Le 5 décembre, Journée mondiale du bénévolat instaurée par l’ONU en 1985, a pris cette année une résonance particulière à Dijon. Pour célébrer les 40 ans de cette journée dédiée à l’engagement citoyen, une cérémonie empreinte d’émotion a été organisée afin de distinguer deux personnalités majeures du tissu associatif local : Jean Bernard PACCAUD et Serge ELIAS, piliers de l’Amicale des Enfants de Saône-et-Loire, fondée en 1930 et engagée sans relâche au service des autres depuis près d’un siècle.
Une amicale née en 1930, toujours jeune à 95 ans
Créée le 12 janvier 1930 à Dijon, cette amicale rassemble depuis l’origine des habitants de Dijon et de ses environs, originaires de Saône-et-Loire ou ayant des liens forts avec ce département. Son but est resté le même au fil des décennies : resserrer les liens d’amitié, d’entraide et de fraternité entre ses membres.
Aujourd’hui, près de 400 sociétaires font vivre cette association, qui demeure un véritable trait d’union entre générations et territoires. « Notre amicale n’a jamais cessé de porter des valeurs d’entraide, de solidarité et de fraternité », rappelle son actuel responsable, Gilles PACCAUD, à l’origine de l’initiative de cette cérémonie.
Pour marquer les 40 ans de la Journée mondiale du bénévolat, il a souhaité que les plus anciens membres d’honneur de l’amicale soient officiellement distingués pour un demi-siècle de dévouement.
Jean Bernard Paccaud et Serge Elias, 50 ans de fidélité associative
Les deux récipiendaires du jour, Jean Bernard PACCAUD, né à Dijon le 24 mars 1939, et Serge ELIAS, né le 14 février 1941, ont consacré plus de 50 ans de leur vie à cette amicale. Le premier a successivement assumé les fonctions de secrétaire, puis de président, le second celles de trésorier. Ensemble, entourés d’équipes engagées, ils ont contribué à structurer, financer et animer la vie de l’association, lui permettant de traverser le temps sans renier ses valeurs.
Leur engagement, souvent au détriment de leur vie familiale ou professionnelle, a été salué comme un exemple. « C’est grâce à cette entraide et cette solidarité que les bénévoles rendent le monde meilleur et la vie des citoyens plus facile », a rappelé Stephen BLANCHARD, délégué de la Société d’Encouragement au Bien (SEAB) pour la Côte-d’Or.
C’est au nom de la SEAB que les deux hommes se sont vu remettre la médaille d’argent avec palme, récompense d’un bénévolat de longue haleine, discret mais constant.

La Société d’Encouragement au Bien, 163 ans au service du courage et du dévouement
Fondée en 1862 à Paris par Honoré ARNOULD, la Société d’Encouragement au Bien est une œuvre de neutralité absolue, reconnue d’utilité publique depuis 1864. Elle est née avant même la Croix-Rouge, créée en 1864, et s’est donnée pour mission de récompenser le courage, le dévouement et le bénévolat sous toutes ses formes.
Au fil de ses 163 ans d’histoire, la SEAB a compté parmi ses présidents ou lauréats des personnalités prestigieuses :
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Alain Poher, président du Sénat et président de la République par intérim, qui présida la SEAB de 1971 à 1994,
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le poète Stéphen Liégeard, originaire de Brochon, président de 1897 à 1921,
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mais aussi Louis Pasteur, Georges Duhamel, Raoul Follereau, Louis Leprince-Ringuet, le professeur Jean Bernard, le chanteur Charles Dumont, le général Henri Zeller, ou encore Denis Seznec.
La SEAB s’appuie sur un réseau de délégués départementaux. En Côte-d’Or, Stephen BLANCHARD en assure la représentation depuis 1999, après avoir lui-même reçu la médaille d’or de la société en 1979. Chaque année, la SEAB lance un appel aux présidents d’associations afin de repérer des bénévoles méritants. Les dossiers sont ensuite examinés par un Conseil national à Paris : la médaille ne s’achète pas, elle se mérite.
« Sans les bénévoles, la société serait bien triste »
Au cours de son discours, Stephen BLANCHARD a rappelé le contexte d’une société souvent marquée par les crises, les conflits et les tensions, mais où l’engagement bénévole demeure un repère essentiel : « Notre présence aujourd’hui, c’est d’honorer deux bénévoles qui œuvrent par solidarité au bien-être de notre société, si souvent bafouée dans l’actualité de chaque jour, mais toujours avec l’espoir d’améliorer le sort de chaque citoyen. »
Il a insisté sur la diversité des profils réunis dans le monde associatif : toutes origines, toutes opinions, toutes religions, rassemblées par une même volonté de « faire le bien ». Loin des clichés, le bénévolat ne serait ni un passe-temps pour retraités, ni une concurrence au travail salarié, mais une réponse aux manquements de l’État et de la société face aux besoins des plus fragiles.
Les chiffres cités par le délégué de la SEAB illustrent l’ampleur du mouvement :
- environ 13 millions de bénévoles en France,
- une baisse de près de 4 millions pendant la crise du Covid,
- mais depuis 2023, une reprise progressive, avec 23 à 25 % des Français engagés, soit 4 à 5 millions de bénévoles chaque semaine.
La France détient l’un des taux de bénévolat les plus élevés au monde : près de 26 % des Français donnent de leur temps, avec une majorité de plus de 65 ans, mais des jeunes de plus en plus présents dès 15 ans. Une « colonne vertébrale » du monde associatif que Blanchard appelle à consolider.
La jeunesse, le statut du bénévole et l’avenir du monde associatif
Invité à prendre la parole, Hamid EL HASSOUNI, 5ᵉ adjoint à la maire de Dijon, en charge de la jeunesse, de la vie associative et de l’éducation populaire, a salué à son tour les deux lauréats tout en élargissant la réflexion à l’avenir du bénévolat : « Je ne veux pas noircir le tableau. Les études montrent que la jeunesse reste engagée, mais différemment : moins dans la durée, plus dans des actions ponctuelles, comme aider les Restos du Cœur, le Secours populaire ou participer à des maraudes. »
L’élu a rappelé que la ville de Dijon se veut « territoire d’éducation populaire » et fait le choix politique de maintenir les moyens financiers dédiés aux associations, malgré un contexte budgétaire tendu. La ville compte 4 500 associations, avec près de 150 nouvelles créations chaque année, preuve d’une vitalité associative remarquable.
Hamid El Hassouni a aussi ouvert un débat sur la reconnaissance concrète du statut de bénévole : et si, demain, l’engagement régulier dans une association pouvait être pris en compte, par exemple, dans le calcul des trimestres de retraite ? Une façon de valoriser officiellement ce don de soi, encore trop souvent réduit à une simple « bonne volonté ».
Quand l’ombre passe en pleine lumière
Au-delà des chiffres, cette cérémonie aura surtout permis de mettre des visages sur le mot “bénévolat”. Ceux de Jean Bernard Paccaud et de Serge Elias, deux hommes modestes, qui n’ont jamais compté leurs heures ni cherché les honneurs.
En choisissant de les distinguer, Gilles Paccaud l’assume clairement : il s’agit de rendre visibles celles et ceux qui agissent dans l’ombre, de rappeler que derrière chaque repas distribué, chaque manifestation associative, chaque moment de convivialité ou de solidarité, il y a des mains, des voix, des regards, des vies entières consacrées aux autres.
La devise de la Société d’Encouragement au Bien, « Aidons-nous – Aimons-nous », a pris ce soir-là tout son sens. En remettant la médaille d’argent avec palme à ces deux figures de l’amicale, c’est aussi 95 ans d’histoire associative dijonnaise et 163 ans de promotion du bien qui ont été célébrés.
Une journée mondiale, un message universel
Instituée par l’Assemblée générale des Nations unies et célébrée chaque 5 décembre, la Journée mondiale du bénévolat a pour but de promouvoir et reconnaître le travail des bénévoles dans le développement économique, social et humain, aux niveaux local, national et international.
À Dijon, cette journée aura été l’occasion de rappeler une évidence trop souvent oubliée : sans bénévoles, un des piliers de la République vacillerait.
Des amicales de quartier aux grandes ONG, du soutien scolaire aux maraudes de nuit, des clubs sportifs aux associations culturelles, ce sont des millions de gestes gratuits et anonymes qui tissent, jour après jour, un monde un peu plus humain.
En rendant hommage à Jean Bernard Paccaud et Serge Elias, Dijon a salué deux parcours exemplaires, mais aussi toutes celles et tous ceux qui, dans les associations, continuent de croire que « faire le bien rend heureux ». Et, pour reprendre les mots d’un ancien président de SEAB que fréquentait Honoré Arnould, Victor Hugo : « Le bonheur est parfois caché dans l’inconnu. » Ce soir-là, à Dijon, l’inconnu avait un nom, un visage, une médaille… et un immense cœur.

















