L’ouverture d’un corner dédié à la marque chinoise SHEIN dans les magasins emblématiques du commerce français continue de faire réagir. Après Paris, Angers ou Limoges, Dijon a déjà connu ce phénomène l’été dernier avec l’installation d’une boutique éphémère qui avait attiré une foule considérable. Pour l’association Construire Dijon Autrement, ce succès populaire révèle un paradoxe profond entre le discours politique et les pratiques des consommateurs.
Dans un communiqué diffusé le 7 novembre, Construire Dijon Autrement estime que l’arrivée de SHEIN dans des espaces autrefois réservés à des enseignes haut de gamme, comme le BHV, est « un symbole des défis économiques et sociaux de la France ». Selon ses représentants, la métropole dijonnaise s’appauvrit progressivement, tandis que la production locale perd du terrain face à la concurrence internationale.
Un engouement populaire qui contredit l’indignation politique
L’association rappelle que partout où SHEIN s’implante temporairement, le succès est au rendez-vous. À Dijon, en juin dernier, la boutique éphémère avait suscité des files d’attente quotidiennes, malgré les critiques portant sur l’impact environnemental, social et fiscal de la marque. « Le consommateur applaudit là où le politique s’indigne », résume Construire Dijon Autrement, soulignant l’écart croissant entre discours et comportements.
Un coût réel de consommation largement invisible
Le communiqué dénonce également l’opacité autour des prix pratiqués. Selon Construire Dijon Autrement, plus de 80 % des articles vendus par la plateforme ne respecteraient pas les normes européennes en vigueur. De plus, les coûts logistiques liés à l’importation de colis depuis la Chine seraient largement sous-évalués. La Poste supporterait notamment un déficit sur chaque colis en raison de tarifs postaux préférentiels, la Chine étant encore classée comme « pays en développement ». L’envoi d’un colis de 90 grammes depuis l’Asie ne rapporterait ainsi que 1,14 € à La Poste, un montant bien inférieur au coût réel de traitement.
Un modèle social et municipal à repenser
Pour Construire Dijon Autrement, cette situation met en lumière une problématique plus large : celle de la soutenabilité du modèle social et économique local. À Dijon notamment, les investissements publics annoncés — nouvelle ligne de tramway (dont le coût réel pourrait atteindre 400 millions d’euros), rénovation du Parc des Expositions, restauration de monuments historiques, modernisation du Grand Théâtre — représenteraient des dépenses considérables dans un contexte de finances fragilisées.
« Le tout gratuit ne fonctionne plus », avertit Construire Dijon Autrement, qui appelle à une réévaluation des priorités financières et des politiques publiques locales.
Concilier pouvoir d’achat et responsabilité
L’association assure toutefois qu’il est possible de réconcilier les exigences des consommateurs avec celles des citoyens. Parmi les pistes avancées :
- réinterroger les grands projets d’infrastructures,
- mieux informer sur les coûts réels des services publics (cantines, transports),
- mobiliser la commande publique en faveur des entreprises locales.
À l’approche des échéances électorales municipales, le collectif invite les forces politiques à un « débat de fond » sur les orientations économiques de la métropole. Objectif affiché : « concilier attractivité, justice sociale et responsabilité budgétaire ».
