Le syndicat apicole principal en France, l’Union Nationale de l’Apiculture Française (UNAF), tire la sonnette d’alarme face à la proposition de loi « Entreprendre en agriculture » déposée par la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA) et les Jeunes Agriculteurs (JA). L’article 10 de cette loi, présenté le 29 août 2024, propose la réautorisation de l’acétamipride, un pesticide de la classe des néonicotinoïdes, interdit depuis 2020 en France en raison de ses effets néfastes sur les pollinisateurs et la biodiversité.
Un pesticide « tueur d’abeilles »
L’acétamipride, utilisé massivement avant son interdiction, fait partie des néonicotinoïdes, pesticides largement décriés pour leur impact dévastateur sur les abeilles et autres insectes pollinisateurs. Ces substances chimiques perturbent gravement les écosystèmes, entraînant la disparition inquiétante des insectes indispensables à la pollinisation.
Christian Pons, président de l’UNAF, exprime sa vive préoccupation : « Le modèle agro-industriel défendu par la FNSEA et les JA ne doit en rien justifier le retour de pesticides et insecticides dangereux pour les pollinisateurs, notamment les abeilles. La disparition très inquiétante des insectes est une menace pour les écosystèmes et l’apiculture française confrontée à de nouveaux défis ».
Depuis son interdiction en 2020, l’acétamipride est resté un sujet de débats. Bien que toujours autorisé dans plusieurs pays européens, la France avait choisi de le bannir après des études scientifiques pointant ses effets désastreux sur l’environnement. En effet, la Task Force sur les pesticides systémiques (TFSP), un groupe de chercheurs internationaux, avait conclu que ces produits chimiques causent « de graves impacts sur l’environnement, sur la biodiversité et sur la santé publique ».
Une attaque contre les institutions de contrôle
La proposition de loi ne se limite pas à la réautorisation de l’acétamipride. La FNSEA et les JA souhaitent également placer sous contrôle gouvernemental plusieurs institutions indépendantes, comme l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES). Cela constitue, selon l’UNAF, une tentative de restreindre l’indépendance des organes de contrôle sanitaire et de protection de la biodiversité.
Christian Pons avertit que ce projet de loi n’est motivé que par des intérêts financiers au détriment de la santé publique et de l’environnement : « Sans considération pour la biodiversité et la santé publique, les partisans d’un modèle agricole intensif à bout de souffle veulent forcer la main du Parlement et du gouvernement. L’UNAF appelle les parlementaires à s’opposer à ce retour en arrière très inquiétant pour l’apiculture, l’agriculture et les pollinisateurs ».
La menace sur l’apiculture et l’économie
Les rapports scientifiques montrent une corrélation nette entre l’augmentation de l’utilisation des pesticides de synthèse, notamment les néonicotinoïdes, et la diminution rapide des pollinisateurs. Cette situation est préoccupante non seulement pour la biodiversité mais aussi pour l’économie. En France, les services de pollinisation représentent entre 2,9 et 5 milliards d’euros, selon le ministère de l’environnement.
L’acétamipride, en particulier, a été retrouvé dans les pains d’abeilles (un mélange de pollen, de miel et de salive utilisé pour nourrir les larves). Les études démontrent que ce pesticide provoque des effets à long terme sur les abeilles, entraînant des problèmes de développement chez les larves et une diminution de l’espérance de vie chez les adultes. Il perturbe également les comportements de recherche de nourriture, mettant en péril la survie des colonies.
L’UNAF continue de se mobiliser pour défendre les intérêts des apiculteurs et la survie des abeilles, rappelant que leur disparition pourrait avoir des conséquences dramatiques sur l’agriculture et l’environnement. À travers son Comité de soutien des élus aux abeilles et à l’apiculture, le syndicat espère faire obstacle à cette proposition de loi qui marque un dangereux retour en arrière.
Le projet de loi « Entreprendre en agriculture » soulève de vives inquiétudes quant à l’avenir des abeilles et des pollinisateurs en France. L’UNAF appelle à une prise de conscience collective face aux menaces que représentent les pesticides pour l’apiculture, la biodiversité et la santé publique.