ces centres, ce qui remet en cause leur légitimité tant sur le plan juridique qu’éthique.
Appel à la mobilisation et à la responsabilité des élus locaux
Dans leur communiqué, les collectifs s’adressent directement à plusieurs figures politiques locales, notamment :
- Pierre Pribetich, député,
- Nathalie Koenders, maire de Dijon,
- Céline Tonot, maire de Longvic,
- Claude Girard, maire d’Ouges.
Ils leur demandent de prendre publiquement position contre ce projet, de refuser la délivrance du permis de construire, et de plaider en faveur d’un usage alternatif du foncier et des budgets, pour créer des structures d’hébergement d’urgence.
Une mobilisation en construction
Les organisations saluent les nombreux soutiens déjà exprimés par des collectifs, associations, et citoyen·nes engagé·es sur le terrain en faveur des personnes exilées. « L’accueil digne est non seulement possible, mais il est nécessaire. Nous appelons toutes celles et ceux qui refusent cette politique de rejet à rejoindre la mobilisation », concluent-elles.
Dans les semaines à venir, les collectifs promettent de renforcer leur communication et leur présence publique pour empêcher l’aboutissement du projet. Réunions, rassemblements, pétitions et campagnes d’information sont déjà en préparation.
Les CRA sont des structures où sont enfermées les personnes étrangères en attente d’expulsion du territoire. Ils sont régulièrement critiqués pour leurs conditions de détention, la faiblesse des garanties juridiques offertes aux retenus, et le stress psychologique généré chez des personnes souvent vulnérables. Malgré les critiques, leur nombre et leur capacité ne cessent de croître depuis les années 2000.
Communiqué de presse du 17 juin 2025 :