Michel Barnier, Premier ministre fraîchement nommé, a accordé sa première interview au journal de 20 heures de France 2 ce dimanche 22 septembre. Ce rendez-vous médiatique très attendu a permis au chef du gouvernement de clarifier sa vision et ses priorités pour les deux prochaines années. Dès le début de l’entretien, Michel Barnier a insisté sur la nécessité de « cohésion » et de « fraternité » au sein de son équipe gouvernementale.
Il a souligné l’importance des compromis pour garantir le “progrès du pays“, promettant un esprit de travail collectif, en phase avec les attentes des citoyens. Cette approche, selon lui, doit contribuer à apaiser les tensions politiques nées de la récente recomposition de l’Assemblée nationale, divisée en trois blocs distincts après le deuxième tour des élections législatives anticipées.
Michel Barnier a toutefois tenu à dissiper tout doute sur la nature de la relation entre lui et le président Emmanuel Macron. “Nous ne sommes pas en cohabitation“, a-t-il affirmé, précisant que l’essentiel du socle parlementaire soutenant le gouvernement reste composé de personnalités présentes depuis sept ans aux côtés de l’exécutif. Il a également déclaré que la “complémentarité” avec le président de la République serait “bonne“, rejetant l’idée d’une quelconque rivalité. Selon lui, la priorité absolue reste l’intérêt du pays, nécessitant un “esprit de compromis positif et dynamique” avec le chef de l’État.
De plus, Michel Barnier a définitivement fermé la porte à toute spéculation autour de sa candidature à la présidentielle de 2027, affirmant avec fermeté : “Je ne me présenterai pas en 2027. Je veux servir pendant deux ans.” Sur la question des finances publiques et de la fiscalité, le Premier ministre a clarifié ses intentions concernant les impôts. Il a promis de ne pas alourdir la fiscalité pour la majorité des Français, notamment pour les plus modestes, les travailleurs et les classes moyennes, des catégories qu’il entend préserver de toute nouvelle charge fiscale.
En revanche, Michel Barnier a annoncé son intention de demander aux “personnes les plus fortunées” de participer davantage à l’effort de solidarité nationale. Pour lui, il est impératif que ceux qui possèdent les plus grandes fortunes contribuent davantage, notamment dans un contexte où la France doit faire face à la double dette, à la fois écologique et financière. Les grandes entreprises, en particulier celles réalisant des bénéfices conséquents, ne seront pas épargnées par cette démarche. “Je ne veux pas aggraver la double dette écologique et financière, donc il faut faire un effort collectif pour maîtriser les dépenses“, at-il expliqué, tout en laissant la porte ouverte à des “prélèvements ciblés sur les personnes fortunées ou certaines grosses entreprises “. Interrogé sur une éventuelle hausse de l’impôt sur les sociétés, Michel Barnier n’a pas exclu cette possibilité, affirmant que “les très grandes sociétés peuvent aussi contribuer à l’effort national de redressement“.
Concernant la réforme des retraites, un sujet brûlant en France depuis plusieurs années, Michel Barnier a exprimé sa volonté de “prendre le temps d’améliorer” cette réforme, tout en préservant le cadre financier qui a été mis en place. Cette réforme, qui a provoqué de nombreuses manifestations et mouvements sociaux, prévoit le rapport progressif de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, un point que Barnier souhaite ajuster en consultation avec les partenaires sociaux.
Le Premier ministre a souligné l’importance du dialogue avec les syndicats et les autres acteurs du monde du travail pour trouver des solutions qui permettront d’améliorer ce système, tout en assurant sa viabilité économique à long terme.
Sur le plan des droits sociaux et sociétaux, Michel Barnier a tenu à rassurer. Face aux inquiétudes exprimées par certaines franges de la population, notamment après l’entrée de plusieurs ministres conservateurs dans son gouvernement, il a affirmé que les grandes lois relatives au « progrès social ou sociétal » seraient « intégralement préservées ». Il s’est ainsi engagé à protéger les droits acquis en matière d’interruption volontaire de grossesse (IVG), de procréation médicalement assistée (PMA) et de droits des personnes LGBT. Barnier s’est montré inflexible sur ce sujet, affirmant qu’il serait un “rempart” contre toute tentative de revenir sur ces droits fondamentaux, et qu’il n’y aurait “aucune ambiguïté” à ce sujet.
Cette déclaration fait écho aux préoccupations exprimées plus tôt dans la journée par Gabriel Attal, qui avait demandé des garanties sur la préservation des droits liés à la PMA, à l’IVG et aux droits des personnes LGBT.
L’interview a également été l’occasion pour Michel Barnier de dévoiler un engagement personnel fort : faire de la santé mentale la “grande cause nationale” en 2025. Ce sujet, qui lui tient particulièrement à cœur en raison de l’engagement de sa mère, présidente d’une association nationale pour les familles et amis de malades mentaux, est cruciale dans le contexte actuel. En effet, la psychiatrie française fait face à une crise profonde avec un tiers des postes de praticiens hospitaliers vacants et une diminution constante du nombre de lits disponibles, alors que la demande a doublé au cours des vingt dernières années.
Michel Barnier a également rappelé que le Conseil national de la refondation (CNR) consacré à la santé mentale, initialement prévu cet été, avait dû être annulé suite à la dissolution de l’Assemblée nationale. Enfin, il a reconnu que l’absence d’un portefeuille ministériel spécifique dédié aux personnes handicapées, désormais sous la responsabilité du ministre des Solidarités et de l’Autonomie Paul Christophe, avait suscité des critiques, notamment de la part des associations concernées.
Toutefois, Michel Barnier s’est engagé à ce que cette question ne soit pas négligée et qu’un suivi rigoureux soit assuré dans ce domaine. Cette première interview du nouveau Premier ministre a permis d’en savoir davantage sur les priorités de son gouvernement et sa vision pour les deux années à venir. Michel Barnier s’est montré résolu à aborder les principaux défis auxquels la France est confrontée, en prônant la cohésion, le compromis et un engagement ferme en faveur des droits sociaux, de la justice fiscale et de la santé publique. Il reste à voir si ces engagements se concrétiseront dans la pratique au cours des semaines et mois à venir.