La place Wilson, exceptionnellement rebaptisée pour l’occasion « Place du Peuple », a vibré aujourd’hui au rythme des célébrations des 130 ans de la Confédération générale du travail. Un anniversaire historique pour la CGT, fondée en 1895 lors du congrès de Limoges, qui a choisi Dijon pour rappeler ses racines tout en affirmant la continuité de ses combats.
Une journée militante et festive
Dès 10 heures, un public nombreux – syndicalistes, habitants, curieux – s’est rassemblé pour participer aux différentes animations. La projection du film La Sociale, suivie d’un débat, a ouvert les festivités. L’après-midi a été marqué par des conférences, ponctuées d’interventions théâtrales, où l’histoire du mouvement ouvrier s’est mêlée aux enjeux actuels. La soirée a pris des allures de fête populaire avec une série de concerts, de Ryner à La Peau du Zouk, en passant par Dead Gallaghers, accompagnés d’une buvette et d’un espace de restauration.
« Cet anniversaire n’est pas qu’une commémoration. C’est l’occasion de mettre en valeur l’histoire du syndicalisme et des avancées sociales conquises par l’action collective », a rappelé la CGT Côte-d’Or.
130 ans de luttes
Depuis sa naissance au Congrès de Limoges en 1895, où fédérations d’industries, bourses du travail et syndicats autonomes s’étaient unis pour défendre « l’émancipation intégrale des travailleurs », la CGT n’a cessé d’accompagner et de peser sur les grands moments de l’histoire sociale française.
Dès 1906, la grève générale pour la journée de huit heures marquait un tournant majeur. Quelques mois plus tard, le congrès d’Amiens affirmait une orientation claire : un syndicalisme de lutte, indépendant des partis, avec une ambition révolutionnaire. Cette ligne d’action allait inspirer des générations de militants.
Dans les années 1930, la CGT fut en première ligne face au danger fasciste. Après la grande grève générale de février 1934, c’est l’unité retrouvée au congrès de Toulouse en 1936 qui permit aux travailleurs de conquérir, sous le Front populaire, des avancées historiques : congés payés, conventions collectives, accords Matignon.
Durant la Seconde Guerre mondiale, le syndicat, d’abord affaibli, s’est reconstitué dans la clandestinité. L’accord du Perreux en 1943 permit la réunification des courants syndicaux au sein de la Résistance. Aux côtés du Conseil national de la Résistance, la CGT participa à l’élaboration du programme des « Jours heureux », prélude à la création de la Sécurité sociale, aux nationalisations et aux comités d’entreprise de l’après-guerre.
Les décennies suivantes furent marquées par de grandes mobilisations : la grève des mineurs en 1963, l’immense mouvement de mai-juin 1968, ou encore les luttes des années 1970 sur les salaires et les conditions de travail. Chacune de ces étapes a ancré la CGT comme acteur central des batailles sociales, souvent en avance sur son temps.
Plus récemment, l’année 1995 reste gravée dans les mémoires. Face au plan Juppé, la CGT a porté l’un des plus grands mouvements sociaux de la fin du XXe siècle, bloquant une réforme des retraites jugée injuste et redonnant vigueur au syndicalisme dans un contexte de désyndicalisation.
Ces 130 années racontent une histoire faite de conquêtes arrachées, de résistances opiniâtres, mais aussi de fractures et de débats internes. À chaque époque, la CGT a su se réinventer pour continuer à défendre ce qu’elle considère comme l’essentiel : les droits collectifs, la dignité au travail et l’émancipation sociale.
Un pont entre mémoire et actualité
À travers cet anniversaire, la CGT 21 a voulu relier mémoire et actualité. Les organisateurs rappellent que l’histoire du syndicalisme ne s’écrit pas seulement à travers les grandes figures, mais grâce à l’engagement d’innombrables anonymes qui, localement, ont façonné un droit du travail toujours en construction.
La journée de ce samedi, à la fois historique, militante et festive, s’inscrit dans cette continuité : celle d’un syndicalisme qui se nourrit de ses luttes passées pour relever les défis d’aujourd’hui – qu’il s’agisse de l’emploi, de la protection sociale ou des droits collectifs.
F.B









