Selon nos informations, un infirmier du Centre hospitalier La Chartreuse a été suspendu à titre conservatoire à la suite d’un signalement interne. L’agent reconnaît avoir adressé une demande d’ajout en « ami » sur Facebook à une patiente hospitalisée — un fait pour le moins inhabituel. L’établissement a ouvert une enquête administrative, dont les conclusions devraient être rendues prochainement. D’éventuelles sanctions relèveront de la direction générale. À ce stade, il n’est pas question de préjuger du fond de l’affaire.
L’infirmier concerné est, par ailleurs, militant syndical à la CGT et membre de La France insoumise. Ces éléments, précisent nos sources, « ne préjugent en rien de la procédure en cours », laquelle se concentre strictement sur les faits signalés. Contacté, le syndicat CGT du Centre hospitalier La Chartreuse n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.
Qu’importe, nous direz-vous, car ce qui nous intéresse pour l’heure, c’est de comprendre quelles mesures la direction du CH La Chartreuse a mises en place afin que, lorsqu’une telle situation — ou d’autres du même ordre — se produit, les patients puissent donner l’alerte.
Nous avons officiellement sollicité le Centre hospitalier La Chartreuse afin de connaître les outils mis en place pour prévenir ce type de situation, ainsi que d’autres pouvant survenir dans le cadre des soins. Voici la réponse transmise par la direction de l’établissement : « L’établissement attache une importance majeure au respect des droits et de la dignité des personnes accueillies. Tout comportement contraire à ces valeurs serait évidemment inadmissible et traité avec la plus grande fermeté s’il venait à être porté à notre connaissance. »
La direction rappelle également que « les agents du CH La Chartreuse sont engagés au service des patients dans le cadre d’une mission de service public, avec un profond sens du soin, du respect et de l’éthique professionnelle ». Les équipes travaillent de manière pluridisciplinaire, « garantissant un accompagnement attentif et une vigilance collective vis-à-vis de toute situation pouvant susciter questionnement ».
Concernant la fréquence de ce type d’incident, l’établissement précise qu’il s’agit de faits « tout à fait exceptionnels ». Il souligne disposer « d’une culture de bientraitance solidement ancrée » et d’un ensemble de dispositifs destinés à prévenir toute forme de dérive individuelle.
La prévention des situations de maltraitance ou d’abus de position constitue, selon la direction, « un axe prioritaire » de la politique institutionnelle. Parmi les mesures mises en place :
• la diffusion d’une Charte de la bientraitance à l’ensemble des agents, rappelée lors des formations d’intégration ;
• l’existence d’un Comité de bientraitance, chargé de promouvoir les bonnes pratiques et la culture éthique du soin ;
• une cellule d’analyse des événements indésirables, permettant d’identifier les situations à risque et d’y apporter des réponses correctives ;
• des formations régulières, tous les deux mois, sur les droits des patients, la dignité, l’intimité et les conduites professionnelles attendues ;
• enfin, une procédure interne « Conduite à tenir en cas de situation de maltraitance », fondée sur le guide de recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de Santé (HAS), publié en octobre 2024.
Ces actions, souligne la direction, s’inscrivent dans une politique globale de qualité, de sécurité des soins et de prévention de la maltraitance, conforme aux recommandations nationales.
S’agissant des dispositifs de signalement à disposition des patients, le CH La Chartreuse rappelle qu’ils sont clairement indiqués dans le livret d’accueil et affichés dans les unités. Les patients peuvent notamment :
• s’adresser directement à l’équipe du service (cadre, médecin, infirmier référent) ;
• contacter la responsable des affaires générales, juridiques et des relations avec les usagers ;
• saisir la direction ou la Commission des Usagers (CDU) ;
• échanger avec les représentants des usagers, membres d’associations agréées et indépendants de l’établissement ;
• ou encore signaler un événement sanitaire indésirable via la plateforme nationale du ministère de la Santé.
Selon la direction, ces dispositifs visent à « garantir la liberté de parole, la confiance et la transparence ». Chaque signalement, précise-t-elle, « fait l’objet d’une analyse rigoureuse et d’un suivi approprié ».
Enfin, l’établissement rappelle que toute personne s’estimant victime d’un comportement inapproprié peut naturellement porter plainte ou saisir les autorités compétentes. Le CH La Chartreuse conclut en réaffirmant sa volonté de « rester pleinement mobilisé pour assurer un cadre de soins sûr, respectueux et humain, dans le respect des valeurs du service public hospitalier ».
La mise à pied, un geste de prudence
Il reste que la mise à pied conservatoire, décidée par la direction du Centre hospitalier La Chartreuse, apparaît avant tout comme une mesure de précaution. Ce type de décision, courant dans la fonction publique hospitalière lorsqu’un signalement met en cause un agent, ne préjuge en rien de la culpabilité ou de la responsabilité de la personne concernée. Il s’agit avant tout de sécuriser la situation le temps de l’enquête, en écartant temporairement l’agent du service pour garantir la sérénité des investigations et la protection de toutes les parties.
Dans un établissement de santé, où la relation de confiance entre soignant et patient constitue le socle même du soin, la direction a le devoir de préserver un climat apaisé et d’éviter toute situation susceptible de fragiliser cette relation. La mise à pied conservatoire répond donc à une logique de préservation de l’intérêt général : elle vise à permettre aux enquêteurs de travailler dans un cadre neutre, sans interférence, tout en rassurant les patients et les équipes.
Une telle mesure est censée rester exceptionnelle, car elle est strictement encadrée par le droit de la fonction publique. Elle est limitée dans le temps et doit être suivie d’une évaluation précise des faits, fondée sur des éléments objectifs recueillis dans le cadre de la procédure administrative. Ce n’est qu’à l’issue de cette enquête que la direction pourra, le cas échéant, envisager des sanctions disciplinaires ou, au contraire, lever toute mesure conservatoire.
En attendant, la suspension temporaire de l’infirmier doit être lue comme un geste de prudence, et non comme un jugement. Le principe de présomption d’innocence demeure, et c’est à l’enquête qu’il reviendra d’éclairer les faits signalés, d’en mesurer la gravité et d’en tirer les conséquences appropriées.
Si nous prenons l’exemple de cet infirmier, c’est parce qu’il est actuellement suspendu dans l’attente des conclusions de l’enquête. Mais d’autres situations similaires ont déjà pu se produire au sein de l’établissement, certaines ayant abouti à un retour à l’activité des agents concernés, sans sanction, après que les faits eurent été jugés non fautifs. Il convient donc de rappeler que la mise à pied conservatoire n’est pas une sanction en soi, mais une mesure temporaire et réversible, destinée à préserver le bon déroulement de la procédure.
Enfin, il est important de préciser que l’infirmier, bien qu’écarté de ses fonctions pendant la durée de l’enquête, continue d’être rémunéré, conformément au cadre réglementaire applicable à la fonction publique hospitalière.