L’Assemblée des Départements de France (ADF) a vivement réagi, ce jeudi, à la diffusion d’un reportage de l’émission Envoyé spécial consacré à la prostitution des mineurs. Dans un communiqué, l’association regrette de ne pas avoir été sollicitée par la production et dénonce « un traitement sensationnaliste » susceptible de jeter le discrédit sur l’ensemble des acteurs de la protection de l’enfance.
Selon l’ADF, les Départements, responsables de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), signalent quotidiennement à l’autorité judiciaire tout mineur susceptible d’être victime d’exploitation sexuelle. « C’est un problème de société qui dépasse largement le cadre de la protection de l’enfance », précise l’organisation, qui rappelle que ces situations nécessitent l’intervention coordonnée de la police, de la gendarmerie, du parquet et de la justice.
Un secteur déjà fragilisé
Pour les Départements, cibler les services de l’ASE dans un contexte de montée des violences juvéniles revient à ignorer la complexité des phénomènes d’emprise exercée par les réseaux de prostitution. « Mettre ainsi un coup de projecteur sur les services départementaux qui se battent au quotidien pour protéger les plus fragiles n’est ni responsable, ni honnête », affirme l’ADF, soulignant l’engagement des professionnels auprès d’enfants « aux trajectoires de vie éprouvantes ».
L’institution alerte par ailleurs sur les difficultés de recrutement dans le secteur social. Un reportage jugé « stigmatisant » risquerait, selon elle, de décourager de futures vocations : « Que ferons-nous alors collectivement, quand il n’y aura plus assez de travailleurs sociaux pour accompagner les enfants vulnérables ? »
Des responsabilités partagées entre l’État et les collectivités
Les Départements réaffirment également les failles structurelles de l’État en matière de protection de l’enfance. Ils s’appuient sur les conclusions de la commission d’enquête parlementaire menée par la députée Isabelle Santiago, qui a mis en lumière la responsabilité conjointe de nombreuses politiques publiques : justice, éducation nationale, santé mentale, handicap.
L’ADF soutient les trois recommandations formulées dans le rapport rendu en avril 2025 :
- la création d’un groupe de travail interministériel,
- le déploiement de formations spécifiques,
- et le renforcement de la commission départementale présidée par le préfet, via un protocole dédié aux mineurs.
Une indignation exprimée par les élus
Florence Dabin, présidente du Département de Maine-et-Loire et présidente de France Enfance Protégée, se dit elle aussi « choquée » par le traitement du sujet. « L’exploitation sexuelle des mineurs est une réalité insupportable, mais ce type de reportage n’en est pas moins choquant pour tous les professionnels, les élus et les associations », affirme-t-elle. Elle rappelle que le rapport parlementaire appelle à « une réforme d’ampleur » et « met clairement en lumière la responsabilité de l’État ».
Pour l’ADF, utiliser le drame de la prostitution des mineurs « pour attaquer les services départementaux » revient à nuire à la cause elle-même. L’association revendique au contraire un travail quotidien de terrain qui, selon elle, « sauve des vies ».
Communiqué de l’Assemblée des Départements de France du 27 novembre 2025 :
Départements de France n’a pas été sollicité par la production d’Envoyé spécial alors qu’au quotidien, les Départements s’emploient à signaler à l’autorité judiciaire tout mineur supposé être victime d’exploitation sexuelle. C’est un problème de société qui dépasse largement le cadre de la protection de l’enfance.
Les services de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) sont le reflet des difficultés auxquelles l’ensemble de la société est confronté dans un contexte de montée des violences juvéniles. Les réseaux à l’œuvre sont puissants, l’emprise est réelle sur ces jeunes victimes. Mettre ainsi un coup de projecteur sur les services départementaux qui se battent au quotidien pour protéger les plus fragiles n’est ni responsable, ni honnête.
Cela jette l’opprobre sur l’ensemble des acteurs de la protection de l’enfance dans la seule recherche d’un sensationnalisme de circonstance. Dans la réalité, ces situations complexes méritent d’être appréhendées avec sérieux. Elles concernent les services de police ou de gendarmerie, le parquet pour caractériser les faits et la justice pour protéger les victimes et sanctionner leurs auteurs.
Départements de France souhaite saluer l’engagement quotidien de tous les professionnels qui accompagnent des enfants aux trajectoires de vie éprouvantes. Il n’y a pas de problème plus lancinant que celui de l’enfance en danger pour un président de Département. Le secteur souffre déjà d’un manque de professionnels, et ce n’est pas avec ce genre de reportage stigmatisant que les jeunes générations auront envie de s’investir au service des plus fragiles.
Que ferons-nous alors collectivement, quand il n’y aura plus assez de travailleurs sociaux pour accompagner les enfants vulnérables ? La prostitution des mineurs est un véritable fléau qu’il faut combattre sans relâche en ne s’interdisant pas, comme en matière de stupéfiants d’agir sur le consommateur.
Plus globalement, les Départements ne cessent d’alerter sur les failles de l’Etat et sur des problématiques qui nécessitent des actions coordonnées avec lui, afin que chaque acteur assume pleinement sa part de responsabilité. La protection de l’enfance est l’affaire de tous. La commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance dont la rapporteure est la Députée Isabelle Santiago, l’a clairement démontré : Justice, Éducation nationale, Santé mentale — notamment la pédopsychiatrie — ou encore Handicap, toutes les politiques publiques sont concernées.
Départements de France soutient pleinement les trois recommandations formulées dans le rapport de la commission rendu en avril 2025 : la création d’un groupe de travail interministériel, le déploiement de formations spécifiques, ainsi que le renforcement du rôle de la commission départementale présidée par le préfet de département, via un protocole spécifique aux mineurs.
« L’exploitation sexuelle des mineurs est une réalité insupportable, mais ce type de reportage n’en est pas moins choquant pour tous les professionnels, les élus et les associations qui s’investissent au quotidien aux côtés des enfants de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) », dénonce Florence DABIN, présidente du Département de Maine-et-Loire et présidente de France Enfance Protégée. « Le rapport de la commission d’enquête appelle à une réforme d’ampleur et met clairement en lumière la responsabilité de l’État » rappelle-t-elle.
Se servir du sujet dramatique de la prostitution des mineurs en France pour attaquer les services départementaux de l’Aide sociale à l’enfance, qui effectuent un travail difficile, ce n’est pas aider la cause, mais discréditer tout un dispositif qui chaque jour sauve des vies.
