Alors que François Rebsamen a officiellement annoncé ce vendredi son projet de 3e ligne de tramway entre Chenôve et Cap Nord, Axel Sibert, conseiller municipal d’opposition et président du Laboratoire d’Idées Dijonnais, a réagi dans un communiqué sans concession. Il y défend un projet alternatif de ligne structurante entre Chevigny-Saint-Sauveur et Dijon, qu’il présente comme mieux pensé, plus écologique, plus connecté, et surtout plus juste socialement.
« Le projet de 3e ligne que nous portons est plus ambitieux et plus vertueux pour Dijon et la Métropole », affirme-t-il d’emblée, saluant tout de même le fait que l’annonce de François Rebsamen « vient conforter notre projet porté depuis plusieurs mois par le Laboratoire d’Idées Dijonnais ».
Deux visions, deux finalités
Pour Axel Sibert, l’enjeu d’une 3e ligne de tramway est clair : il faut réinventer le réseau de transport dijonnais, treize ans après la mise en service des lignes T1 et T2. Mais si lui et le président de la Métropole partagent le constat de la nécessité d’évoluer, leurs projets divergent radicalement sur le fond.
« Les scénarios proposés par les études commandées par Dijon Métropole […] valident que la mise en place d’une 3e ligne est préférable à une simple extension. »
Cependant, là où le projet de François Rebsamen se concentre sur la désaturation des lignes existantes, Axel Sibert voit un manque de vision à long terme. Il estime que cette approche admet l’échec du dispositif « CAPATRAM », censé améliorer les fréquences et soulager la pression sur T1 et T2 en heure de pointe.
« Les objectifs poursuivis par nos deux projets sont radicalement différents », affirme-t-il. « Le projet de François Rebsamen s’inscrit dans une logique de désaturation, ce qui montre l’échec des récents travaux « CAPATRAM ». »
Un projet pour désengorger, connecter, et verdir
Le projet du Laboratoire d’Idées Dijonnais, mené par Axel Sibert, se veut plus structurant et répond à un triple objectif selon lui : désengorger les axes de circulation, connecter les zones d’habitations et d’activités mal desservies, et verdir les déplacements quotidiens.
« Notre projet de 3e ligne de tramway contribuera à diminuer le trafic automobile et les embouteillages sur les corridors majeurs, notamment la rocade, en favorisant les échanges entre les différents modes de transports : voiture, TER, tram-train, tram, bus. »
Pour lui, la proposition de Rebsamen laisse de côté des territoires entiers de la métropole, qui ont un besoin criant de transport public. Pire, elle concentre l’investissement dans des zones déjà bien desservies : « En proposant de faire passer la nouvelle ligne à Chenôve et dans le quartier des Grésilles, déjà desservis par le T1 et T2, François Rebsamen fait le choix de créer de nouveaux “oubliés du tram”. »
Axel Sibert critique aussi le terminus proposé à Cap Nord, près d’IKEA, qu’il juge totalement inadapté aux besoins réels des usagers.
« Ce choix pose question. Il n’y a aucune habitation à proximité, et aucun intérêt à y aller après la fermeture des magasins. La place prise par le tram risque de produire encore plus d’embouteillages dans une zone déjà congestionnée. Qui imagine transporter son meuble IKEA en tram ? »
Une ligne en mode RER et interconnectée
Le projet d’Axel Sibert s’inspire d’un modèle de type RER francilien, avec deux branches :
- T3a : Chevigny-Saint-Sauveur – Dijon Gare
- T3b : Chevigny-Saint-Sauveur – Dijon Valmy
Il ambitionne de desservir 4 communes de la métropole : Chevigny-Saint-Sauveur, Neuilly-Crimolois, Longvic, et Dijon. Le tracé permettrait également de relier des quartiers stratégiques encore mal connectés au réseau : Chevreul-Parc, Voltaire, 30 octobre-Porte Neuve, Parc des Expositions, La Vapeur, Zénith, Monge-Cité de la gastronomie et la gare de Dijon.
Autre atout souligné : la réutilisation des voies ferrées existantes entre Neuilly-Crimolois et La Vapeur, ce qui limiterait considérablement les nuisances liées aux travaux.
« Contrairement au projet présenté par le président de la métropole, notre projet produira moins de nuisances sur le chantier, notamment sur le tronçon 1er Mai – Erasme. »
Enfin, Sibert met en avant une logique d’ouverture du territoire : « Notre projet est celui d’une métropole intégrée, qui rayonne sur tout son territoire et s’ouvre vers l’extérieur avec des connexions aux réseaux ferroviaires (Dijon-Is-sur-Tille, Dijon-Besançon) et routiers (sortie A39). Le projet Rebsamen, lui, recroqueville la métropole sur elle-même. »
Budget et calendrier : Axel Sibert alerte sur un risque de dérapage
Autre angle d’attaque : le coût sous-évalué, selon Axel Sibert, du projet Rebsamen. Ce dernier évoque 200 millions d’euros pour 10 km, soit 20 M€/km, un ratio identique à celui de 2012. « Ce ratio est irréaliste, même avec 3 km de tronc commun. Depuis, les coûts des travaux et du matériel ont considérablement augmenté. »
Axel Sibert cite l’exemple de la ligne 5 de Montpellier, inaugurée récemment par… François Rebsamen lui-même : 542 millions d’euros pour 16 km, soit 34 M€/km.
« Il faut s’attendre à un sérieux dérapage budgétaire pour ce projet manifestement sous-estimé, à l’image des derniers projets de la Ville et de la Métropole qui ont connu d’importants surcoûts : Hôtel Bouchu d’Esterno, Base nautique du lac Kir, Place du 30 octobre… »
Le projet qu’il porte est, lui, estimé à 400 millions d’euros sur la base d’un coût réaliste de 40 M€/km, pouvant être revu à la baisse grâce à la réutilisation des infrastructures existantes. Il entraînerait moins de perturbations, donc moins de coûts indirects.
Une question de choix démocratique en 2026
Axel Sibert conclut sur l’importance de la concertation citoyenne, et annonce que le débat sur cette 3e ligne de tram sera au cœur des élections municipales de 2026 : « Les deux projets sont sur la table, et la concertation avec les habitants et les employeurs permettra d’apporter tout l’éclairage nécessaire. En 2026, les électeurs trancheront : projet contre projet. »
