Chenôve, avec ses 14 612 habitants, est la troisième ville de Côte-d’Or en termes de population et le deuxième pôle économique de la métropole dijonnaise. Dijon Actualités a rencontré Thierry Falconnet, maire de la commune, qui a accepté de répondre à nos questions pour évoquer l’avenir de la ville, ses défis et ses projets. Pendant environ deux heures, dans son bureau, sous le regard attentif de Marianne, représentée par un tableau accroché au mur, il s’est prêté au jeu des questions-réponses avec simplicité et une grande franchise, il faut le reconnaître.
Le lundi 21 septembre 2015, vous devenez maire de Chenôve, succédant à Jean Esmonin, qui avait démissionné. Avec le recul, est-il difficile de gérer une ville de 14 612 habitants ? N’avez-vous jamais eu, à certains moments, l’envie de tout arrêter pour reprendre une vie plus « normale », comme l’ont fait plusieurs maires ces dernières années ?
Thierry FALCONNET : D’abord, être maire, c’est un engagement. Et être maire de Chenôve, c’est un engagement total. Je dis « être maire » parce que, pour avoir récemment rencontré beaucoup de mes collègues – des maires ruraux, des maires de communes périurbaines, des maires de petites villes, des maires de plus grandes villes –, être maire, c’est un engagement au service de l’intérêt commun et des habitants.
Être maire, ça signifie être au travail, mais aussi avoir des convictions, des convictions fortes, être déterminé, et avoir une vision claire pour la ville que l’on administre. Je le dis souvent : les décisions que nous prenons aujourd’hui ont des effets immédiats à court terme, mais nous ne mesurons pas toujours leurs effets à moyen et long terme. Et quand on est maire, quand on prend une décision, quelle qu’elle soit, on engage l’avenir de la ville, ce qu’elle sera demain et après-demain. Il faut donc en avoir pleinement conscience lorsqu’on met en place des projets aux temporalités différentes.
On n’est pas dans l’immédiateté. Certes, nous devons souvent répondre à des problèmes immédiats, mais un programme municipal repose sur plusieurs temporalités qui s’enchaînent et s’articulent les unes par rapport aux autres. C’est un travail passionnant, avec des moments de joie, de bonheur partagé avec les équipes municipales et avec les habitants. Mais il y a aussi des moments plus difficiles.
À Chenôve, depuis dix ans, nous avons affronté des périodes difficiles, des périodes de tensions, des violences urbaines qui, sporadiquement, viennent entacher la vie des habitants et la réputation de la ville. Nous avons aussi connu des épreuves internes, des trahisons. Quand votre premier adjoint vous dénigre publiquement et vous traîne dans la boue, ce n’est jamais agréable. D’ailleurs, il a été condamné, la justice est passée. J’ai aussi été victime de chantage, nous avons subi des incendies criminels, ainsi que la pression du narcotrafic, qui a pesé lourdement sur le climat de la ville.
Tout cela s’est accompagné d’une stratégie de dénigrement systématique menée par l’opposition, une forme de harcèlement : des recours à répétition, des injures sur les réseaux sociaux, tout cela dans le but de me faire plier, de me décourager et de me faire lâcher. Mais il faut me connaître un peu pour savoir que ce genre de pratiques produit l’effet inverse ! Elles me renforcent. Je me renforce dans l’adversité.
C’est donc ma réponse à toutes celles et ceux qui ont adopté cette stratégie et qui la mettent en œuvre à l’approche des élections municipales. Plus on vient me chercher, plus cela me renforce dans ma conviction de travailler pour Chenôve et ses habitants.
Vous avez fait référence aux autres maires. Récemment, Jean Dubuet, le maire de Flavignerot, a fait une déclaration assez touchante sur ce qu’il retire de ses années au conseil municipal et de ses années de mandat. Il résume bien la situation en disant que la fonction de maire est de plus en plus compliquée. Certains maires ont été confrontés, eux aussi, à la violence et à une forme d’épuisement, et ils ont choisi d’abandonner leur mandat. Je ne veux pas leur jeter la pierre, je les comprends. Je comprends que certains puissent se dire : « À quoi bon ? » C’est un choix, je ne les juge pas.
Il y a des moments de découragement, mais je n’ai jamais renoncé. Je n’ai jamais renoncé parce que nous sommes élus, parce que nous recevons la confiance des électeurs, la confiance des habitants. Et cette confiance, il faut tout simplement l’honorer, en restant debout, en faisant face aux difficultés.
Chenôve, que vous connaissez bien, est une ville qui doit avoir à sa tête quelqu’un de combatif, quelqu’un qui ne se laisse pas impressionner ni démonter par les difficultés. C’est cet équilibre que j’essaie de maintenir dans l’exercice de mon mandat de maire. Combatif, je le suis et je le resterai.
Ce que j’aime dans ce mandat, par rapport à d’autres que j’aurais pu briguer, c’est la proximité. J’aime les gens, j’aime me promener dans la ville, j’aime aller faire mes courses au marché le dimanche, et pas seulement en période électorale, pas seulement pour distribuer des tracts. J’aime aller saluer les commerçants, prendre la température de la ville. J’aime ce contact.
J’aime aussi cette grande capacité de résistance, voire de résilience, qu’a Chenôve. C’est une ville debout, une ville à part entière. Ce n’est pas un quartier de Dijon, et ses habitants ne se ressentent pas comme tels. Chenôve est une ville avec une identité, avec des identités, avec une histoire, des histoires. Je suis très heureux d’être à ma place.
Depuis votre élection en 2015, la ville de Chenôve a connu de nombreuses transformations. Selon vous, quel est le projet dont vous êtes le plus fier, celui qui symbolise le mieux votre action pour les Cheneveliers et Chenevelières ?
Thierry FALCONNET : Alors, pour ce qui concerne les transformations, ce sont des transformations qui ont été engagées avant moi et qui vont se poursuivre. Je n’ose pas dire après moi, mais cette transformation de Chenôve a été engagée à la fin des années 90 et elle se poursuit, et c’est une bonne chose. C’est une bonne chose pour Chenôve parce que cela se traduit aussi par l’attractivité de la ville.
J’ai reçu récemment, comme tous les maires de la métropole, les représentants de l’INSEE qui m’ont donné des chiffres pour Chenôve, et nous sommes une ville qui gagne des habitants. Nous sommes une ville qui attire de nouveaux habitants. Cela signifie que le travail engagé porte ses fruits.
Le travail de reconstitution de la ville sur elle-même, avec des constructions qui sont, pour certaines, décriées, l’est souvent par des gens qui ont déjà un toit sur la tête. Moi, je suis attaché à ce que chacune et chacun, à Chenôve, quelle que soit sa condition sociale, puisse avoir un logement décent. Que ce soit un logement à loyer modéré, un logement en accession abordable ou un logement en accession libre, il faut que Chenôve soit ouverte à toutes les catégories de population.
Je suis donc très content de voir que Chenôve a gagné environ 200 habitants entre 2022 et aujourd’hui.
Le projet qui symbolise le mieux mon action depuis dix ans, et cela ne vous surprendra pas, c’est le projet du parc. Je l’ai mis en avant lors de la cérémonie des vœux à la population et aux forces vives de Chenôve, parce que je trouve que c’est emblématique de ce que doit être l’action locale pour agir à l’échelle globale sur le réchauffement climatique et les défis environnementaux.
Cela s’inscrit aussi dans toute une politique que nous menons depuis plusieurs années : installation d’îlots de fraîcheur dans la ville, désimperméabilisation des cours d’école, apaisement de la circulation et volonté de réduire la place de la voiture. Il s’agit aussi d’avoir une politique éco-exemplaire du point de vue de l’institution municipale, par exemple en n’utilisant pas de produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts. Cela concerne aussi l’usage, dans les bâtiments communaux, de produits d’entretien qui ne soient pas agressifs, ni pour l’environnement ni pour les agents municipaux qui les manipulent.
C’est une vision globale, et le parc va être, d’une certaine manière, l’élément distinctif de cette ambition pour Chenôve.
Je voudrais rappeler qu’à l’endroit où le parc est en train d’être aménagé, des défis techniques importants ont dû être relevés. Hier encore, il y avait là un centre commercial : le centre commercial Saint-Exupéry, qui a connu ses heures de gloire dans les années 70. À l’époque, c’était un centre commercial de proximité où l’on trouvait de tout : un bijoutier, une boutique de laine, un café, un coiffeur, un fleuriste, un opticien… Tous les ingrédients étaient réunis pour que cela fonctionne. Mais à partir des années 80, comme tous les centres commerciaux des quartiers populaires et des villes comme la nôtre, il a dû faire face à la concurrence des hypermarchés et des galeries commerciales.
Le déclin a commencé, les commerces ont fermé les uns après les autres à la fin des années 90, et on s’est retrouvé avec un centre commercial vieillissant, marqué par une forme urbaine spécifique aux grands ensembles construits à la hâte. Cela a entraîné des dysfonctionnements que l’on a pu observer ailleurs dans ce type de structures commerciales en perte de vitesse.
Une première rénovation a eu lieu en 2005, grâce à l’établissement public de revitalisation commerciale, ce qui a permis au centre de survivre encore quelques années. Mais il a ensuite fallu prendre une décision concernant ce foncier de près de deux hectares.
Quand je suis arrivé en 2015, un projet existait : il prévoyait un grand parking. Il y avait une vaste esplanade en contrebas du Cèdre, destinée à devenir un parking, avec quelques arbres certes, mais essentiellement du stationnement ! Tout de suite, l’idée a germé de faire autre chose qu’un parking.
Il n’était pas question d’y construire du logement, ni d’y implanter de nouvelles activités commerciales qui auraient été, par miracle, plus florissantes que celles qui avaient fermé auparavant.
L’idée d’un îlot de fraîcheur s’est imposée : ramener la nature au cœur de la ville, avec un rappel du plateau de Chenôve. Ce plateau, tout proche de notre ville, est pourtant peu fréquenté par les habitants des grands ensembles, d’autant plus depuis l’incendie criminel qui a détruit notre centre de loisirs. Autrefois, les enfants allaient au centre de loisirs sur le plateau. Cela explique aussi notre volonté de le reconstruire.
Avec la SPLAAD (Société Publique Locale d’Aménagement), nous avons organisé un dialogue de compétitivité pour choisir l’aménageur de cet espace. C’est ainsi que j’ai rencontré l’architecte urbaniste et paysagiste Pascal Jacotot, qui a parfaitement compris l’enjeu de cet aménagement.
Il faut rappeler que la moitié du site repose sur une dalle, sous laquelle se trouvent des parkings, notamment pour les propriétaires de la Tour des Vignes Blanches. La question s’est donc posée : fallait-il conserver ces parkings ou les déconstruire complètement ? La décision était simple : les habitants ont besoin de stationnement, nous avons donc choisi de les conserver et de les rénover, tout en les protégeant des infiltrations d’eau.
En effet, lors de la rénovation de 2005, l’étanchéité de la dalle n’avait pas été refaite. Le centre commercial avait été rénové, mais sans se soucier des parkings en sous-sol, qui se retrouvaient inondés à chaque forte pluie.
Le défi était donc d’amener la nature sur une dalle, tout en prenant en compte les contraintes de portance. Une autre partie du site, un peu moins de la moitié, a été rendue à la pleine terre, avec la plantation de 1100 arbres, plusieurs dizaines de milliers d’arbustes et de fleurs.
Un système de récupération d’eau a été mis en place : l’eau de surface sera collectée et circulera à travers des noues afin d’alimenter l’ensemble du parc, réduisant ainsi la nécessité d’un arrosage extérieur.
Bien sûr, lorsque l’on intervient sur une telle structure, il y a des surprises, mais nous en parlerons après.
Ce projet est, pour moi, le plus emblématique de ce mandat. C’est un projet concret : dans moins de 110 jours, les habitants pourront s’y promener, flâner, faire du sport, s’amuser avec leurs enfants, lire sur des bancs… Un lieu paisible.
Mais il y a aussi un projet plus immatériel, qui m’a beaucoup occupé et qui m’occupe encore : le plan de cohésion sociale que nous avons lancé au lendemain de la crise sanitaire.
Cette crise a mis en exergue des inégalités déjà bien connues : inégalités d’accès aux soins, scolaires, sociales, de revenus, de logement…
Je rappelle que 26 % des habitants de Chenôve vivent avec moins de 60 % du seuil de pauvreté. Ce seuil étant à 1100 €, cela signifie qu’un quart de la population vit avec moins de 650 € par mois. Derrière ces chiffres, il y a des enfants, des femmes, des hommes, des familles.
Heureusement, la ville de Chenôve est là pour accompagner et aider les plus fragiles.
Lutter contre la pauvreté et la précarité, agir pour l’inclusion et pour que toutes et tous puissent vivre dignement à Chenôve, c’est une priorité qui doit être celle du maire et de la municipalité. À Chenôve, la solidarité est dans l’ADN de notre ville.
Voilà, à mes yeux, les deux réalisations les plus emblématiques de mon action depuis dix ans.
Les habitants de Chenôve sont invités à voter pour choisir le nom du futur parc situé à l’emplacement de l’ancien centre commercial Saint-Exupéry, dans le quartier du Mail. Trois propositions sont soumises au vote : le Parc Bonbis, le Parc Saint-Exupéry et le Parc du Cèdre. En tant qu’habitant de Chenôve, avez-vous déjà voté ou choisi votre nom favori parmi ces propositions ?
Thierry FALCONNET : Oui, j’ai voté. Mais je ne vous dirai pas pour quel choix, car je ne veux pas influencer le vote, dans un sens ou dans un autre !
Cependant, j’espère que, pour une fois, le vote que j’ai émis obtiendra satisfaction !
Je vais m’expliquer. Il y a eu deux autres concertations importantes.
D’abord, la première concertation concernait le choix de la Marianne. La Marianne qui a été choisie n’était pas celle pour laquelle j’avais voté. Mais j’ai respecté, bien évidemment, le vote populaire ! Je ne le regrette pas, car les habitants ont eu parfaitement raison de choisir cette Marianne. Aujourd’hui, elle se décline sur nos groupes scolaires, elle est présente sous forme d’un grand tableau dans mon bureau de maire, et elle figure sur la façade de l’Hôtel de Ville.
Je trouve que cette Marianne protège les habitants de Chenôve, en regardant l’esplanade de la République. Il y a une forme de tridimensionnalité : c’est la République en trois dimensions, et j’aime bien cette idée.
La deuxième concertation où je n’ai pas eu gain de cause concernait les rythmes scolaires. Il s’agissait de décider si nous restions à 4 jours et demi ou si nous revenions à la semaine de 4 jours. J’étais favorable – je l’avais dit – à la semaine de 4 jours et demi. Mais la consultation en a décidé autrement. J’ai donc appliqué et respecté le choix de mes concitoyens.
Cette fois encore, j’espère que mon choix sera celui des habitants. En tout cas, ce sera bien celui des habitants de Chenôve !
Ce parc suscite toutefois des critiques de l’opposition (Le Bon Sens à Chenôve), notamment sur son coût, qui serait passé de 5,5 millions à 12 millions d’euros. Comment expliquez-vous ce dépassement budgétaire ?
Thierry FALCONNET : Alors, j’ai déjà donné à plusieurs reprises les explications à notre opposition – enfin, à une de nos oppositions – en conseil municipal. Les chiffres ont été également publiés sur un revue municipale consacrée au budget et consacrée au projet du parc. J’ai toujours dit que la partie aménagement du parc ne dépasserait pas les 5,5 millions d’euros, ce qui est le cas. La partie aménagement. À cela – et c’est là où la manière de considérer les choses diverge avec l’opposition – il faut ajouter le désamiantage, qui n’était pas prévu à l’origine : nous avons trouvé de l’amiante dans les sous-sols, et aménager un parc où il va y avoir des enfants, des personnes âgées, en laissant des traces d’amiante, ce n’est pas possible. Donc nous avons désamianté. Il y a eu – et je l’ai expliqué également très clairement à notre opposition – le problème d’étanchéité de la dalle qui s’est avéré beaucoup plus complexe à traiter que prévu initialement, et il est vrai que nous avons choisi de sécuriser les choses en utilisant un procédé d’étanchéité qui est le procédé le plus efficace et le plus sûr pour à la fois ne pas avoir à revenir sur l’étanchéité dans vingt ans, et puis c’est aussi garantir aux personnes qui ont un garage en-dessous du parc, sous la dalle, de garantir qu’ils n’auraient plus les problèmes qu’ils ont eu pendant des années, à savoir des infiltrations, des inondations.
Et puis, je voudrais rappeler juste une petite chose, c’est que ce projet de parc j’ai évoqué 2015. Et c’est là où c’est parfois difficile à comprendre – et je ne parle pas pour les oppositions, les oppositions elles savent, elles s’opposent et c’est normal. Mais pour les habitants, le temps d’un projet n’st pas le temps du mandat. Je vais donner un autre exemple : là prochainement, nous allons démarrer les travaux sur le centre commercial Kennedy. Réhabilitation, réaménagement, reconfiguration complète du quartier Kennedy ; je l’ai lancé en 2015, ça aussi ! Je venais d’être maire ! Et on va avoir le premier coup de pelleteuse là, début 2025 ! Je pourrais aussi parler de la cour Margot, la cour Margot qui est restée dans les cartons pendant plusieurs années et il a fallu là aussi que j’ai le soutien de la métropole, de la SPLAAD pour que les choses se débloquent. Le projet de parc c’est pareil, on aura mis quasiment 10 ans pour le faire ce parc. Mais c’est de l’argent, c’est effectivement d l’argent, beaucoup d’argent, c’est du temps, c’est de l’intelligence, de l’intelligence collective, c’est – et ça rejoint ce que je vous disais tout-à-l ’heure – s’assurer que ce qu’on va aménager aujourd’hui tiendra dans le temps et correspondra aux besoins des habitants de demain. On ne travaille pas que pour nous quand on est maire, on travaille pour les générations d’après. Et peut-être que ce parc dans 20, 30 ans, on en parlera encore, en disant « Mais regardez, on a notre parc ! » Le parc de la Colombières – alors je ne compare pas ce qui n’est pas comparable, mais regardez Central Parc ! Dont on m’a beaucoup reproché l’inspiration ! Central Parc c’est une formidable utopie urbaine, en plein cœur d’une métropole mondiale vous avez comme ça des hectares de nature avec des écureuils, les gros écureuils gris, qui viennent à vos pieds ! Moi ce dont j’ai envie c’est qu’il y ait des animaux, qu’on revoit des oiseaux, qu’il y ait des poissons… Va y avoir une sorte de mare avec un renouvellement de l’eau, ce ne sont pas des eaux stagnantes on va éviter les moustiques tigres, je vais tout de suite prévenir les critiques. C’est une eau qui va circuler et qui va servir à alimenter les plantations en eau. Oui, c’est une forme d’utopie urbaine, mais si on ne rêve pas quand on fait des choses, à quoi bon ? Donc oui, ça a un coût. Je voudrais rappeler aussi que dans le coût du projet il y a aussi tout le réaménagement de la rue Saint-Exupéry. Qui fait partie du projet de parc. Et puis les habitants – là aussi on a concerté – les habitants ont souhaité que ce parc soit clos. Au départ il était ouvert. Et puis lorsque les habitants – lors d’une réunion de concertation au Cèdre – nous ont dit cela, ils nous ont dit « Attention la nuit… », j’ai vu une publication qui disait en gros « ce sera un squat pour les dealers ». Non, ce sera fermé. La journée ce seront les familles, les enfants, les personnes âgées qui viendront, et puis la nuit ce sera fermé. Donc effectivement ça a nécessité de revoir le projet financièrement. Donc oui ça a un coût, oui ce projet de parc en 10 ans il a évolué, mais je crois que c’est plutôt positif pour les habitants, pour la ville de Chenôve, pour le climat, pour l’environnement.
Donc il y a ensuite la question de l’entretien.
Oui, j’y viens. On a beaucoup de communes qui aujourd’hui sous-traitent. Que ce soit ID’ 21 ou d’autres entreprises – parce que ça va demander énormément d’entretien quand même ce parc – est-ce-que vous comptez recruter du personnel pour s’en occuper ou vous allez sous-traiter ?
Thierry FALCONNET : Dès le début, pour ce parc, j’ai envisagé les choses sous l’angle d’un éco-système. Donc c’est pas seulement un parc paysagé et un parc végétalisé. C’est aussi selon moi un lieu où on va pouvoir former des gens, des femmes et des hommes, aux métiers de l’entretien des parcs et jardins : des apprentis, des élèves du lycée agricole Olivier de Serres, du CFA de l’agriculture. C’est aussi permettre aux employés municipaux qui travaillent aux espaces verts d’avoir un lieu dans lequel ils pourront exprimer leur créativité, parce que ça nous déjà été dit en interne : « Monsieur le maire est-ce qu’on va pouvoir entretenir nous le parc ? ».
Je rappelle que ce sont nos équipes des espaces verts qui fleurissent la ville a toutes les saisons, ce sont les serres municipales qui produisent, les plants les fleurs et les arbustes qu’on voit dans la ville, qu’on voit aussi à Marsannay-la-Côte puisqu’on a une convention avec la ville de Marsannay : c’est la ville de Chenôve, les serres municipales, qui fleurissent la ville de Marsannay. Ce sont aussi nos espaces verts qui, avec l’office national des forêts, entretiennent la forêt communale, donc on a une équipe d’employés municipaux qui font un travail absolument remarquable. Ce sont eux aussi qui prennent soin de nos arbres, là on a recensé les arbres à la demande de la métropole, puisque la métropole veut cartographier les arbres, et je trouve que c’est une très bonne chose.
Ce sont nos espaces verts qui soignent les arbres malades, qui coupent les arbres qui sont malheureusement perdus, ce sont nos espaces verts qui ont végétalisé, par exemple, l’espace de la République, qui était un vaste espace minéral très chaud l’été, maintenant il y a de la végétation… Donc nos agents municipaux ils forment aussi des apprentis… On a des entreprises d’insertion, vous y avez fait référence. Le groupe ID’21 est installé à Chenôve. Des chantier-écoles pour les personnes éloignées de l’emploi, pour prendre connaissance de ce qu’est le métier d’entretien d’un espace vert. C’est aussi employer des TIJistes, dans le cadre des peines alternatives à l’emprisonnement.
On a une convention depuis plusieurs années, une convention d’emploi des personnes qui sont condamnées à des peines de substitution et c’est peut-être aussi donner à ces personnes une deuxième chance dans la vie en découvrant des métiers qu’ils ne connaissent pas forcément. Et pour tout ça il faut de la compétence, il faut des partenaires. Donc il y aura bien évidemment une gestion municipale du parc, mais une gestion qui se veut sur le mode du projet et de l’écosystème à la fois environnemental, social, économique -puisque ce sont aussi les entreprises qui auront participé à cet aménagement qui vont contribuer à son embellissement futur. Donc moi je n’oppose pas le public et le privé dans ce que sera la future gestion du parc. En revanche, ce qui est clair, c’est que le pilotage restera municipal, sur le mode projet.
On va revenir sur un sujet qui fera l’actualité prochainement : le lundi 16 décembre 2024, lors du conseil municipal, vous avez décidé d’organiser un référendum d’initiative locale concernant le plan de circulation de Chenôve. Avec le recul, regrettez-vous d’avoir mis en place ce plan, qui semble avoir suscité de nombreuses critiques ?
Thierry FALCONNET : Revoir la circulation à l’échelle de la ville, c’est effectivement considéré comme ambitieux, voire risqué, sur un plan plus politique. Parce qu’effectivement, toucher à des habitudes qui sont installées pour certaines d’entre elles depuis plusieurs dizaines d’années, c’est effectivement provoquer des changements, et tout changement provoque de l’inquiétude, des réactions, suscite des débats, et c’est tout-à-fait normal puisque ce plan de circulation c’est une transformation de la manière de considérer la place de l’automobile et la place des mobilités de notre ville. Regretter de l’avoir mis en place, absolument pas, parce que je savais en le faisant – avec l’accord de la métropole – je savais qu’il y aurait des frottements, voire plus que des frottements. Mais quand on prend des décisions elles ne sont pas toujours immédiatement populaires. Et je le redis sur cette question de la circulation, sur la question de l’impact de la circulation automobile dans une ville comme Chenôve qui est une ville résidentielle aussi, c’est mettre en place une vision à moyen et à long terme.
Je voudrais quand même rappeler que le réchauffement climatique et la responsabilité entropique sont des choses avérées – à part pour les les climatosceptiques et Donald Trump. Les experts du climat – et les experts reconnus tels que le GIEC, les Nations Unies – ont démontré que les évolutions climatiques qui sont observées, sur plusieurs siècles ont pour cause principal l’activité humaine. C’est l’Homme qui pèse le plus lourdement sur les modifications climatiques que nous connaissons aujourd’hui. Je voudrais rappeler qu’il y a 23 ans J. Chirac disait « Notre maison brûle et nous laissons faire ».
Les déplacements quotidiens sont pour une grande partie responsable de la pollution de l’air, du réchauffement, des émissions de gaz à effet de serre – notamment le CO2, dont j’ai donné les chiffres récemment. Donc effectivement l’idée c’est de peser sur cette question avec un enjeu de santé publique et puis un enjeu pour le climat. Donc dans ce nouveau plan de circulation il y a un triple objectif : la transition écologique et la qualité de l’air, la sécurisation des déplacements et l’amélioration de la tranquillité résidentielle, du cadre de vie à l’échelle du territoire communal. Parce que c’est ce que j’ai expliqué aussi à celles et ceux qui en fait ne voient qu’une petite partie du plan de circulation, je vais même la citer, c’est le filtre modal, appelé « barrage routier » par les opposants, au niveau de la route de Grands Crus, de la rue Maxime Guillot, qui suscite le plus d’acrimonies et de réactions.
Mais ce plan de circulation il est à l’échelle de la ville. Je le redis également, depuis que nous avons mis en place ce plan de circulation il a déjà été modifié. Il a déjà été ajusté. J’ai toujours dit que les aménagements étaient provisoires. Nous sommes sur une phase d’expérimentation, nous avons été – depuis l’été jusqu’à aujourd’hui – sur une phase d’ajustement. Encore récemment dans le vieux bourg, nous avons avec la métropole modifié, vraiment à la marge, les choses. J’ai aussi reçu les habitants de la rue Jules Ferry à proximité du filtre modal de la rue Maxime Guillot qui se plaignaient à juste titre d’avoir vu l’augmentation de la circulation dans leur rue, on a mis en place des mesures assez drastiques : un double sens interdit avec un sens réservé aux riverains, et pour les croiser régulièrement – comme vous l’avez indiqué j’habite cette ville et qui plus est ce quartier – les habitants me font part des évolutions et ça va mieux sur la rue Jules Ferry. Moi on me parle d’une pétition – vous y faites référence – de 3000-3500 signatures….
Je voudrais simplement dire, pour finir de répondre à cette partie de votre question : ça fait 10 ans que dans les visites de quartier, dans les permanences, dans les rencontres informelles que je peux avoir dans la ville, j’entends les gens me parler de la circulation routière, de la vitesse excessive, des infractions, et ainsi de suite. Nous avons fait notre travail et nous voulons sécuriser encore davantage les déplacements dans la ville, apaiser la circulation. Cet été, il n’y a pas eu de rodéo.
Alors il y a eu quelques motos qui ont circulé, mais il n’y a pas eu de rodéo. Ça veut dire que le signal qui est donné, ce signal d’apaisement, il est perçu, il est entendu. On sait très bien que dans ce domaine, rien n’est jamais gagné, donc il fait continuer. Il va y avoir le referendum d’initiative local, je l’ai souhaité dans cette forme-là parce que je pense que pour trancher cette question, il faut revenir au vote, et donner la parole au peuple de Chenôve, qui va s’exprimer. Il y aura une majorité, j’espère qu’il y aura une participation importante parce que c’est un sujet important qui touche au quotidien des habitants de Chenôve et pas que des commerçants et des riverains de la rue Maxime Guillot.
Revenons sur cette pétition. Certains commerçants l’ont fait circuler et elle aurait recueilli plus de 3 000 signatures. Interprétez-vous cela comme un signal fort d’opposition à ce plan ?
Thierry FALCONNET : Je l’ai dis et je le répète : cette pétition, je ne l’ai jamais eue dans les mains. Donc quand on initie une pétition qui s’adresse – me semble-t-il – au maire et à son cabinet, même sur internet, j’aurais apprécié que cette pétition, j’en sois destinataire. Ça c’est le premier point.
Ce que j’ai vu, c’est la pétition en ligne, qui avait été initiée par un commerçant – par le bar-tabac de la côte – avec le soutien d’une de nos oppositions. J’ai regardé vendredi, nous sommes lundi, vendredi il y avait 1060 signatures. Ce qui est déjà important. Une pétition, c’est comme une votation, vous pouvez signer trois fois, faire signer les enfants, la belle-mère… Combien d’habitants de Chenôve ont effectivement signé cette pétition ? Quelle est la proportion d’habitants de Marsannay, de Couchey, de la Fontaine d’Ouche, de Dijon ? Quelle est la proportion réelle des habitants de Chenôve qui ont signé cette pétition ? Donc cette pétition existe, je ne l’ai jamais eue entre les mains, elle est très largement citée, exploitée, par mes opposants, quels qu’ils soient… Moi maintenant j’attends de la voir. En tout cas la pétition c’est un acte citoyen, bien évidemment – j’ai moi-même initié et signé des pétitions – mais en démocratie, rien ne vaut le vote populaire. Et le vote populaire ce sera le 15 mars, c’est un samedi, on a souhaité que ce soit un samedi pour permettre que beaucoup de monde vienne voter, et les urnes parleront. Et je me suis engagé à tenir compte du résultat, comme je l’ai toujours fait dans les votations ou les consultations que j’ai pu organiser et proposer aux habitants depuis que je suis maire.
Encore une chose. On évoque la route des Grands crus, qui a toujours été là. La route des Grands crus, c’est 1937. Je me suis amusé à rechercher le nombre de voitures qui passaient à l’époque. En 1937 il y avait en France 200 000 voitures. En France. Aujourd’hui, on est à 40 millions de véhicules individuels, plus 7 millions de véhicules de transport, et 90% de ces véhicules sont des véhicules soit diesel soit essence. Donc moi je veux bien qu’on convoque l’histoire glorieuse de la route des grands crus, mais on peut aussi remonter au Moyen-Âge quand Chenôve était un petit village viticole et qu’on s’y rendait à cheval ou a pied… Il faut quand même rappeler les choses, on est aujourd’hui dans une société et dans des villes où le véhicule automobile prend une part trop importante. C’est pour ça que je me bats aussi pour le prolongement des transports en commun en site propre vers le sud. Pour que le tramway ou tout autre forme de transport collectif à haute fréquence et à haute capacité puisse encore renforcer l’offre de transport et de mobilité sur Chenôve.
Lors de la nuit de la Saint-Sylvestre, plusieurs véhicules ont été incendiés à Chenôve, comme dans d’autres communes de la métropole. Vous avez refusé de communiquer le nombre précis de véhicules touchés. Pourquoi ce choix ? Pensez-vous que cela permet de limiter l’impact de tels actes ?
Thierry FALCONNET : D’abord, je n’ai pas refusé de communiquer ces chiffres, j’ai simplement répondu à une question écrite de l’opposition, conformément au règlement intérieur du conseil municipal. Je voudrais simplement rappeler que les services compétents en matière d’ordre public et de sécurité publique, ce sont les services de la Préfecture et la direction interdépartementale de la Police Nationale. L’opposition connaît parfaitement bien l’adresse de la Préfecture puisqu’ils adressent régulièrement des recours contre des délibérations que je prends. Ils connaissent aussi l’adresse de la DIPN place Suquet, donc ils peuvent adresser leur question aux services compétents. Je vais le dire très simplement, à partir du moment où les services de la préfecture et de la Police Nationale ne souhaitent pas communiquer ces chiffres, je ne vois pas au non de quoi moi, maire de Chenôve, représentant de l’Etat aussi sur ma commune, je communiquerais ces chiffres.
D’autant plus que vous le savez, ces chiffres ne sont pas communiqués non pas pour les cacher, mais pour éviter l’escalade, le record battu d’une année sur l’autre. Et puis je vais le dire aussi, je suis maire d’une commune qui souffre d’un déficit d’image et j’en ai un peu assez que cette ville soit systématiquement dénigrée alors que come vous l’avez dit, les incendies de véhicules les soirs de la Saint Sylvestre, qui n’ont pas été à Chenôve d’une ampleur comme celle qu’on a pu connaître à d’autres moments beaucoup plus difficiles de la vie de notre commune. Je ne souhaite pas que la ville de Chenôve fasse les gros titres alors qu’il y a eu des incendies à Talant, à Dijon, à Marsannay… Je le regrette. Un véhicule incendié, c’est un véhicule de trop. Parce que ce sont des propriétaires qui se voient privés de leur moyen de transport et ainsi de suite.
Et puis j’aimerais bien, puisque l’opposition par définition, sauf à considérer qu’elle ne fait que s’opposer de manière stérile et polémique, peut-être qu’un jour cette opposition a la prétention d’être aux affaires et de diriger cette ville ! Toujours insister sur ce qui ne va pas et en faire son miel, je pense que ça n’est pas rendre service à la ville qu’on prétend demain vouloir gouverner. Moi j’aurais bien aimé entendre l’opposition se féliciter de la baisse des atteintes aux biens et aux personnes sur la ville ! A la baisse de la délinquance ! -30% d’atteinte sur les biens et les personnes en 2024 à Chenôve, c’est positif ça ! Pourquoi on n’en parle pas ? Pourquoi l’opposition ne me pose pas la question ? Parce que ça va bien, ça va mieux. Et le rôle de l’opposition bien évidemment c’est d’appuyer là où ça fait mal, mais c’est aussi, quand on aime sa ville, – et bien évidemment je ne doute pas un instant que les opposants aiment cette ville – eh bien quand on aime sa ville on met aussi en valeur ce qui s’y passe de bien.
Où en est aujourd’hui l’effectif de la police municipale à Chenôve ? Avez-vous réussi à résoudre les tensions ou problèmes éventuels au sein du service ?
Thierry FALCONNET : Aujourd’hui l’effectif est de 10 policiers municipaux. Nous recrutons un chef de police. J’ai lu l’article relatant des problèmes à la police municipale. Oui, il y a eu des problèmes internes au service de police municipale à Chenôve. Il y a eu des actes et des postures professionnelles inadmissibles de la part d’agents qui portent l’uniforme ; qui représentent la troisième force de sécurité intérieure aujourd’hui et qui sont chargés d’exécuter les pouvoirs de police du maire. Ces actes ont été relevés, il y a eu une enquête interne, une enquête administrative, à la suite de laquelle des sanctions ont été prononcées, et les sanctions ont à la hauteur de la gravité des faits qui ont été reprochés. Moi je veux une police municipale irréprochable, qui ne soit pas attaquable sur le plan de l’éthique, et une police municipale qui obéit aussi aux ordres qui lui sont donnés et aux orientations politiques – en matière de sécurité, de tranquillité publique, de police de proximité, de police de la route – que le maire donne.
La police municipale de Chenôve elle fait bien son travail, elle est au contact des habitants, elle fait de la proximité. Là vous parlez du nouveau plan de circulation : elle est aussi dans la pédagogie quand on met en place de nouveaux aménagements. Elle délivre des permis vélo pour les enfants des écoles alors que c’était une tâche et des missions qui étaient confiées à la police nationale. Aujourd’hui on a une policière municipale et ses collègues qui font passer le permis vélo aux enfants des écoles. Les policiers municipaux ils font aussi de la police de la route, ils ne font pas que du stationnement. Ils en font aussi. Ils sont présents le dimanche matin sur le marché, pour faire respecter le règlement intérieur du marché. Ils font de la proximité aussi. Je leur ai demandé, dès que le temps sera plus clément, qu’ils refassent des patrouilles pédestres, ce qui d’ailleurs est une des directives que le ministre de l’intérieur a donné aux policiers nationaux. Et j sais que le nouveau DIPN, Vincent Jeunot, va mettre en œuvre ce retour de l’ilotage, les patrouilles pédestres. Parce que contrairement à ce qu’on pense, à Chenôve on aime la présence de la police. Les habitants sont rassurés quand ils voient du bleu.
Donc au-delà des polémiques et des problèmes internes que vous avez évoqué et auxquels j’ai répondu, moi je voudrais saluer le travail qui est fait de la part de l’ensemble des forces de sécurité et de protection de la population, que j’ai toujours soutenues, parce qu’elles font un travail essentiel pour nos concitoyens.
En près de dix ans à la tête de Chenôve, y a-t-il des décisions ou des projets que vous regrettez ? Si vous pouviez revenir en arrière, feriez-vous certaines choses différemment ?
Thierry FALCONNET : Le projet que je vais regretter le plus, c’est celui que je n’aurai pas pu mettre en œuvre pour des raisons de contraintes budgétaires ou d’impossibilité structurelle. Le projet, par exemple, de revenu municipal garanti : nous allons le mettre en place, mais dans une forme beaucoup plus modeste que celle que j’aurais souhaitée.
J’ai évoqué tout à l’heure les 26 % de la population de Chenôve qui vit avec moins de 660 € par mois. Est-ce que c’est admissible dans un pays comme la France ? Est-ce que c’est tolérable quand, dans le même temps, les dividendes, les bénéfices, les revenus et le patrimoine des 100 personnes les plus riches de France ont doublé en sept ans sous les quinquennats d’Emmanuel Macron ? Ce n’est pas acceptable ! Moi, homme de gauche, qui reste viscéralement révolté contre les inégalités, contre les discriminations, contre les injustices, pour moi, ce n’est pas acceptable.
Et pourtant, nous allons devoir revoir nos ambitions en matière de revenu municipal garanti. Quand Roland Carraz a mis en place, à la fin des années 80, le revenu minimum étudiant, c’était une idée fabuleuse pour réguler cette injustice infligée aux jeunes issus des classes sociales les plus défavorisées, qui ne peuvent pas poursuivre des études supérieures comme ils pourraient en avoir envie…
Je pense que ce sera mon regret : ce projet que je n’aurai pas pu mettre en place.
Peut-être aussi être encore plus attentif que je ne le suis aujourd’hui… Et pourtant, je pense être un élu très à l’écoute. Ne pas écouter les choses négatives, mais toujours prendre ce qu’il y a de positif. L’idée, c’est d’être toujours plus sensible aux aspects et aux discours positifs qu’aux discours pessimistes ou anxiogènes. Mais pour ça, j’ai un entourage qui veille.
Une chose dont je suis sûr, après dix ans, c’est que j’ai su m’entourer des bonnes personnes. J’ai autour de moi des gens exceptionnels. Et c’est vrai que quand ces personnes sont injustement critiquées, voire injuriées, ça me touche, parce que je connais leurs qualités, le soutien qu’elles m’ont apporté et qu’elles m’apportent. Je sais tout ce qu’il y a de précieux dans leurs conseils et dans leur accompagnement.
Et peut-être que c’est quelque chose que je peux mettre à mon crédit : avoir su m’entourer d’une équipe exceptionnelle, compétente, pour laquelle j’ai le plus grand respect, et pour certaines d’entre elles, de l’affection.
Au bout du compte est-ce-que ce n’est pas cette équipe qui vous entoure qui fait le maire que vous êtes aujourd’hui ?
Thierry FALCONNET : Alors je dirais que c’est l’homme que je suis aussi qui a fait cette équipe. Ce que veux dire, c’est que ça fonctionne dans les deux sens. Oui, cette équipe qui m’a entouré, elle a très largement contribué à faire, à conforter, à accompagner le maire que je suis. Mais j’espère que l’homme avec lequel cette équipe aura travaillé pendant 10 ans et peut-être plus, aura aussi apporté quelque chose, et qu’ils auront été heureux, fiers de travailler avec le maire que je suis comme j’ai été fier et heureux que j’ai été de travailler avec eux.
Mais c’est parce qu’ils sont bons qu’ils sont très critiqués.
Les élections municipales approchent à grands pas. Avez-vous décidé de vous représenter pour un nouveau mandat à la mairie de Chenôve ?
Thierry FALCONNET : Alors, vous l’avez vraisemblablement compris dans mes réponses précédentes, ce n’est pas ma préoccupation première. Ma préoccupation première, c’est de tenir mon mandat jusqu’au bout dans un contexte politique très délétère, avec des incertitudes nationales toujours présentes, avec une extrême droite qui progresse encore dans les sondages et les intentions de vote, un Rassemblement National qui, aujourd’hui, affirme qu’il est quasiment en passe de prendre le pouvoir…
Donc, il y a ce contexte-là, mais aussi un contexte de contrainte forte sur les collectivités locales. Dans une commune comme Chenôve, qui dépend beaucoup des dotations – que ce soit la dotation de solidarité urbaine, la dotation des politiques de la ville –, c’est important et c’est inquiétant de construire un budget dans l’incertitude. Il y a également les projets que je mène avec l’équipe municipale, la réussite du RIL, car les équipes qui m’entourent le savent : ce n’est pas une mince affaire que d’organiser une consultation de ce type à l’échelle d’une commune. Cela pose toute une série de questions, notamment très pratiques.
C’est aussi participer, avec la métropole, au renforcement de l’offre de transports en commun et de transports publics sur Chenôve, c’est ramener un établissement de santé, une clinique sur le sud dijonnais et à Chenôve. C’est aussi rester au contact des habitants, avec la mairie mobile, qui est brocardée par l’opposition, mais qui correspond à cette proximité que j’ai voulu développer depuis dix ans avec les habitants de tous les quartiers.
Je suis donc au travail, et l’équipe municipale autour de moi l’est aussi… Vais-je me représenter ? Ce n’est pas une décision individuelle que je prendrai. J’ai parlé d’un collectif : si les conditions d’une cohésion collective pour poursuivre le travail déjà réalisé et celui qui reste à conduire sont réunies, je prendrai part à ce collectif. Mais aujourd’hui, je ne suis pas en mesure de répondre à votre question.
Ce qui m’importe, c’est Chenôve, ce sont les habitants. Vous voyez, récemment, j’ai écrit au Président de la République pour que la mémoire et la figure de Marcel Nodot soient honorées. Cela fait partie des choses que j’aimerais voir aboutir avant les prochaines élections municipales. C’est important aussi : c’est dans ces racines que l’on puise la force d’agir dans le présent et pour l’avenir.
Alors, il ne m’a pas échappé que des velléités se manifestaient… Vous l’avez évoqué, la presse quotidienne régionale aussi : les ambitions de La France Insoumise sur Chenôve. Ce que je vois et que je sais, pour l’avoir éprouvé y compris à l’échelle locale, c’est que l’union est un combat. On ne fait pas l’union en injuriant, en insultant celles et ceux qui peuvent devenir demain vos partenaires. Toutes les divisions, au niveau national comme au niveau local, affaiblissent la gauche dans son ensemble.
Pourquoi avons-nous gagné l’élection législative sur la troisième circonscription de la Côte-d’Or ? Pourquoi avons-nous placé un député de gauche sur cette circonscription, qui était tenue par les macronistes ? Qui était tenue par une ministre du gouvernement Macron, soutenue par le sénateur macroniste de Côte-d’Or ? Tout simplement parce que nous avons fait l’union dès le premier tour. La force propulsive a été là.
Vous aimeriez cette union ?
Thierry FALCONNET : Pas à n’importe quel prix. Je suis très clair avec vous : moi, je suis un fervent partisan de l’union. Mais l’union ne se fait pas au prix de renoncements à des choses et à des valeurs qui me semblent essentielles. Je pense que le bruit et la fureur, l’invective, la pression ne sont pas des méthodes de gouvernance dans une commune.
Villeneuve-Saint-Georges, présentée par les partisans, y compris locaux, de la FI comme la voie à suivre… Quand l’union ne se fait pas et qu’on propose un diktat à ses partenaires, il arrive ce qui est arrivé à Villeneuve-Saint-Georges : on arrive en tête au premier tour, mais au deuxième tour, on n’est pas capable de rassembler et on perd.
Je voudrais rappeler qu’en 2020, sur la base de l’union des gauches, à laquelle La France Insoumise n’avait pas voulu participer malgré les propositions que je lui avais faites, j’ai été élu au premier tour avec 66 % des voix. Je ne dis pas que j’obtiendrais le même score si je devais être amené à me représenter, avec une union la plus large possible, mais je ne me compromettrai pas sur des questions qui me semblent absolument essentielles, comme par exemple la sécurité publique, la laïcité, l’utilisation, selon moi excessive, du contexte international à des fins strictement politiciennes locales.
Je vais le dire très simplement : malheureusement, ce n’est pas au conseil municipal de Chenôve que la paix à Gaza et en Palestine sera décrétée. Malheureusement. Si nous avions ce pouvoir, bien évidemment, nous le ferions. Mais faire croire aux habitants de Chenôve que c’est parce qu’ils vont signer une pétition que la paix en Palestine va s’instaurer… D’ailleurs, sous quelle gouvernance ? Celle du Hamas ? Moi, je ne céderai pas, par exemple, sur les questions d’antisémitisme, parce que l’antisémitisme est un racisme, et moi, je suis contre tous les racismes. Je m’oppose à tous les racismes, quels qu’ils soient.
J’ai lu attentivement le communiqué de La France Insoumise, qui va être présente aux élections municipales à Chenôve, comme dans 120 autres villes où ce mouvement politique est arrivé en tête aux élections européennes. D’abord, une élection européenne, ce n’est pas une élection municipale. Les enjeux locaux, concrets, vont primer.
Et puis, je suis très surpris de voir un certain nombre de personnes s’exprimer en faveur de la FI aujourd’hui, les mêmes qui, hier, soutenaient Fadila Khattabi, Emmanuel Macron, sur les réseaux sociaux. Des personnes qui n’habitent même plus Chenôve. Des personnes qui apportent leur soutien à la démarche… Très bien, mais qu’ils viennent habiter la ville d’abord. Qu’ils viennent y vivre et pas seulement y faire du tourisme commercial le dimanche sur le marché. Ou du tourisme politique, pour certains d’entre eux.
Et puis, je vois aussi ressurgir des pseudos sur les réseaux sociaux, des gens que je n’avais pas vus depuis cinq ans, qui reviennent avec les mêmes discours, les mêmes reproches… Bon… Moi, je crois que les habitants de Chenôve, ce qu’ils apprécient, c’est d’avoir des élus municipaux au contact, qu’ils connaissent, qu’ils voient régulièrement… Moi, je fais mes courses à Chenôve, je me promène dans la ville… Ce week-end, j’ai été quasiment tout le week-end sur le terrain, au contact des associations. J’ai été au Cèdre voir un très beau spectacle sur Chenôve, mis en musique par Jean-François Ziegel…
Les habitants de Chenôve ont envie d’avoir un maire qu’ils connaissent, sur lequel ils savent pouvoir s’appuyer et en qui ils peuvent avoir confiance.